Eurozone : armistice ou capitulation ?

Les eurocrates sont en train de perdre la partie de façon indiscutable et tout le monde commence à voir que le roi est nu. La vraie question est désormais : les eurocrates doivent-ils demander l’armistice ou vont-ils continuer à se battre à mort ?

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Eurozone : armistice ou capitulation ?

Publié le 14 juin 2012
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Les eurocrates sont en train de perdre la partie de façon indiscutable et tout le monde commence à voir que le roi est nu. La vraie question est désormais : les eurocrates doivent-il demander l’armistice ou vont-ils continuer à se battre à mort ?

Par Louis Gave.
Publié en collaboration avec l’Institut des libertés

La chute de l’Union soviétique fut la preuve pour tous que la technocratie ne pouvait fonctionner. Mais ce message constitua un véritable anathème pour tous les technocrates française, ceux-là même qui peuplent les couloirs de Bruxelles à Paris, et qui arrivèrent à la conclusion que ce dont nous avions besoin était une nouvelle et plus franche source de technocratie afin d’échapper aux dangers du marché libre.

Quel était le plus grand danger pour ces gens-là ?

Le simple fait que l’économie allemande soit la mieux gérée de la zone euro et qu’à terme personne ne conserverait plus de Francs français pour son épargne mais bien des Marks allemands. L’Allemagne serait ainsi devenue la puissance dominante de la zone euro d’autant que désormais le marché commun interdisait le contrôle de changes. Inutile de rappeler que cette monnaie commune était le premier pas vers un État européen qui permettrait de créer des tonnes d’emplois pour « nos garçons » comme aimaient les appeler les syndicats britanniques de la grande époque ; « nos garçons » étant bien sur les technocrates français.

Ceci fut perçu à juste titre par les marchés comme une déclaration de guerre.

Après tout, les taux de change ne sont jamais que les prix des marchés déterminés par des facteurs comme la différence entre la vie économique des pays, l’attractivité des actifs d’un pays ou la différence de productivité entre le coût du travail et le capital.

Ce que les politiques et les eurocrates dirent alors les yeux rivés vers l’horizon et la mâchoire serrée fut : « nous, le peuple d’Europe, allons expliquer aux marchés financiers qu’elles sont les règles du jeu, la leçon principale étant bien sûr que les politiques triomphent de l’économie (comprendre « la finance » qui veut dire dans leur langage « les Anglo-saxons »).

L’Euro devenant ainsi pour les eurocrates un projet politique avant d’être un projet économique afin d’expliquer au monde comment il convenait de dresser la bête sournoise et vile que l’on appelle marché. Et pour attester du sérieux de leur système, ils construisirent un système sans sortie, bien verrouillé. Du Victor-Hugo, hélas !

Le problème reste que l’euro n’a alors pas fonctionné, qu’il ne fonctionne toujours pas et qu’il ne fonctionnera probablement jamais. Les marchés en ont pris conscience et sans répit piétineront l’euro sans relâche désormais. Ainsi, la guerre commence pour les supporters de l’euro et elle semble en passe de se terminer par une défaite des fonctionnaires qui mettrait presque Azincourt et Crecy au rang des victoires nationales.

Quand on arrive face à une telle situation de défaite dans une guerre, on a en général deux options :

  1. Signer l’armistice, ce qui, en pratique, revient en général à dire à l’autre partie « ok, vous avez gagné, quelles sont vos conditions », discuter de ces conditions, les accepter et passer à autre chose ;
  2. Se battre à mort (choix des hommes jeunes en général) et être forcé lors de la signature des traités de paix d’abandonner sa souveraineté nationale. Cela implique généralement de reconstruire de zéro beaucoup de choses ayant été détruites, et accepter une sorte de protectorat de la puissance dominante (on pense spontanément à McArthur au Japon).

Les eurocrates sont en train de perdre cette guerre de façon indiscutable et tout le monde commence à voir que le roi est nu. La vraie question qui saute alors aux yeux du spectateur impartial est désormais : les eurocrates doivent-il demander l’armistice ou vont-ils continuer à se battre à mort ?

Cette dichotomie de choix nous impose de revenir sur ces deux notions.

Armistice

Un armistice commence par une double prise de conscience :

  1. L’euro ne fonctionne pas.
  2. Le marché commun (tel que définit communément) doit être à tout prix sauvé.

Ces deux points devraient logiquement conduire à ce qu’une monnaie nationale (la seule solution) soit restaurée, sans trop d’acrimonie et en bon ordre. Ceci implique que la dette des États serait alors remboursable en monnaie locale du pays et qu’une durée de taux de change flottant entre les nations devrait aussi être observée. Ceci implique aussi que quelques institutions du système financier risquent de faire faillite et devront accepter des nationalisations.

Cela devrait conduire également à ce que le niveau de vie des rentiers locaux (détenteurs d’obligations, retraités, fonctionnaires) diminue de façon draconienne. Parallèlement, les entrepreneurs locaux commenceraient à redevenir prospères au fur et à mesure de la sous-évaluation de la nouvelle monnaie locale, ce qui impliquerait également des taux d’intérêt très bas.

Une monnaie sous-évaluée liée à des taux d’intérêt très bas permettrait le retour à une croissance forte et permettrait également de résoudre le problème de la trappe à dettes. Dans un monde tel que décrit ici, le consommateur allemand serait le gagnant, le producteur allemand le perdant, et le système financier allemand serait le premier à faire faillite.

Dans ce nouveau système, et si personne ne devient protectionniste, l’euro apparaitrait alors assez vite comme le cauchemar qu’il est et l’Europe, tel le phénix, pourrait enfin renaître de ses cendres.

Capitulation

Dans ce second scenario, nous restons dans la donne actuelle, et l’Europe au bord du gouffre fait un redoutable bond en avant. À ce stade, nous pouvons craindre que le bébé ne soit jeté avec l’eau du bain, c’est-à-dire que la victime expiatoire risque fort d’être la marché commun.

Dans ce scenario, que je suis loin d’appeler de mes vœux, il n’y aurait aucun gagnant, que des perdants. Il n’y aurait aucun transfert de richesse des rentiers aux entrepreneurs mais juste une perte de richesse massive et générale. Dans ce scenario, le rentier européen serait littéralement piétiné, avec en prime des baisses de niveau de vie plus qu’importantes.

Je ne sais pas du tout lequel de ces deux scénarios va prévaloir.

La seule chose que je sais est que les 10 pays qui sont européens mais qui ne sont pas dans la zone euro tels que la suède, la Grande Bretagne, la Pologne etc. auront un rôle prédominant afin de déterminer la moins mauvaise solution à choisir. La France et l’Allemagne ont été les meneurs de l’Europe depuis 10 ans et ils ont échoués. À d’autres de passer devant.

—-
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  • L’option « armistice » est incohérente : le marché commun est incompatible avec les contrôles des changes, les barrières douanières et les dévaluations compétitives qui ne manqueront pas d’être mis en oeuvre dans chaque pays en cas de retour aux monnaies nationales.

    Ne pas oublier que le marché commun s’est accompagné du serpent monétaire (en 1972, suivi du système monétaire en 1979) qui limitait les fluctuations monétaires entre les pays participant au marché, préfigurant l’euro.

    Egalement, le remboursement des dettes des Etats en monnaie locale revient à faire défaut, les obligations souveraines étant libellées en euros.

    Le retour aux monnaies nationales avec l’intention implicite de se lancer dans des politiques de dévaluations compétitives signifie la fin du marché commun, les monnaies nationales devenant alors « des obstacles à la libre circulation des personnes, des marchandises, des services et des capitaux ».

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