Ce que cache le crédit impôt

L’usage du mot crédit nous en apprend beaucoup sur la façon dont nos technocrates perçoivent le monde et les relations qui les unissent à ceux qu’ils gouvernent.

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Ce que cache le crédit impôt

Publié le 10 décembre 2012
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L’usage du mot crédit nous en apprend beaucoup sur la façon dont nos technocrates perçoivent le monde et les relations qui les unissent à ceux qu’ils gouvernent.

Par l’auteur du site Bobo libéral.

La nouvelle arme que le gouvernement a brandi pour combattre le chômage et relever la compétitivité des entreprises a pour nom « crédit d’impôt« . Son application est complexe et pour les plus courageux wikipedia vous en détaillera le fonctionnement. Peu importe, la mesure consiste à diminuer les charges qui pèsent sur les entreprises. C’est une baisse des impôts. Et un libéral devrait s’en réjouir.

Mais ce qui est inquiétant n’est pas la mesure en elle-même, positive, mais le vocable utilisé, crédit, dont un simple examen suffit à révéler des implications d’ordre philosophique et éthique. L’État ferait crédit aux entreprises. Si l’on se réfère à la définition originale du mot crédit, l’État prêterait-il de l’argent aux entreprises ? Évidemment que non. L’État prend moins d’argent aux entreprises. Mais selon ce point de vue original, ce qu’il leur prend en moins, il leur ferait crédit. Un peu comme si cet argent n’appartenait pas à ses propriétaires légitimes, mais fut donné par l’État.

Il ne faut pas oublier que l’impôt est une appropriation par la force du bien d’autrui.

Et si l’on s’amusait à généraliser ce principe jusqu’à ses ultimes retranchement, l’État ferait crédit de tout ce que l’entreprise ne paye pas en impôt. Dans cette optique l’entreprise ne serait pas le propriétaire légitime de ses biens. Ce qu’elle dispose n’est que dû à la bonne volonté de l’État. Ce principe est même applicable au particulier. Ce qu’il ne paye pas en impôt lui a été donné ou crédité par l’État.

En fait l’État serait l’unique propriétaire de tous les biens du territoire dont il aurait la charge. C’est l’abolition pure et simple de la propriété privée, en théorie.

Alors qu’auparavant on considérait l’impôt comme une arme dangereuse, pour certains un mal nécessaire, violant le droit de propriété privée consacrée par notre déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, aujourd’hui la totalité de ce que l’on posséderait serait de facto et en toute circonstance imposé, dont une partie par la bénévolence de l’État nous serait crédité. Et d’ailleurs un crédit implique un remboursement avec intérêt. Imaginez tout ce que l’on doit à l’État !

Mon propos est à dessein exagéré. Je doute que le gouvernement actuel soit dans une quête marxiste d’appropriation et de collectivisation de tous les biens de ce pays, en témoigne les déclaration d’Ayrault lors du débat sur la possible nationalisation de Florange dont il qualifia le procédé d’expropriation. Mais l’usage du mot crédit nous en apprend beaucoup sur la façon dont nos technocrates perçoivent le monde et les relations qui les unissent à ceux qu’ils gouvernent : nous leur sommes à jamais débiteur de tout ce que nous faisons et de tout ce que nous possédons.

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  • En fiscalité tout du moins celle concernant les particuliers, on distingue le crédit d’impôt de la réduction d’impôt.
    Une réduction d’impôt vient se soustraire du montant total de l’impôt , jusqu’à potentiellement l’annuler, mais pas plus.
    Un crédit d’impôt est indépendant de l’impôt. Une personne qui aurait 0 euros d’impôt se verrait ainsi crédité du montant du crédit d’impôt.

    Le crédit d’impôt est en fait une subvention directe, mais qui utilise le canal de l’imposition.

    Sur la question sémantique, il faut comprendre crédit dans son sens comptable, crédit/débit, pas au sens d’un prêt.

    • Vincent Poncet : « Sur la question sémantique, il faut comprendre crédit dans son sens comptable, crédit/débit, pas au sens d’un prêt. »

      Tout à fait, mais une multitude de crétins le prennent au pied de la lettre :

      « Encor un cadeau au riche avec notre argent !!1! »

      • Ilmryn: « Tout à fait, mais une multitude de crétins le prennent au pied de la lettre
        « Encor un cadeau au riche avec notre argent !!1! » »
        ————————————–
        C’est pas entièrement faux, vu qu’avec un « crédit d’impôt », le fisc peut même vous reverser de l’argent si ce crédit excède vos impôts, ce qui n’est pas possible avec une « réduction d’impôt » (vous pouvez payer zéro impôt et embaucher une femme de ménage, grâce au crédit d’impôt, l’Etat vous paiera la moitié de son salaire !).

        Avec l’usine à gaz fiscale, l’optimisation fiscale fait parfois des merveilles mais ça suppose le plus souvent de faire appel à un conseiller, accessible seulement aux riches.

        Sinon, je suis d’accord avec Vincent Poncet sur le fait que le mot crédit ici doit être pris au sens comptable crédit/débit, donc le procès d’intention sur son usage est plutôt vain.

    • C’est certainement l’usage de termes comptables qui amène à parler de crédit d’impôt, mais l’esprit s’imprègne aussi de ce qu’on n’a pas voulu dire…
      Le mot société est un bon exemple dans notre langue : le même mot pour désigner la société et une entreprise… Ca pourrait s’appeler le collectivisme inconscient, ça entretient un flou…
      Dans l’article, on voit bien que l’usage du mot crédit amène à se demander quel sens on donne à ce mot.

      Mais dans un pays où l’Etat collecte 56% de la richesse pour la redistribuer selon son bon grée, ça ne devrait pas nous surprendre…

  • Ce comportement m’avait déjà frappé à propos du débat sur la fermeture des « niches fiscales ».
    Créées par le législateur pour orienter les investissements grâce à une carotte fiscale elles sont considérées comme des paradis exorbitants qu’il convient de bloquer au plus tôt. La « dépense fiscale » correspondante (i.e. le manque à gagner de l’état) montre bien qu’il se considère comme légitime propriétaire de la richesse et qu’il octroie généreusement le privilège d’en conserver un peu au « redevable ». A l’extrême, tout ce qui n’est pas taxé à 75%, voire à 100% est une niche, une dépense fiscale…
    A bas la carotte et vive le bâton.
    Les conséquences probablement négatives de l’augmentation exagérée des taux de prélèvement sur les recettes fiscales sont remplacées par des calculs d’épicier du type certificat d’étude en négligeant les modifications de comportement : il suffit de doubler les taux pour doubler la recette!
    Avec ce type de raisonnement , sortir Peugeot de son ornière serait très simple: il suffirait d’augmenter fortement les prix de vente ! Bonjour les dégats!
    A quand les cours de marketing à l’ENA pour les futurs inspecteurs des finances

    • En comptabilité, on dit que ce qui ne rapporte pas, coûte… C’est la même logique ici…

      Et quand le Fisc accepte de ne pas collecter des montants indus, il fait une « remise gracieuse »… comme ils me font chaque année avec ma taxe professionnelle.

      J’imagine que j’aurai aussi une « remise gracieuse » concernant ma taxe audiovisuelle (je n’ai pas de TV), puisque le Fisc me la réclame malgré ma déclaration.230

      Ces deux procédures auront occupé des fonctionnaires du Fisc, qui auront bien mérité leur salaire.

      Les montants qu’ils n’auront pas collectés rentreront dans un compte « recours gracieux » qui feront penser que l’Etat, dans sa grande mansuétude, aide les pauvres entrepreneurs…

    • Comment, vous osez douter que les légitimes modes opératoire de l’Etat ne puissent s’appliquer au sauvetage de Peugeot ?
      L’Etat manque d’argent : il augmente le prix de sa production favorite : les impôts.
      Pourquoi ce qui marche pour Lui ne fonctionnerait-il pas ailleurs ?
      Défaitiste, va !

  • « Mon propos est à dessein exagéré. »
    Vous en êtes vraiment sûr ?
    Moi, de moins en moins…

  • Le mot « crédit » indique bien qu’un jour, l’Etat le fera rembourser… d’une façon ou d’une autre….

  • Le crédit d’impôt est un privilège moderne:je vous fais une réduction d’impôts si vous m’en donnez aussi…

    Le gouvernement actuel ne veut rien collectiviser ni approprier.Il considère simplement que la fiscalité est un levier économique:si on baisse la pression sur certains ménages,on pense qu’ils vont par vertue retourner investir.Mais non la manne supplémentaire dégager va dans les paradis fiscaux et financent des activités terroristes,illégales dont trafic d’armes,blanchiment d’argent,trafic d’organes,lobbystes voulant toujours plus d’arrangements…

    L’état français est prisonnier de son vieux rêve révolutionnaire:en vertue de droits,tu est vertueux.

    Et non grave erreur:il y’a des droits et des devoirs,y compris envers la collectivité.

    Et en fesant un crédit aux grandes entreprises sans contrepartie:il donne une arme pour faire de la concurrence illégale et surtout optimiser la fiscalité de quelques rentiers au détriment des autres partenaires.

    Et cela fait gagner plusieurs…

    Si seuleument il y’avait plus de libéraux chez les experts comptables et les avocats fiscalistes,les comptables

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