Le Parlement européen s’en prend à la liberté d’expression

Il n’y a pas de raison d’être tolérant avec les intolérants : les parlementaires européens débattent des limites de la liberté d’expression.

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Le Parlement européen s’en prend à la liberté d’expression

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 5 novembre 2013
- A +

Par Daniel Hannan, depuis Oxford, Royaume Uni.

liberté d'expressionJetez un œil à ce document récemment discuté par la Commission des libertés civiles du parlement européen. C’est un bon exemple de la façon dont des gens pétris de bonnes intentions convaincus qu’ils défendent les opprimés peuvent au final causer des dégâts énormes à la liberté, à l’égalité devant la loi et, de façon perverse, aux minorités au nom desquelles ils prétendent s’exprimer.

Le projet de loi pour la promotion de la tolérance couvre l’ensemble des desiderata gauchistes habituels : la diffamation à l’encontre d’un groupe, les crimes haineux etc. Ce projet soutient, sans moindre trace d’ironie ou prise de conscience, la tolérance légale. Cette tolérance n’est cependant pas pour tous :

Il n’y a pas de raison d’être tolérant avec les intolérants. C’est tout particulièrement important lorsque l’on parle de la liberté d’expression. Cette liberté ne doit pas être utilisée pour diffamer d’autres groupes.

On trouve un grand nombre de ces affirmations amusantes chez les bien-pensants du net : « ne donnez pas de tribune aux bigots », « pas de liberté pour les ennemis de la liberté », « je refuse de lire votre journal, il est bien trop rempli de préjugés. » Il est difficile de leur faire une meilleure réponse que celle de ce blogueur Torontois qui, s’adressant à  la Commission canadienne des droits de l’homme, lui disait : « Vous êtes trop stupide pour me dire ce que je dois penser. »

Autrefois, cette réponse serait venue naturellement aux lèvres de la plupart des Canadiens et de la plupart des Britanniques d’ailleurs. Le monde anglo-saxon se caractérisait traditionnellement par une focalisation particulière sur l’individualisme : la primauté du droit de propriété sur la raison d’État, de la liberté individuelle sur les besoins collectifs et du libre débat sur le conformisme idéologique. Quand d’autres pays sombraient dans la dictature ou la révolution, les nôtres demeuraient des démocraties soumises à la loi ; quand d’autres pays soutenaient le fascisme ou le communisme, le monde anglo-saxon n’élisait aucun député fasciste et jamais plus qu’une poignée de trotskistes. Le collectivisme n’est pas notre truc.

C’est donc peut-être naturellement que les Britanniques, davantage que la plupart des autres membres de l’UE, devraient rester méfiant à l’égard de la montée des droits collectifs. Si l’on commence à définir les individus comme étant membres d’un groupe racial ou d’une minorité religieuse, alors tôt ou tard, on finira par les traiter différemment. L’Europe ne devrait pas souhaiter emprunter cette route.


Sur le web. Traduction : Tramp/Contrepoints.

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  • « Il n’y a pas de raison d’être tolérant avec les intolérants. »

    Cette affirmation se retourne elle-même contre celui qui la prononce.

  • On réduit les gens à des « groupes », pour mieux les flinguer.

    • Golum

      « On réduit les gens à des « groupes », pour mieux les flinguer. »

      Alors que c’est pas du tout les façons de faire de certains (voir beaucoup) de libéraux qu’on croise ici 😉

  • Le nouveau racisme d’état ne concerne pas l’ethnie. Il discrimine et stigmatise certaines personnes selon des critères d’appartenance à un mouvement de pensée. Il est évident que ceux que l’État montre du doigt comme étant les « conservateurs » ou tous ceux qui ne rentrent pas dans le moule du politiquement correct seront victimes du racisme de l’état à leur encontre.

    L’état crée donc des catégories de personnes qui, du fait de leur croyances, n’ont pas les mêmes droits que ceux qui acceptent d’être dans la « norme ».

  • La liberté d’expression et d’opinion ne peut et ne doit qu’être totale, sous peine d’être vidée de son sens. Ceux qui disent : « je suis pour la liberté d’expression sauf en cas de ceci ou cela » sont comme ceux qui disent « je suis contre la peine de mort, sauf dans tel ou tel cas », car cela signifie qu’ils ne sont pas pour la liberté d’expression en tant que telle parce qu’ils pensent que c’est une liberté qui doit être défendue pour elle-même, mais qu’ils sont favorables à la liberté d’expression uniquement si les propos tenus ne les choquent pas trop. Or il est clair qu’avec une telle conception, n’importe quel groupe peut faire varier sa conception de ce qui est permis de dire ou non pour réduire la liberté. Tous les censeurs, inquisiteurs, dictateurs ont toujours eu des motifs pour interdire telle ou telle opinion. Beaucoup de films, livres ou propos qui étaient condamnés il y a des années en France paraissent aujourd’hui bien innocents. Pourtant, ils semblaient scandaleux à l’époque, et les censeurs étaient tout à fait aptes à nous expliquer pourquoi. A l’inverse, des propos qu’il était permis de dire autrefois ne le sont plus désormais. Mais qui peut dire que les motifs exposés aujourd’hui pour interdire telle ou telle opinion sont plus justes que ceux utilisés il y a des années pour en interdire d’autres ? Ne pourraient-ils pas relever, comme les interdits autrefois, de simples tabous dont la transgression n’entraînerait aucun danger ?

    L’hypocrisie actuelle fait que personne n’ose ouvertement remettre en cause les libertés, mais que tout le monde le fait allègrement par des moyens détournés et en usant de sophismes. « Tels propos dépassent les limites de la liberté d’expression. » répètent en cœur les perroquets du politiquement correct. Ils se méprennent très profondément sur la signification d’une telle liberté. Car, et c’est là un concept fondamental qui leur échappe malheureusement complètement, le principe de la liberté d’expression n’a pas été fait, comme ils le pensent, pour séparer les bonnes opinions des mauvaises ou pour tirer une ligne jaune entre ce qui doit être permis de dire ou pas, mais au contraire pour garantir que chacun, au nom de la liberté et de l’égalité de droits, puisse communiquer ses opinions sans être arbitrairement menacé ou entravé. Cela ne veut pas dire que la société dans son ensemble valide forcément toutes les opinions prononcées, mais qu’elle accepte leur libre expression comme une règle de base du jeu démocratique, en laissant ensuite, par le jeu des débats entre les différents membres de la société, de sélectionner les meilleures idées et de disqualifier les mauvaises.

    C’est un peu comme le principe judiciaire : « tout accusé à le droit à un avocat », ce principe n’est valable que s’il est appliqué inconditionnellement. Il n’est pas destiné à dire qu’il y aurait des personnes qui mériteraient d’être défendues et d’autres non ; il ne veut pas dire qu’en autorisant le pire criminel à avoir un avocat, on accrédite l’idée que ce qu’il a fait n’est pas si grave ; non, c’est simplement un principe qui permet que tous les accusés, tels qu’ils soient, soient traités équitablement. Même chose pour la liberté d’expression : autoriser tous les propos, même ceux considérés comme étant les pires, ne veut pas dire que la société dans son ensemble les reprend à son compte ou les valide, mais simplement qu’elle permet leur libre expression car il s’agit là d’une liberté fondamentale dont la simple remise en cause pourrait entraîner des réactions en chaîne liberticides (si on interdit tel propos pourquoi pas tel autre, etc.)

  • Oui. Ce qui doit déranger le plus les libéraux, c’est le communautarisme.
    Ce sont donc des anti-communautaristes.
    On n’est pas sorti de l’auberge.

  • Liberté totale ? Contrepoints peut-il devenir un espace de liberté totale ?

    • Pas d’avis sur une site de défenseurs des libertés ?
      C’est regrettable pour un sujet qui vaut bien ceux concernant la fiscalité !

  • Ce qui est toujours remarquable chez les anglais, c’est cette humilité remarquable et exemplaire. Exemplaire, oui voilà le mot préféré des britanniques au sein de l’Europe. Ce qui est gênant dans l’UE, finalement, c’est qu’elle ne se réalise pas exclusivement sur le modèle britannique.
    J’attends avec impatience l’article qui expliquera pourquoi l’ensemble des pays de UE doivent rouler à gauche 😀

  • à force de ne plus pouvoir appeler un chat, un chat, je prends les devants et la résolution (ah, le beau zeugma) de bannir certaine racine douteuse de mon vocabulaire. Je fais fiance aux idéologues patentés pour nous cocter sous peu de nouvelles signes visant à rester toujours venables en tout, et ne fâcher jpersonne. bravo à Trepoints à vous aussi, je seille la prudence. Pour ne pas être damné?

  • Les commentaires sont fermés.

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