De Courson : « l’absence de contrôle de l’IRFM est une atteinte au principe d’égalité devant l’impôt »

Le député (groupe centriste) Charles de Courson, a proposé récemment un amendement technique au sujet de l’indemnité représentative de frais de mandats. L’Assemblée l’a rejeté. Cette indemnité, qui n’est soumise à aucun contrôle, représente un coût global de 44 millions d’euros par an pour le Contribuable. L’occasion d’un entretien pour décrypter cette anomalie française.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Charles de Courson, député centriste de la Marne.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

De Courson : « l’absence de contrôle de l’IRFM est une atteinte au principe d’égalité devant l’impôt »

Publié le 2 août 2012
- A +

Le député (groupe centriste) Charles de Courson, a proposé récemment un amendement technique au sujet de l’indemnité représentative de frais de mandats. L’Assemblée l’a rejeté.  Cette indemnité, qui n’est soumise à aucun contrôle, représente un coût global de 44 millions d’euros par an pour le Contribuable. L’occasion d’un entretien pour décrypter cette anomalie française.

Une interview du Cri du contribuable.

Charles de Courson, député centriste de la Marne.

Votre amendement visant à fiscaliser la partie de l’indemnité des députés qui n’est pas utilisée à des fins professionnelles ne revient-il pas à légaliser une anomalie ?

Ch. de CoursonÀ la veille de la 1ère réunion de la Commission sur la moralisation et la rénovation de la vie politique présidée par Lionel Jospin, il constituait une première pierre en faveur d’un contrôle et d’une sanction en cas de non-respect du bon usage de l’IRFM.

La fiscalisation d’une partie de l’indemnité aurait simplement ouvert la porte à un contrôle plus large de son utilisation. Les élus détenteurs de mandats exécutifs locaux importants disposent de nombreux moyens alloués par la ville dont ils sont maires, ou le Conseil général ou régional qu’ils président ; ainsi, ils n’utilisent pas l’enveloppe qui leur est attribuée dans sa totalité. N’étant pas dans ce cas, je dépasse largement le montant net d’IRFM qui m’est versé tous les mois.

Philippe Séguin, lorsqu’il était Président de l’Assemblée nationale, avait déjà, en son temps, proposé une modulation de l’IRFM en fonction de la situation du Député. La justification de leur frais permettrait une modulation juste de l’enveloppe et serait déjà un premier pas vers le rétablissement de l’égalité entre les parlementaires.

M. Guaino a déclaré à propos de votre amendement que « des députés obligés de justifier chaque dépense ne seraient plus des députés libres ». Pourquoi les députés sont-ils depuis si longtemps, exonérés du droit commun, qui impose au salarié lambda de justifier ses dépenses pour être remboursé ?

Les 44 millions d’euros dépensés chaque année au titre de l’IFRM, à des fins professionnelles ou non, ne sont pas contrôlés. En 2002, un amendement voté au Sénat, a interdit le contrôle par l’administration fiscale de l’utilisation l’IRFM.

Selon moi, le principe constitutionnel d’égalité, notamment devant l’impôt, énoncé à l’article 14 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen, ne s’applique pas aujourd’hui aux parlementaires alors qu’ils devraient être exemplaires. Mon amendement visait à supprimer cette distorsion en rendant vérifiable par l’administration fiscale la part de l’IRFM non utilisée à des fins professionnelles. Cette idée ne constitue en aucun cas une atteinte à la liberté du parlementaire qui utilise raisonnablement l’enveloppe qui lui est attribuée !

« Tout le monde sait que certains députés n’utilisent pas toute l’indemnité pour leurs frais de mandat, ne faites pas l’innocent ! », avez-vous lancé à Bruno Le Roux. Ce dernier a indiqué que si cette indemnité n’était pas utilisée dans sa totalité, le reste devait être rendu à l’Assemblée. Pourquoi ne pas le rendre à Bercy ?

Le système actuel permet déjà aux députés de reverser la part non utilisée de l’IRFM au budget de l’Assemblée. Or, le montant des reversements est actuellement dérisoire. En outre, cette idée ne répond pas à la question préalable du contrôle qui doit être institué sur ces dépenses.

Lionel Jospin va présider une commission chargée de la rénovation et de la déontologie de la vie publique. Dans le même temps, Claude Bartolone doit prochainement annoncer la création d’un groupe de travail chargé de faire des propositions sur l’IRFM. Ces mesures n’ont-elles pas un effet doublon ? Cette réforme de la vie politique ne devrait-elle pas être du domaine réservé des parlementaires ?

Les propositions de ces deux entités pourraient être complémentaires. Le risque réside dans le fait qu’un nombre trop importants de propositions n’aboutissent finalement à rien de concret. Dans ce cas, je redéposerai mon amendement à l’occasion du prochain projet de loi de finances initial pour 2013.

Ne devrait-on pas envisager une réduction de l’IRFM pour forcer les députés à mieux gérer cette indemnité ? D’autant qu’ils profitent, en plus, de la réserve parlementaire et de l’enveloppe destiné à leur collaborateur, qui la plupart du temps n’est pas utilisée dans sa totalité…

L’existence, ou tout du moins la menace, d’une sanction, permettrait aux députés d’être plus raisonnable dans l’utilisation de cette enveloppe. Même si la séparation des comptes personnel et professionnel est obligatoire, il faudrait aller beaucoup plus loin :

  • Exiger la présentation de pièces justificatives afin de justifier que chaque euro dépensé sur cette enveloppe, substantielle aux yeux des citoyens, l’est bien dans le cadre du mandat parlementaire.
  • Instaurer un contrôle de la Commission des comptes ou du collège des Questeurs ou du Déontologue de l’Assemblée nationale sur ces pièces justificatives afin de préserver l’indépendance des députés.
  • Moduler cette enveloppe en fonction de la détention d’autres mandats, et notamment d’un mandat exécutif local et de la nature de la circonscription (superficie, éloignement de Paris…).

Pour ce qui concerne la réserve parlementaire, celle-ci est destinée à aider les collectivités locales ou des associations, et ne profite pas matériellement aux parlementaires. Par contre, en matière de crédit collaborateur, son utilisation devrait être davantage contrôlée.

Connaissez-vous, à l’étranger, un système qui prévoit un meilleur encadrement de l’indemnité du législateur ?

En Allemagne, comme le souligne l’IFRAP, les indemnités de frais de mandat sont versées contre justificatif des dépenses et les collaborateurs ne peuvent être payés par le Bundestag s’il s’agit de proches du député, qui devra alors les rémunérer sur ses propres deniers. En Italie aussi, il n’y a pas d’indemnité pour collaborateurs parlementaires.

Le Royaume Uni a créé en 2010 l’IPSA (Independant Parliamentary Standars Authority), qui a permis de mettre à jour le grand scandale qui a touché la Chambre des communes. Désormais, les députés britanniques doivent effectuer des demandes de remboursement sur justificatif, le paiement des collaborateurs est liquidé indépendamment de leur propre traitement, etc. Et ces notes de frais sont rendues publiques. C’est le système le plus transparent.

Sachant que certains collègues utilisent une partie de cette indemnité pour des dépenses autres que des frais professionnels, il y aura un jour un grand scandale, comme en Grande-Bretagne ; la Démocratie en souffrira et l’image du Parlement sera dégradée. Il est donc urgent d’agir.

—-
Sur le web.

Voir les commentaires (8)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (8)
  • qu’est-ce que 44 millions d’euros, alors que demain il y a 176 millions d’euros au tirage de l’euro-millions. Comme écrivait un jour Philippe Bouvard, où est l’heureux temps où le Président de la République pouvait reprendre deux fois du gigot le dimanche midi, sans qu’on lui compte ses frais de bouche. Il faut en finir avec le « poujadisme » de « droite » comme de « gauche ». Gérard FREMIOT, docteur en sciences politiques, auteur de « L’Etat: le grand retour » ,Müller éditions,2012.

    • C’est 44 millions en partie sortie de ma poche, lorsque l’on gagne le moindre euros il faut le déclarer, alors pourquoi pas les députés?

    • Ah bah, si ce ne sont que quelques millions !!
      Dites, si j’enlève quelques milliers d’euros à ma prochaine déclaration d’impôt et qu’un contrôleur du fisc vient me chercher des noises, je pourrai répondre aussi : « qu’est-ce que quelques milliers d’euros!… »?

    • Ces 44 millions, je propose qu’on les retire de votre poche.

      Ah, tiens, c’est marrant, je suis sûr que cette somme n’est plus si indolore… Bah oui, c’est comme d’habitude en somme : l’argent des autres est toujours négligeable. Moyennant quoi, on fait 1700 milliards de dettes et personne n’est coupable.

      Belle mentalité de pilleur, mon cher Gérard Frémiot !

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Nommé ministre du logement jeudi 8 février, Guillaume Kasbarian avait accordé un entretien à Contrepoints en novembre dernier en tant que député Renaissance de la première circonscription d'Eure-et-Loir et président de la Commission des affaires économiques.

 

Contrepoints : Bonjour Monsieur le Député, merci d’avoir accepté de nous accorder cet entretien. Pour nos lecteurs qui ne vous connaissent peut-être pas, pourriez-vous nous parler de votre parcours et nous raconter ce qui vous a amené à vous engager en politique et à ... Poursuivre la lecture

Aujourd'hui 20 novembre, le septennat fête ses 150 ans. Bien qu'il ait été remplacé depuis plus de vingt ans par le quinquennat, il suscite toujours des nostalgies. Or, l'idée singulière de confier le pouvoir à quelqu'un pendant sept ans, ce qui est long dans une démocratie, est le résultat d'une loi conçue comme provisoire. Un provisoire qui devait durer 127 ans !

L'adoption du quinquennat en 2000 a pourtant laissé des inconsolables du septennat si on en juge par des propositions récurrentes de le rétablir sous la forme d'un mandat pr... Poursuivre la lecture

« Que d'eau, que d'eau ! »

C'est l'exclamation attribuée au président Patrice de Mac-Mahon à la vue de la crue historique de la Garonne, à Toulouse, le 26 juin 1875.

« Que d'air, que d'air ! » brassé à l'Assemblée nationale au sujet de l'eau et des « mégabassines », pourrait-on dire aujourd'hui.

Les dépressions – au sens météorologique – se suivent sur la France avec la régularité d'un métro parisien quand il fonctionne normalement. Elles apportent d'importantes quantités d'eau dont une partie réhumidifie les sols et rech... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles