Le régime de l’auto-entrepreneur en danger

Le régime de l’auto-entreprise vacille sous les coups du gouvernement Ayrault et de son budget 2013.

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Le régime de l’auto-entrepreneur en danger

Publié le 18 avril 2013
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Le régime de l’auto-entreprise vacille sous les coups du gouvernement Ayrault et de son budget 2013.

Par Julien Tardy [*]

Lors du salon des entrepreneurs en février dernier Fleur Pellerin a déclaré : « jeunes entrepreneurs, lancez-vous ! »

Vous êtes jeune, vous n’avez jamais tenté l’aventure entrepreneuriale, vous vous dites que l’entreprise est un univers risqué, complexe, soumis à de lourdes pressions fiscales et vous n’avez sans doute pas tort…

Néanmoins, vous savez qu’un régime existe justement pour faciliter l’accès à l’entreprise. Ce régime c’est celui de l’auto-entrepreneur. Créé en 2008, au cœur de la crise, grâce à une loi de modernisation de l’économie il était – par sa simplicité – destiné au succès. Aujourd’hui on compte quelques 900 000 auto-entrepreneurs en France (chiffre à comparer aux 3,4 millions d’entreprises qui existent en France dont 2,2 millions n’ont pas de salariés). À chaque vague de chômage, le régime accueille de nouveaux entrepreneurs qui choisissent ce statut pour continuer à exercer leurs compétences dans le cadre d’une activité professionnelle. En janvier 2013, alors que les chiffres du chômage atteignaient (presque) le record de 1997, on aurait compté +25% de création d’entreprises et +4,9% hors régime d’auto-entrepreneur… La démonstration est faite, l’auto-entreprise est un moyen de garder le cap et de rester actif. Bien entendu ce régime bénéficie de certains avantages fiscaux avec une imposition forfaitaire moindre et une simplification administrative. Mais qui peut croire qu’une fois la réussite au pas de la porte l’entrepreneur conserve ce statut qui n’offre pas la possibilité de développer son chiffre d’affaires, de cotiser correctement pour sa retraite ou tout simplement d’embaucher du personnel ? Une auto entreprise sur cinq parvient d’ailleurs à évoluer dans son statut après quelques années d’activité.

Certes, un auto-entrepreneur sur deux a du mal à générer du chiffre d’affaires mais cela fait partie des lois des affaires, on ne peut pas toujours réussir et c’est justement les échecs qui nous apprennent à avancer, recommencer, réussir ou retrouver un emploi salarié.

Pourtant, le monde de l’entreprise est dans le collimateur du gouvernement qui y voit des rentrées fiscales potentielles, et pire, des niches fiscales. Oui, pour le gouvernement Ayrault, dans le budget 2013, le régime de l’auto-entreprise est une niche fiscale qui pourrait, si on la corrige, rapporter 130 millions d’euros.

Que reproche-t-on à ce régime ? Il est propre à dérégulariser, déstabiliser le marché ? En permettant à des jeunes ou des retraités de se lancer dans l’entreprise. Il concurrence l’artisanat à cause de la différence de charges et de TVA ? Mais ne fait-il pas non plus concurrence au travail non déclaré ? Les auto-entrepreneurs ne dégagent pas assez de revenus ? Quelle condescendance – toute française – pour celui qui n’a pas réussi ! Qui a dit que l’aventure entrepreneuriale devait être couronnée de succès dans 100% des cas ? Combien de bateaux de marchandises vénitiens ne sont pas revenus à bon port à l’aube du capitalisme marchand, combien d’entrepreneurs ont raté avant de repartir du bon pied ? Il est vrai qu’il n’y a pas de risque à administrer, sinon celui de se tromper !

Les réflexions sur budget 2013 préconisaient il y a quelques mois un « alignement » du régime de cotisation sociale sur celui des travailleurs indépendants.

La FEDAE, Fédération des auto-entrepreneurs avait réagi et lancé une pétition dès octobre 2013 contre ce projet en déclarant :

« Pour le ministère de l’Emploi et du travail, ceci représenterait une économie de 130 millions d’euros, si l’on en croit le projet de loi de finances pour 2013 » et Grégoire Leclercq et Cyrille Darrigade, respectivement président et Vice-Président de la FEDAE d’ajouter : « Le régime sera tué car le mode de calcul des cotisations sociales sera forfaitaire et remet en cause le pilier fondateur du régime qui prévoyait une exonération de charges en l’absence de chiffres d’affaires. La réforme n’améliorera pas la protection sociale des bénéficiaires du régime dans la mesure où cette protection était déjà identique à celle des autres travailleurs indépendants. »

Aujourd’hui, puisqu’il faut bien faire quelque chose, à tout prix, l’idée avancée le 11 avril dernier par Sylvia Pinel, Ministre chargée de l’Artisanat serait de « limiter dans le temps ce régime en activité principale et renforcer l’accompagnement des auto-entrepreneurs ». Et pourtant, un audit élaboré par l’inspection générale des finances à la demande du gouvernement préconisait de « ne pas limiter dans la durée le bénéfice du régime »…

Le site internet Freelancer.com, qui représente la plus grande plate-forme d’outsourcing1 de mise en relation professionnelle au monde avec plus de 7 millions d’utilisateurs dont 24 700 en France voudrait apporter sa contribution à la réflexion actuelle. L’aventure entrepreneuriale est un élément clé de la réussite de notre économie dans son ensemble et dans le développement professionnel individuel. Les codes du travail ont changé, la crise met à mal le modèle classique non pas de l’emploi à vie qui est déjà loin derrière nous, mais de l’emploi à durée indéterminée (CDI -10 % en 2012). Le fait de se lancer dans le marché et proposer ses services à titre individuel ou avec une petite entreprise est doublement pertinent. D’une part parce que la situation économique l’impose (chômage, manque de débouchés locaux etc.) et d’autre part, parce qu’aujourd’hui l’individu souhaite mieux contrôler sa vie et sa carrière. Bon nombre de nouveaux entrepreneurs jouent la carte du freelancing, du télétravail et de l’épanouissement professionnel dans l’auto-entreprise. C’est un fait, il serait dommage de leur couper l’herbe sous le pied.

Alors, de mon point de vue, à quoi sert ce régime allégé de l’auto-entreprise ? À essayer, tout simplement.


[*] Julien Tardy est Directeur France de Freelancer.com.

Note :

  1. externalisation.
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  • La « Fleur Pellerin » (nom poétique ; compétence = zéro) jargonne comme tant d’autres gauchistes
    SANS percevoir ce que signifie « se lancer » lorsque l’environnement politico-administratif est truffé de lourdeurs, d’entraves, d’incertitudes !
    Au départ d’une IDEE et d’une réflexion stratégique, plus de PLANS financiers & opérationnels, comment l’entrepreneur peut-il assumer tous les risques ? J’en sais par l’expérience ; mon fils vient d’oser … en dépit de tous les écueils de création vécus durant une année de maturation de l’IDEE, de plans et re-plans (4 versions successives, assorties de leurs % probabilistes )?
    Combats-négociations avec des banques refusant le risque de « crédits douteux », sinon assortis de garanties familiales !
    Ah oui, s’en remettre au fatras et arcanes des aides/interventions publiques ?
    Autant dire que c’est transformer l’entreprise naissante en un croupion d’administrations surabondantes !
    Fils-dirigeant, wow ! Malgré tout le projet aboutit. Passons aux embauches de personnel ? Profils et compétences définies au gré de l’entrepreneur … ou subordination aux bons vouloirs de N règles de législation du travail, de candidats aux motivations et compétences douteuses, etc… Une chance encore qu’à ce stade il ne faille pas dépendre des contraintes syndicales (mais le vers est dans les esprits embauchés!).

    Au total : exaltant + faut oser face à tous les obstacles + payer de sa personne. Et ça, la « Fleur Pellerin » n’y sera pour RIEN = transparente !

  • Le gouvernement oublie que le régime de l’auto-entrepreneur est une formidable machine à légaliser du noir. Il permet aux gens qui ont une petite activité de faire des factures, d’être ainsi dans la loi, pour une taxation forfaitaire faible.
    Augmenter les taux rejettera ces activités dans le noir, et l’Etat n’en touchera plus un centime. Résultat des courses : forte réduction de l’assiette d’imposition et donc baisse des rentrées. C’est l’effet Laffer, connu depuis 40 ans.

  • ce gouvernement oublie aussi que la france , sans le statut AE , auraient quelques milliers de demandeur d’emploi en plus , sans parler de ceux qui seraient au rsa ;ce serait mon cas si je n’étais pas rentré dans ce statut en 2009 ; j’ai 50 ans passé , et même si mes revenus sont petits , ils me permettent de ne rien quémander à l’état ; encore que des fois , je me demande si les abrutis qui nous gouvernent , ne préfèrent pas avoir des chomeurs au rsa ……en tout cas , ils ne crachent pas sur l’argent que rapporte les AE , n’est ce pas ? quand je pense que ces politiques n’auraient même pas le courage de se lancer dans quoi que ce soit et qu’ils osent nous pomper l’air avec leurs tristes idées , quel bande de gland !!!

  • et puis je vais lui dire moi à la pellerin , je veux bien rester honnête et payer mes charges comme tout un chacun , mais si elle alourdit financièrement ce statut , il est évident que je paierai d’abord mon loyer et tout ce qui va avec , je fera des réserves de bouffes pour 1 mois , j’achèterai tout ce dont j’ai un réel besoin , et s’il reste de l’argent je paierai mes charges ;moi d’abord , eux aprés ;

  • Pour nos gouvernants ce n’est qu’un moyen de fabriquer des pauvres! Après l’EN qui elle fabrique des crétins.

  • La destruction de l’une des meilleures idee de Sarko avait déjà commencé sous son règne… Sous les attaques des artisans … Visiblement aussi friand des monopoles et rentes de situations que les plus risibles des syndicats de fonctionnaires…
    Hollande ne fait qu’achever une belle idée complexifiée année après années…
    Accuser hollande c’est de la mauvaise fois….

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Les auteurs : Miruna Radu-Lefebvre est Professeur en Entrepreneuriat à Audencia. Raina Homai est Research Analyst à Audencia.

 

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