Pour une Afrique émergente : passer des déclarations à l’action

Les opportunités de développement pour l’Afrique peuvent devenir des réalités, à condition de les saisir.

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Pour une Afrique émergente : passer des déclarations à l’action

Publié le 20 juillet 2013
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Les opportunités de développement pour l’Afrique peuvent devenir des réalités, à condition de les saisir.

Par Jean-Michel Lavoizard(*).

Un article d’Audace Institut Afrique.

Le New York Forum Africa (NYFA) qui s’est tenu mi-juin à Libreville (Gabon) a permis de débattre des conditions dans lesquelles les opportunités de développement qui s’offrent au continent africain peuvent devenir des réalités.

Cependant, malgré les enjeux et les défis que révèlent des perspectives vertigineuses et des opportunités inédites pour le continent africain, un écart important demeure entre les déclarations des décideurs et les réalisations concrètes. D’un côté, des déclarations d’intention rassurantes et pleines de promesses, d’un autre côté une mise en œuvre des programmes laborieuse, avec des risques et des obstacles qui rendent les observateurs lucides circonspects, et les investisseurs hésitants.

Or, l’avancée du continent sur la voie de l’émergence ne résultera pas du seul effet de belles paroles ni d’annulations de dettes ou de dons incontrôlés, sans réelle création de richesse au travers de l’économie réelle, qui nécessite de se mettre à niveau et au travail.

On dit d’une époque qu’elle est révolue quand ses illusions sont épuisées, réalisées ou abandonnées. Dans l’Afrique d’aujourd’hui tout est dit et beaucoup, pour ne pas dire tout, reste à faire car les déclarations sont nécessaires sans être suffisantes et le moment de latence, de suspension aux paroles et aux promesses, ne peut durer sous peine de s’effondrer sur lui-même, de décourager et de provoquer des réactions désespérées, à la mesure des espérances suscitées et des illusions créées. Il suffit d’écouter les appels de la rue et les revendications des laissés pour compte qui organisent des contre-forums pour dénoncer les dépenses somptuaires et exiger des résultats concrets et immédiats, appels frondeurs d’un mouvement croissant  d’indignés  qui, à l’image de mouvements  populaires européens et à la faveur des capacités modernes de mobilisation, grondent de plus en plus fort, marée humaine en devenir.

Comme l’a dit un leader entrepreneur occidental au cours du NYFA, dans la vie il y a ceux qui considèrent les choses comme elles sont en se demandant pourquoi, et ceux qui considèrent ce qu’elles devraient être en se disant pourquoi pas. Pour cela, il convient d’engager un processus pragmatique et concret de réalisations aux trois niveaux pertinents que sont le pays, la région et le continent, par lesquelles l’Afrique se définit en se construisant, au sens propre comme au figuré. Sans tabou ni restriction, en s’inspirant de recettes qui ont fait leurs preuves dans un monde désormais globalisé puisque le monde entier est à la porte de l’Afrique et que l’Afrique s’ouvre au reste du monde, tout en puisant dans les référentiels africains pour préserver une identité commune.

Entre tradition et modernité, dans une optique d’utilitarisme moral et dans un environnement libéral justement régulé, la méthode « des petits pas » est utile et efficace sur le long terme : start small, think big. Ce mode de construction additive doit combiner la double approche par le haut, politique et institutionnelle, et par la base, économique et sociétale. Chacun à son niveau et dans son domaine d’excellence, peut y prendre part au quotidien et apporter sa pierre, par des réalisations concrètes qui concilient l’intérêt général et les intérêts particuliers.

De vastes chantiers doivent donc démarrer dès maintenant, en autonomie et au sein de partenariats maîtrisés, avec des objectifs concrets à court, moyen et long termes. Il s’agit de faire coïncider la vision ambitieuse et lucide exprimée par « l’Afrique d’en haut », citadins aisés qui animent les innombrables conférences, colloques et forums généralistes ou spécialisés qui foisonnent dans les capitales africaines et à l’international, avec « l’Afrique d’en bas », immense majorité dont beaucoup d’Africains privilégiés et expatriés sont coupés des réalités quotidiennes, qu’ils observent depuis les vitres fumées de leurs véhicules de luxe, les classes affaires des avions et les salons des grands hôtels. Or, c’est de cette base encore silencieuse qu’est en train d’émerger la classe moyenne qui accède progressivement à un pouvoir d’achat limité au plan individuel mais en si grand nombre, énorme levier de développement. Tous ces gens de mieux en mieux informés ne se contenteront plus longtemps de discours creux et ne se paieront plus de mots si une suite concrète ne leur est pas donnée rapidement.

Il conviendrait également de réfléchir sérieusement à l’impérieuse nécessité de disposer d’informations fiables, actualisées et contextualisées pour que l’évaluation et la mise en œuvre de toutes ces pistes de développement ne reposent pas sur une image tronquée et une interprétation faussée de la réalité. Si l’on parle beaucoup d’infrastructures de communication, d’accès à la connaissance et de contenants, nécessaires tuyaux de circulation de l’information et d’accès à la connaissance, on parle peu de la qualité non moins nécessaire de leur contenu. Tant de brillantes études et statistiques réalisées par des cabinets internationaux reposent sur de l’information fausse, incomplète ou obsolète car provenant de canaux ouverts ou officiels d’information, alors que l’information déclarée, quand elle est disponible, n’est ni obtenue ni exploitée de façon sérieuse.

Or, comment prendre une décision responsable et raisonnable à caractère économique ou financier quand on ne dispose pas d’informations fiables ? A quoi sert de se perfectionner dans les techniques opérationnelles et de management si l’on n’intègre pas la bonne information dans les processus d’élaboration de la décision, sans pouvoir évaluer correctement les opportunités ainsi que les risques associés et si l’on ne peut défendre ses intérêts par des preuves et des informations vérifiées ? Beaucoup reste à faire pour combler les carences en éducation et en formation aux métiers de l’information, ainsi qu’à leur exploitation et à leur utilisation par les décideurs.

Pour illustration concrète et parlante, une étude réalisée par un cabinet européen, intitulée « The New York Forum – Modern Africa in numbers », qui fournit des éléments chiffrés et analytiques en appui du New York Forum Africa. Le cabinet en question a eu l’honnêteté et la prudence d’indiquer à la fin du document la mention légale suivante : « Although we make every attempt to obtain information from sources that we believe reliable, we do not guarantee its accuracy, completeness or fairness. Unless we have good reason not to do so, we assume without independent verification, the accuracy of all information available from official public sources…”.Tout est dit, or l’expérience montre que se fier à la bonne foi de sources ouvertes et déclarées ne suffit pas. On mesure l’importance des enjeux et les risques que les discours et les décisions reposent sur cette base.

Les métiers de l’Intelligence économique y préparent, de la veille au conseil en passant par la recherche de terrain et l’analyse approfondie d’informations. Ils apportent une réponse adaptée à ce formidable défi pour combler au plus vite le gap informationnel, tout en constituant des métiers d’avenir stimulants. La prochaine édition du New York Forum Africa aurait avantage à intégrer la maîtrise de l’information dans les panels de discussion. Elle est l’une des conditions pour que les opportunités se transforment en réalités.

(*)Jean-Michel Lavoizard est directeur Général de la compagnie ARIS-Intelligence et analyste pour Audace Institut Afrique

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