Cuba : propagande télévisuelle

La télévision cubaine submerge les téléspectateurs avec le point de vue officiel et veut faire croire à un Cuba qui n’existe pas, un pays où il n’y a ni arrestations illégales, ni menaces policières, ni réunions de répudiation.

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Cuba : propagande télévisuelle

Publié le 30 septembre 2012
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La télévision cubaine submerge les téléspectateurs avec le point de vue officiel et veut faire croire à un Cuba qui n’existe pas, un pays où il n’y a ni arrestations illégales, ni menaces policières, ni réunions de répudiation.

Par Yoani Sánchez, depuis La Havane, Cuba.

Peu d’espaces télévisuels ont fait l’objet d’autant de plaisanteries et de parodies que la « Table Ronde » (« Mesa Redonda »). Née de la fièvre de la soi-disant « Bataille des Idées », cette émission témoigne du plus haut degré de prosélytisme politique que l’on puisse trouver dans nos médias nationaux. Son principe fondamental est de submerger les téléspectateurs avec le point de vue officiel, sans lui permettre d’accéder à des opinions critiques ou contraires à celui-ci. Le dénigrement des opposants sans droit de réponse en contrepartie est érigé parmi les pratiques les plus répétitives dans les micros d’une émission aussi ennuyeuse. Tout ceci est basé sur les prémisses que nous vivons « au paradis » pendant qu’autour le monde tombe en lambeaux.

Depuis le 10 septembre la Table Ronde a réduit sa durée sur les ondes d’une demi-heure. Elle a également modernisé sa scénographie et il paraît même qu’ils ont ajouté un iPad flambant neuf à l’usage exclusif du modérateur. Ils ont des angles de prise de vue plus audacieux et ils ont mis au régime quelques uns de leurs participants un peu grassouillets. On prétend avec ces retouches ajouter un peu de modernité et beaucoup dépoussiérer ce programme anachronique. Pourtant les préceptes principaux qui régissent l’émission restent intacts. Le plus évident est l’absence de pluralisme et la monotonie qui découle de ce que tous ceux qui interviennent pensent de façon identique. Et, grande contradiction, une production aussi nulle verse à ses journalistes les salaires les plus élevés que l’on connaisse à l’Institut Cubain de Radio et de Télévision (ICRT).

Pourtant, mes propos sur cette émission sont peut-être trop influencés par le fait que je travaille moi aussi dans le domaine de l’information. De sorte que je vais illustrer l’opinion de beaucoup de cubains par une anecdote récente. Il y a quelque temps une amie se trouvait aux abords d’une station de police pour exiger la libération d’un activiste détenu arbitrairement. Son portable sonne et c’est son père qui l’appelle. Il est effrayé parce qu’un voisin lui a raconté que sa fille s’est enrôlée dans les affaires de dissidence. Dans la fièvre du moment mon amie trouve juste à lui répondre : « Papa je t’ai déjà dit de ne plus regarder la Table Ronde ». Avec cette simple phrase elle soulignait l’abîme existant entre la réalité nationale et le livret de cette tribune télévisée. Elle indiquait à son géniteur qu’il continuait à croire à un Cuba qui n’existe pas, un pays où il n’y a pas d’arrestations illégales, ni de menaces policières, ni de réunions de répudiation. Une nation apocryphe qui habite du lundi au vendredi pendant une heure… notre petit écran.

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Sur le web. Traduction : Jean-Claude Marouby.

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Nicolas Quénel est journaliste indépendant. Il travaille principalement sur le développement des organisations terroristes en Asie du Sud-Est, les questions liées au renseignement et les opérations d’influence. Membre du collectif de journalistes Longshot, il collabore régulièrement avec Les Jours, le magazine Marianne, Libération. Son dernier livre, Allô, Paris ? Ici Moscou: Plongée au cœur de la guerre de l'information, est paru aux éditions Denoël en novembre 2023. Grand entretien pour Contrepoints.

 

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