Référendum sur l’écart des salaires : sacrés Suisses !

Il faut se rendre à l’évidence : les Suisses sont un peuple qui calcule. Et qui calcule bien.

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Référendum sur l’écart des salaires : sacrés Suisses !

Publié le 26 novembre 2013
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Par Fabio Rafael Fiallo.

drapeau-suisse

Il faut se rendre à l’évidence : les Suisses sont un peuple qui calcule. Et qui calcule bien. Difficile de les abuser avec des chimères mirobolantes. Quand on demande leur avis par référendum (« votation ») au sujet d’une mesure pouvant porter atteinte à leur cher modèle économique, ils refusent d’emprunter le chemin du mirage, préférant rester dans celui de la lucidité.

Il convient de rappeler l’époque où ils furent conviés à ratifier la participation de la Suisse à l’Espace Économique Européen, antichambre de l’adhésion en bonne et due forme à l’Union européenne. Ce fut en décembre 1992, pour être précis.

Que ne disait-on pas alors sur le caractère indispensable d’une telle adhésion ! Hors de l’UE, la Suisse avait tout à perdre, ne pourrait pas tenir longtemps, ce serait la mort économique assurée.

Et pourtant, malgré ce matraquage de certitudes éphémères, les Suisses ont voté non.

Rétrospectivement, ont-ils eu tort ? Personne n’oserait répondre par l’affirmative. Car la Suisse continue à figurer parmi les pays qui excellent en termes d’innovation et de compétitivité. Son taux de chômage se situe autour de 3%, l’un des plus bas au monde. Et on ne voit pas pourquoi, ni comment, elle aurait performé mieux, ou aussi bien, si d’aventure le peuple avait accepté d’adhérer à l’EEE.

Puis, quand on voit aujourd’hui où en est l’Union européenne, avec des pays qui vivent sous perfusion et d’autres qui ne cessent d’être mis à contribution, qui, en Suisse, pourrait regretter le résultat de la votation de décembre 1992 ?

Passons alors à la proposition d’allongement des congés payés de 4 à 6 semaines, objet d’une votation en mars 2012. Proposition alléchante, n’est-ce pas, que celle de travailler moins pour gagner autant. Comment n’y avait-on pas pensé plus tôt ? Certains pays voisins n’ont-ils pas des congés plus longs, avec des heures de travail par semaine en moins ? Pourquoi, alors, ne pas faire pareil ? Pourquoi ne pas s’offrir ce petit plaisir de quelques jours supplémentaires à la montagne ou à la plage, ou dans le farniente de la maison ?

Et pourtant, les Suisses, encore une fois, ont calculé. Ils ont compris que cette initiative allait à l’encontre de la compétitivité de leur économie. Que le surplus de loisirs pouvait, allait à coup sûr, se traduire à terme en pertes d’emplois, en baisse du niveau de vie. Aussi répondirent-ils par un « non merci, sans façon ».

La Suisse a également fait preuve de clairvoyance économique en adoptant en 2003 un mécanisme connu sous le nom de « frein à l’endettement » et destiné à prévenir la course à l’endettement de l’État.

En vertu de ce mécanisme, les dépenses publiques doivent être inférieures aux recettes fiscales en périodes de nette croissance, l’inverse étant permis quand la croissance se situe au-dessous de la moyenne. De sorte qu’au bout d’un cycle économique, recettes fiscales et dépenses publiques sont censées se trouver en équilibre.

Aujourd’hui, alors qu’aux États-Unis on essaie à tout va et sans succès de limiter le niveau de la dette publique, et que dans l’Union européenne bien des pays ne savent pas vers quelle formule se tourner pour sortir de la spirale infernale de l’endettement, le « frein à l’endettement » adopté par la Suisse suscite l’admiration d’analystes économiques et de décideurs politiques des deux côtés de l’Atlantique.

Même quand les Suisses se sont prononcés en faveur du plafonnement des rémunérations patronales considérées abusives (initiative Minder, approuvée en mars dernier), ils le firent sans tomber dans l’étatisme inefficace. Car cette mesure confie aux assemblées des actionnaires de chaque entreprise, et non pas aux pouvoirs publics, le soin de décider l’ampleur des rémunérations en question.

Nous arrivons ainsi à l’initiative 1:12, soumise à votation dimanche 24 novembre, laquelle avait pour but de limiter l’écart de salaires au sein de chaque entreprise à un ratio maximal de 1 à 12.

Or, voilà que les Suisses récidivent dans le délit de lucidité et répondent à cette proposition par un « non » massif et contondant. Presque deux tiers de votants, et tous les cantons sans exception, ont rejeté la motion.

Les Suisses se sont-ils prononcés de la sorte par une quelconque aliénation mentale envers leurs patrons ? Non. C’est pour pouvoir continuer à accueillir et à garder des entreprises compétitives et innovantes, pour éviter les délocalisations, pour préserver le bien-être de la population en somme, qu’ils ont porté un désaveu cinglant à cette idée insensée.

Les promoteurs de l’initiative 1:12, eux, se contentent aujourd’hui comme ils peuvent, prétendant que, au moins, leur motion aura servi à réactiver le débat sur les inégalités salariales. Piètre consolation, car ce débat existe en Suisse depuis belle lurette, depuis toujours en fait.

À vrai dire, les promoteurs en question ont intérêt à porter leur bonne parole ailleurs, auprès de gouvernants qui proclament haut et fort ne pas aimer les riches. Là, leur idée géniale pourrait peut-être prospérer. Mais en tout cas pas en Helvétie.

Voir les commentaires (17)

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  • Mais ils sont fous ces Suisses,ils ont un paradis à leur frontière prêt à leur faire profiter de son bien être égalitaire,et ils vont laisser des patrons se gaver sur le dos des pauvres employés?Envoyons leur Picketti et Karine Berger pour les remettre à la raison

  • Il faut souligner que le résultat des votations désigne les cantons romands, frontaliers avec la France, comme les plus socialistes. Sans le vote de la partie alémanique, la Suisse ferait maintenant partie de l’Europe. Les frontières sont perméables à l’idéologie, les politiques socialistes et les médias romands Suisses tirent bien souvent leur inspiration en France. La ville de Lausanne est dirigée par une municipalité rose et verte, c’est la ville la plus endettée de Suisse, CHF 18 000 par habitant, y compris les enfants. L’idéologie Française est contagieuse.

    • merci pour cette information
      avez vous des sources sur ces chiffres? j’aimerai les envoyer à un ami français qui habite Lausanne…

    • les français travailleurs frontaliers sont par symétrie plus libéraux que les français pris dans leur ensemble. l’idéologie va dans les deux sens.
      un seul exemple : actuellement, 90 % des frontaliers ont leur assurance privée en France, 5 % en suisse et 5 % à la sécu en France. bientôt, en juin 2014, les assurances privées vont être supprimées au profit de la cmu, les frontaliers sont en train de lutter contre ça, même si c’est perdu d’avance.
      et bien le résultat des courses, et nous le verrons dans 1 an ou 2, quantités de frontaliers préfèreront payer une assurance maladie privée de leur choix en suisse plutôt que la sécu étatique en France.

    • Continuum:  » les cantons romands, frontaliers avec la France, comme les plus socialistes. »

      Ce sont aussi les plus endettés et ceux qui ont les plus haut taux de chômage.

    • La langue française, celle de Frédéric Bastiat, est hélas devenue un vecteur de socialisme à travers le monde: Le Québec aussi se caractérise par un État plus socialiste que les autres.
      Avec les mêmes résultats : Productivité 20% sous la moyenne du Canada (dont le Québec constitue plus de 20% ! ), budget déficitaire …
      Comme en Suisse, on y voit les francophones mépriser leurs compatriotes pourtant plus développés qu’eux.

      Il faut absolument renverser l’oligarchie socialiste enkystée dans les organes de pouvoir parisien et qui empoisonne notre culture.

      Cela passe par le démocratie directe, en France aussi.
      Un système purement représentatif sera toujours perverti par l’oligarchie en place, et l’oligarchie sera toujours socialiste, car le pouvoir attire les mentalités socialiste mais répugne aux mentalités libérales.

    • Je me demande dans quelle mesure cette perméabilité au socialisme n’est pas grandement due au fait que les suisses francophones regardent volontiers les chaines de télévision françaises (qui, comme le reste de la presse de ce côté ci de la frontière, sont totalement acquises aux thèses socialo-communistes).

      Si j’étais paranoïaque, j’irais même jusqu’à imaginer que les reportages bucoliques des journaux de 13h et de 20h sur les petits artisans, artistes, clubs de boules (rayer la mention inutile) du Doubs ou de la Charente-Maritime, ne sont en fait qu’une habile manipulation destinée à montrer aux étrangers qui regardent le journal à quel point il fait bon vivre en France (en plus de permettre de ne pas parler des vrais problèmes).

      Ce n’est pas sans raison que l’ex Allemagne de l’Est utilisait un système de codage des programmes (SECAM-?) différent du système utilisé en Allemagne de l’Ouest (PAL)…

  •  » Car cette mesure confie aux assemblées des actionnaires de chaque entreprise, et non pas aux pouvoirs publics, le soin de décider l’ampleur des rémunérations en question.  »

    Non l’initiative Minder ne confie pas elle oblige aux actionnaires ce qui n’est pas pareil. Les actionnaires n’ont plus la liberté de délégué la fixation des rémunération des PDG au conseil d’administration si ils désirent de la faire. Cette initiative interdit aussi les bonus et primes de bienvenue. Donc c’est une loi liberticide contraire à l’esprit libéral sur la responsabilité individuelle des propriétaire d’entreprise et de disposer librement de ses propres revenu. De plus Minder est un faux-cul avec son initiative. Il a pondu une loi qui ne concerne que les entreprise cotées en bourse. la sienne ne l’étant pas il n’est en rien concerné par son initiative. Il peut appliqué à lui-même ce qu’il a interdit aux autres. Et il se prétend lui-même un libéral.

    Encore heureux que 1:12 n’a pas passé.

    D.J

    • Nous avons eu de vastes discussions à ce sujet 😉 pour ma part l’initiative Minder est très bien, et met les actionnaire en face de leurs responsabilités.

    • Pardon, mais la détermination de la rémunération des dirigeants, est une disposition d’ORDRE PUBLIC, les actionnaires n’ont PAS le choix en la matière, combien même ils voteraient dans ce sens, le vote serait nul.
      En France Article L225-47
      Dans une SA à directoire, c’est le conseil de surveillance qui décide des rémunérations.

      Ensuite la question ne peu pas se poser en ces termes, puisqu’actionnaires et dirigeants sont de toute façon irresponsables sur leur patrimoine. Ils n’ont qu’une légitimité discutables à décider des affaires de la société concernée.

      Ce sont des structures sans responsables ni propriétaires. ne venez pas nous parler de liberalisme.

  • Les entreprises allaient fuir la suisse a la vitesse d’une impulsion électrique dans un réseau informatique…

  • Non Montabert. Dans l’esprit libéral la responsabilité pour des propriétaires d’une entreprise ce n’et pas une attitude qui doit être imposée par l’état. Etre face à responsabilité c’est d’assumer ses choix et ses décisions en d’en assumer les conséquences quand ses choix son mauvais sans en attendre que l’état soit derrière pour vous sauver les miches.

    Les actionnaires avec la loi Minder ne sont plus libre en tant que propriétaire de leur entreprise de décider de par leur libre arbitre la façon dont sont décidés les rémunération des PDG. Et les actionnaires se voient également interdit d’utiliser librement les propres revenus de leur entreprise pour attribuer des primes et des bonus . C’est clairement une loi liberticide contre le respect à la propriété privée et à la liberté de disposer librement de ses revenus.

    Et surtout comme je l’ai dit; Minder c’est bien gardé de pondre une loi qui ne concerne pas son entreprise en pouvant continuer à faire ce qu’il a interdit aux autres. Minder n’est qu’un pauvre type jaloux qui ne supporte pas que d’autre réussissent à gagner plus que lui et qui va jusqu’à voter des lois à des fins idéologiques personnels. Il ne vaut pas mieux que les gauchistes.

    D.J

    • En droit, les actionnaires ne sont NI propriétaires de la société NI responsables de ses dettes. Ils sont juste propriétaire des valeurs mobiliaires (actions, obligations..), c’est la personne morale qui est propriétaire.

      Sur la rémunération, vous dites une bêtise, voir ma réponse juste au dessus.

      La proposition Mider est clairement une amelioration, ou plutot un demi patch nécessaire dans un monde ou la responsabilité est detruite. Et il a raison de viser les societes cotées à risque limité, c’est là ou le probléme est le plus grave.
      Les sociétés à risque limité et en particulier les SA sont un privilége est devraient être interdites, ou au moins castrées en matiere de risques.
      Seul la commandite par action est legitime, les dirigeants sont entiérement responsables de la dette sur leur patrimoine.

      Dans les petites societes, les patrons sont souvent caution sur leurs patrimoine personnel.

  • À propos du 1:12, si je ne suis pas d’accord avec l’avis de Myret Zaki sur les limitations de salaires, je partage à 100% ce qu’elle dit sur la notion de responsabilité qui n’est absolument pas appliquée dans notre monde économique actuel. (à partir de 5:45 ainsi que 11:40)

  • Les commentaires sont fermés.

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