Les pharmaciens n’aiment pas la concurrence

La règlementation de la distribution des médicaments au Canada fait en sorte de réduire la concurrence et résulte en une facture plus salée pour les consommateurs au profit des pharmaciens.

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Les pharmaciens n’aiment pas la concurrence

Publié le 7 avril 2012
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La règlementation de la distribution des médicaments au Canada fait en sorte de réduire la concurrence et résulte en une facture plus salée pour les consommateurs au profit des pharmaciens.

Par Le Minarchiste, depuis Montréal, Québec.

Il y a quelques temps, l’émission La Facture de Radio-Canada jetait un pavé dans la marre en réalisant une enquête sur les prix des médicaments d’ordonnance dans les pharmacies. Les journalistes ont remarqué des différences importantes entre les prix de vente du même médicament dans différentes pharmacies.

Par exemple, 30 comprimés de pantoprazole, un médicament soulageant ses problèmes d’estomac, se vendent $45 à la pharmacie Jean-Coutu de Saint-Eustache, alors qu’ils se vendent $30 à quelques rues de là, chez Proxim.

La plupart des gens croient que les prix des médicaments d’ordonnance sont les mêmes d’une pharmacie à l’autre. C’est d’ailleurs ce que plusieurs pharmaciens affirmaient faussement à la journalise de La Facture au téléphone. Ils ont cependant eu un son de cloche différent auprès du porte-parole de l’association des pharmaciens :

« Une pharmacie vit de la pharmacie. Il y a les mêmes enjeux commerciaux qu’une quincaillerie, un marché d’alimentation ou un marchand de meubles », explique Daniel Larouche, de l’Association des pharmaciens propriétaires, en voulant dire qu’un pharmacien est avant tout un homme d’affaires vivant du profit. Les prix des meubles sont différents chez Brault & Martineau comparativement à Léon ou Bricks. Il n’y a aucune raison pour que les prix soient les mêmes entre Jean Coutu et Pharmaprix.

Jusqu’ici, il n’y a pas vraiment de problème. Un commerce peut vendre un produit au prix qu’il veut. Si le prix ne vous convient pas, vous l’achetez ailleurs ou vous ne l’achetez pas. « Nous sommes dans un pays libre » (sic) comme le mentionne M. Larouche. Il n’y a pas de raison pour que le gouvernement impose un prix aux pharmaciens puisque ceux-ci sont en concurrence.

Cependant, ça se gâte un peu plus loin. Lors de l’enquête, plusieurs pharmaciens ont refusé de donner les prix par téléphone. Ils ne sont pas obligés de le faire. Il faut aller sur place avec l’ordonnance du médecin et le demander au pharmacien. Certains pharmaciens refuseront même de donner leur prix jusqu’au moment de remettre la facture.

Par ailleurs, la règlementation “empêche” les pharmaciens d’afficher les prix des médicaments d’ordonnance ou d’en faire la publicité. Je ne doute point que les pharmaciens ont supporté ce genre de règle, qui leur permet de réduire le niveau de concurrence et d’augmenter les profits.

Une dame interrogée par La Facture a contacté son assureur, la Great-West, pour lui faire part de la situation. L’assureur privé paie 80% de la facture, peu importe où le médicament est acheté et peu importe son prix. Il aurait donc avantage à diriger ses clients vers les pharmaciens les moins « gourmands », mais il ne le peut pas car la loi l’interdit ! Une loi sans doute concoctée par le lobby des pharmaciens pour entraver la transparence des prix et se fabriquer une forme d’asymétrie informationnelle artificielle.

Ceci dit, l’assureur est plutôt indifférent à tout cela, puisqu’il repasse les coûts plus élevés des médicaments aux assurés à travers des primes plus élevées. D’une façon ou d’une autre, c’est donc le consommateur et les contribuables qui paient.

Au Québec, il est illégal pour un pharmacien d’accorder un rabais pour un médicament d’ordonnance à un assuré, un groupe d’assurés ou un assureur négociant pour ses membres ; donc pas de prix « de gros ». Les assureurs privés et l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires ont conclu une entente régissant entre autre les modalités de remboursement des médicaments. Dans sa pharmacie, le pharmacien doit donc obligatoirement facturer le même prix, pour un service ou un produit identique, à tous les assureurs privés sans exercer de discrimination, mais il n’a pas à facturer le même prix que les autres pharmaciens. Au Québec, 4,3 millions de personnes sont assurées par une entreprise privée pour le remboursement de leurs médicaments d’ordonnance. C’est plus de la moitié de la population.

Le prix d’un médicament inclut le prix d’achat du produit chez le fabricant (qui selon La Facture est le même pour tous les pharmaciens), l’honoraire pour le service professionnel rendu par le pharmacien et les frais d’exploitation. Ce sont ces deux dernières composantes qui varient d’un pharmacien à l’autre.

Monsieur Larouche a donc beau faire l’apologie de la concurrence et du libre-marché, ce n’est que de la poudre aux yeux. En réalité, la règlementation de cette industrie fait en sorte de réduire la concurrence et résulte en une facture plus salée pour les consommateurs au profit des pharmaciens.

C’est l’essence même de la règlementation : un discours garni de bonnes intentions, un objectif louable de vouloir protéger la population des « méchantes entreprises capitalistes », mais un résultat contraire qui fait plutôt en sorte de réduire la concurrence à l’avantage des entreprises règlementées. C’est la même chose pour toutes les industries. Ce qui est drôle est que la solution qui semble être suggérée par La Facture consiste à introduire encore plus de règlementation pour pallier au problème…

En somme, c’est un cas typique de règlementation qui réduit la concurrence, laquelle est essentielle au bon fonctionnement d’un marché (voir ceci).

http://www.radio-canada.ca/nouvelles/societe/2012/03/18/003-pharmacie-medicament-couts.shtml

http://www.protegez-vous.ca/sante-et-alimentation/prix-des-medicaments.html

Sur le web

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  • Ce n’est pas une découverte fondamentale. Ce que vous dites des pharmaciens vaut de toutes les professions dont l’accès est limité et/ou les prix fixé par la loi (au sens large). Ceci dit les pharmaciens, en Europe, sont tant massacrés de réglementations et de contraintes diverses qui font qu’en dépit de leur oligopole légal, beaucoup ne gagnent pas grand’chose.

  • Les commentaires sont fermés.

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