Dossier Médical Personnel : un demi-milliard d’euros jeté par les fenêtres

Malgré à peine 8% de ses objectifs atteints, le Dossier Médical Personnel est un gouffre financier sans fond pour le contribuable.

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Dossier Médical Personnel : un demi-milliard d’euros jeté par les fenêtres

Publié le 6 janvier 2014
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Par Kevan Saab.

Dossier médical personnel DMPLe Dossier Médical Personnel, DMP pour les intimes, ne vous évoque probablement rien. N’ayez crainte, derrière ce sobriquet technique se cache l’un de ces projets ministériels censé nous faciliter la vie, mais dont la gestation coûteuse, longue et difficile ne s’achève généralement que lorsque ledit projet est tombé en totale désuétude.

Ne faisant pas exception à la règle, le DMP avait initialement pour but de convertir à terme nos carnets de santé en un unique fichier informatisé consultable par tous les praticiens croisant notre chemin, histoire de coordonner au mieux les soins administrés au patient et donc in fine de réduire les risques de mauvais diagnostics et les sur-prescriptions.

Seulement voilà, malgré ces louables intentions et les engagements financiers importants de l’État, le DMP, lancé en 2004 par Philippe Douste-Blazy, peine à atteindre ses objectifs. Au lieu de 5 millions de dossiers ouverts fin 2013 comme anticipé, le site officiel annonce à date à peine 418.247 dossiers ouverts, soit à peine 8 % de l’objectif initial. En matière de coût cependant, les objectifs sont allègrement dépassés, comme le rapporte Le Parisien. Avec 500 M€ au compteur fin 2013, le DMP s’avère bien dispendieux pour des résultats insignifiants. En effet, aujourd’hui, d’après les chiffres connus, chaque dossier médical ouvert a coûté la bagatelle de 1.200 € !

Pire, les dépenses seraient largement sous-estimées selon Gérard Bapt, député PS de Haute- Garonne, spécialiste des questions de santé, qui pointe très justement du doigt les « coûts induits par l’adaptation du dossier informatisé dans les hôpitaux, les heures de formation, et toutes ces dépenses qui ne concernent pas directement l’élaboration du dossier mais qui sont bien réelles ».

D’ailleurs, les dépenses ne sont pas près de s’arrêter car l’État se voit contraint d’engager 7 millions d’euros supplémentaires cette année encore en attendant de redéfinir une nouvelle stratégie, alors que Marisol Touraine avance même l’idée d’un DMP 2.0.

Pourtant, la sonnette d’alarme avait été tirée il y a déjà un an et demi par la Cour des comptes dans un rapport cinglant alors que l’addition atteignait déjà les 210 M€ à l’époque. Les critiques formulées alors étant toujours d’actualité, en voici ici quelques morceaux choisis tirés de la conclusion générale du rapport :

Au-delà de l’insuffisance grave de suivi financier qui a accompagné le développement du dossier médical personnel, la Cour souligne les risques lourds pour son bon aboutissement que comporte l’absence d’analyse des coûts induits par son déploiement et son fonctionnement.

Ces constats attestent d’une absence particulièrement anormale et préjudiciable de stratégie et d’un grave défaut de continuité de méthode dans la mise en œuvre d’un outil annoncé comme essentiel à la réussite de profondes réformes structurelles.

La Cour considère comme particulièrement préoccupant qu’il n’y ait pas encore été remédié alors qu’elle a à plusieurs reprises alerté les autorités compétentes sur les risques d’une telle situation, à la fois en termes de dérive des coûts et d’attente des objectifs espérés.

Alors que le fiasco informatique d’Obamacare faisait la Une des actualités internationales il y a encore quelques semaines, il est grand temps d’accepter le fait que l’État ne peut ni concevoir, ni piloter, ni implémenter, ni diffuser efficacement des plateformes informatiques dans le domaine de la Santé.

N’en déplaise à nos ministres, la palette de compétences et les processus d’innovation et d’ajustement nécessaires à la conception d’une solution informatique capable de remplir les livrables du DMP, de manière compétitive pour le contribuable et performante pour le patient, ne se trouve pas ailleurs que dans un marché libre où les clients – praticiens, hôpitaux, cliniques, etc. – sont engagés de façon continue avec les producteurs de logiciels pour rendre le produit mieux adapté aux besoins et plus abordable.

Il est fort à craindre que l’approche dirigiste de Marisol Touraine sur le dossier du « DMP nouvelle génération » se soldera par des surcoûts prévisibles et un rejet similaire de la part des acteurs du domaine de la santé.

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  • Je ne suis pas un spécialiste du sujet, mais il suffirait peut-être de revoir le fonctionnement des marchés publics dans le secteur de l’informatique : le fonctionnement actuel est le même qu’on conçoive un logiciel (par définition appelé à évoluer très rapidement) ou un bâtiment (qui s’inscrit plus dans la durée) :appel d’offre pour rédiger le cahier des charges, puis recueil du besoin, rédaction du cahier des charges, puis nouvel appel d’offre pour le développement, développement dont le résultat doit être strictement conforme au cahier des charges initial, puis livraison du produit. Et on repart dans un nouveau cycle complet pour reprendre les aberrations et oublis inévitables du premier cycle. Répéter autant de fois que nécessaire, vu que l’informatique, ce n’est pas le bâtiment. Et à chaque fois repasser à la caisse.
    Une source d’économies et de simplification pour l’État ?

    • Ayant bosser dans une SSII, je peux vous parler de ces projet d’état, semi-étatique dans mon cas car on avait un projet d’une « association » de recyclage (indice : vous devez avoir vu leur pub à la télé).
      Le problème de ce genre de projet est qu’il doit adapter informatiquement une ou des lois et décrets français.
      Et pour des développeurs c’est un peu un anti-exercice tant la complexité de ces lois est aberrante. Je vous jure que ça vous donne envie de pendre un sénateur à chaque ligne de code…

  • Les commentaires sont fermés.

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