Le crédit d’impôt ne sera effectif que sous conditions

Avec l’annonce du Crédit Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi, certains commentateurs croyaient au Père Noël et à la conversion du gouvernement. C’était mal le connaître.

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Le crédit d’impôt ne sera effectif que sous conditions

Publié le 25 novembre 2012
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Avec l’annonce du Crédit Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi, certains commentateurs croyaient au Père Noël et à la conversion du gouvernement. C’était mal le connaître.

Par Thibault Doidy de Kerguelen.

Pour ma part, l’annonce du CICE (Crédit Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi) m’avait laissé assez pantois. Non pas que je trouve l’outil intéressant (une bonne réduction voire suppression des charges salariales serait autrement plus efficace), non pas que je trouve le montant de la mesure intéressant (ce n’est pas de 3 ou 4% qu’il faut baisser le coût de la main d’œuvre en France pour créer un vrai choc de compétitivité, mais vingt voire trente), non pas que je trouve le délai courageux (pourquoi attendre 2014 alors que chaque mois des entreprises ferment ?), mais l’idée qu’on augmente la fiscalité des entreprises de 10Mds€ en 2013 pour annoncer qu’on la réduira de 20Mds€ l’année suivante me laissait une impression de « pas normal ». Mettre en place des outils de contrôle des entreprises, tout faire pour réduire l’initiative individuelle ou privée  pour ensuite dégager des espaces permettant éventuellement de reconstituer ses fonds propres, cela me semblait incohérent. Pour tout dire, je ne comprenais pas. Beaucoup de commentateurs, peut-être par optimisme, peut-être parce que croyant que tôt ou tard la vérité finit par s’imposer, ont crié leur joie et leur confiance et ont annoncé le « virage » économique du gouvernement. Il n’en était rien, nous le savons, désormais.

J.-M. Ayrault a deux nouvelles : une bonne et une mauvaise

Jean-Marc Ayrault a annoncé deux nouvelles concernant le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. La première, la bonne, est qu’il sera introduit par amendement dans le budget rectificatif 2013, et non en début d’année comme le gouvernement l’avait envisagé au départ, et ce pour en faire profiter les entreprises au plus vite. La seconde, la mauvaise, c’est… qu’une deuxième loi verra le jour pour définir les « contreparties liées à son utilisation », loi qui sera votée début 2013.

Il n’y a pas « virage » du gouvernement

Depuis plusieurs semaines, syndicats, et parlementaires socialistes faisaient pression sur le gouvernement pour exiger des contreparties identifiées de la part des employeurs pour pouvoir profiter du CICE. François Chérèque demandait d’attendre l’issue de la négociation sur la sécurisation de l’emploi, la CGT souhaitait mettre en place un contrôle ex-post, pour s’assurer que le crédit d’impôt a bien été utilisé. Tous voulaient que le gouvernement conserve des moyens de pression sur les employeurs. Toujours cette suspicion et cette confusion qui font que pour certains fonds propres équivalent à « bénéfices mis dans la poche ».

Toutes ces réclamations ne sont pas restées lettre morte. Le gouvernement a bien confirmé que les 20 milliards ne seraient pas accordés à titre purement gracieux. « Une loi viendra en début 2013 définir les contreparties liées à l’utilisation du CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi), et notamment les modalités de dialogue social auxquelles elle donnera lieu au niveau national dans chaque entreprise », a déclaré Jean-Marc Ayrault.

C’est du côté de la CGT  qu’il nous faut aller chercher des précisions. Bernard Thibault, au sortir de Matignon, a même précisé que le CICE pourrait être « révisable s’il s’avère que des entreprises, des branches, ne sont pas aptes à présenter des résultats, soit en termes d’emploi, soit en termes d’investissement » ajoutant, visiblement satisfait, « c’est la première fois que j’entends le Premier ministre insister sur le contrôle de l’usage de ces fonds ».

Quel avenir pour CICE ?

Voici donc un « pacte de compétitivité » qui va fonctionner sous la forme de « crédit d’impôt » à valoir en 2014, à condition de remplir des obligations fixées par l’État qui ne sont pas encore définies, tout en sachant que si la manière dont vous avez rempli ces obligations ne satisfait pas, le crédit d’impôt pourra être annulé. La parfaite usine à gaz inutile qui ne servira qu’en effet d’aubaine pour ceux qui de toute manière auraient rempli les conditions. C’est à la fois absurde et inacceptable. Qui va se lancer dans des travaux d’amélioration de la compétitivité, qui va faire des projets d’avenir dans ce contexte ? De fait déjà jugé trop complexe par rapport à un allègement de charges classique, personne ne va vouloir bénéficier d’un dispositif réversible, et donc par nature totalement incertain. Si le gouvernement avait voulu tuer dans l’œuf son projet de pacte de compétitivité, il n’aurait pas mieux fait.

Moody’s et les autres n’ont pas fini de dégrader la France. Les perspectives de relance de notre économie ne sont pas pour demain.

—-
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  • Evidemment, il ne fallait pas se leurrer. Ma première réflexion avait été : mise en place pour 2014 ? et en 2013 que font les entreprises qui attendent de l’aide ? Elles crèvent tout simplement. Comme ça en 2014, ne resteront que (peu) d’entreprises viables…… Traîtrise et incompétence. Mais à quand les foutre dehors ?????

  • Ce CICE me rappelle l’exonération d’impots sur les bénéfices des entreprises de moins de 3 ans dans les années 90. Les comptables l’appliquaient automatiquement , puis 3 ans après le fisc faisait des redressements aux entreprises qui ne remplissaient pas les conditions très alambiquées du texte de loi.

  • J’imagine déjà certaines contreparties: quota d’intérimaire, réduction du dividende, plafonnement des rémunérations, implication des syndicats dans les décisions de gestion (gloup!) parité homme-femme, embauche de « personnes issues de la diversité », quota d’homosexuels, etc.
    Comme dit: « Ce pays est foutu »

    • Le plus beau, c’est que le dispositif pourra ensuite évoluer par simple amendement des lois existantes. Le gouvernement va étendre les exonérations les années suivantes pour rendre ce crédit d’impôts de plus en plus important. Il pourra effectivement rajouté chaque année de nouvelles conditions ou changer les seuils admissibles par simple décret. On voit bien que l’objectif réel final n’est donc pas la compétitivité des entreprises mais leur prise de contrôle progressif à un coût beaucoup plus faible que les nationalisations mitterandiennes.

      En 2014, si vous voulez investir ou avoir de la trésorerie, il faudra s’adresser à la PBI. Vos actions ne tiendront que si la caisse des dépôts en achètent via les livrets A et LDD pompant goulûment l’épargne des français. Si vous voulez avoir des bénéfices, il faudra prouver votre respect des consignes du gouvernement. L’Etat étend son pouvoir à l’ensemble du pays de manière progressive mais discrète …

  • je suis sidérée par leur incompétence, et me demande si on peut encore inverser la machine ?

    • Ils sont très compétents au contraire. Mais leur objectif principal n’est pas la bonne santé économique de la France. Leur objectif est la prise de contrôle de la France dans tous ses aspects. En effet, ils croient à l’économie centralisée et planifiée. Donc dans leur esprit, quand ils auront le contrôle complet, la réalité se pliera devant leur volonté et la bonne santé économique reviendra. Ou du moins les objectifs qu’ils fixeront seront facilement atteints. On a vu ce que ce raisonnement a donné sur les 40 dernières années …

  • Bon!
    Maintenant le problème pour moi c’est est-ce qu’on peut refuser le crédit d’impôt et refuser les contre parties ou est-ce que ces parasites vont nous imposer leur droit de regard?
    En bref, je préfère continuer à payer mais à rester « libre et responsable » chez moi.
    Croyez-vous que je vais pouvoir échapper à leur crédit d’impôt empoisonné?

  • Un point important, rarement évoqué, qui explique le CICE est son aspect vis-à-vis de la comptabilité publique. Le gouvernement voulait baisser les charges des entreprises en 2013 mais cela aurait impacté ses recettes et donc crée du déficit publique à l’encontre de ses engagements européens. Avec le CICE, les baisses de charges sont financés, non par des emprunts étatiques, mais par des emprunts des entreprises. L’Etat contracte en fait une dette sous forme d’engagement à mettre en oeuvre le CICE en 2014. La ruse est que cet engagement ne figure pas dans ses comptes ….

    Il faut donc comprendre la complexité du CICE pour ce qu’elle est. Cette complexité est une cavalerie financière permettant de camoufler une endettement étatique de 20 milliards d’euros en 2013 afin de financer une baisse des charges. Le plus amusant est que l’emprunt étant porté par les entreprises, ce sont elles qui financeront donc les intérêts associés … qui seront en partie captés par des entités étatiques.

    Nous sommes face à un mécanisme exactement similaire à un partenariat public/privé ou une concession d’autoroute dont le but premier est de camoufler une dette publique sous la forme d’un engagement plus nébuleux.

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