Sarkozysme, tout sauf insignifiant

On peut détester la popularisation de la fonction présidentielle mais elle reflète notre époque. Rejeter le sarkozysme pour cette raison-là, revient à ne pas aimer notre temps

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Sarkozysme, tout sauf insignifiant

Publié le 13 mars 2012
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Le sarkozysme aura contribué à une démocratisation du pouvoir et de ceux qui l’exercent. On peut détester cette popularisation de la fonction présidentielle mais elle reflète notre époque. Rejeter le sarkozysme pour cette raison-là, revient – c’est permis – à ne pas aimer notre temps. 

Par Guy Sorman

 

Distinguons le sarkozysme comme mode d’action et Nicolas Sarkozy comme personnage : les deux ne se recoupent pas tout à fait. C’est le sarkozysme qui ici importe, dont le bilan est fécond : mais oui.

Au reproche essentiel que l’on adresse à Sarkozy, de n’avoir su habiter la fonction, on le remerciera plutôt d’avoir ébréché le monarchisme présidentiel. Jacques Chirac fut l’ultime souverain et Nicolas Sarkozy, le premier moderne ; le sarkozysme est de notre temps, à l’heure du téléphone portable plus que de la plume. On peut détester cette popularisation de la fonction présidentielle mais elle reflète notre époque. Rejeter le sarkozysme pour cette raison-là, revient – c’est permis – à ne pas aimer notre temps. De notre temps aussi est la transgression sarkozyste des lignes partisanes anciennes et de la monopolisation des postes par les vieux mâles blancs. Affecter des socialistes, des femmes issues de l’immigration dans des fonctions décisives aura été une révolution sarkozyste : le gouvernement et la haute fonction publique commencent à ressembler à la société toute entière.

Un repli de l’État s’il devenait de nouveau partisan, ethnique, sexiste et gérontocrate, par-delà le sarkozysme, sera probablement impensable, impossible. Quel chef d’État, dans l’avenir, osera cantonner un Français arabe à la gestion de l’immigration et une femme à l’assistance sociale ? Le sarkozysme aura donc contribué à une démocratisation du pouvoir et de ceux qui l’exercent. Significatif aussi est le droit accordé aux Français expatriés, pour la première fois, de désigner leurs députés à l’Assemblée nationale : manœuvre politique peut-être mais reconnaissance d’une évolution majeure. La nation ne coïncide plus avec ses frontières : la France n’est pas une géographie mais un territoire mental, là où vivent des Français.

À cette apologie de l’internationalisation de la France, on nous objectera le traitement odieux des Roms et des controverses absolument choquantes sur l’islamisation de la société française. Oui, mais par-delà ces débordements de campagne, le sarkozysme est aussi une réaffirmation de l’État de droit contre la désertion antérieure des zones de non-droit : plus une société se diversifie, plus la coexistence de cultures distinctes exige le respect de la loi, comme contrat social. Sarkozy a compris cela : la sécurité est l’avers de la diversité.

Démocratisation et puis modernisation, dans l’enseignement supérieur d’abord : il est évident que la forteresse enseignante devait évoluer vers l’autonomie et la concurrence. Le sarkozysme n’y est pas complétement parvenu mais le chemin est défriché. Modernisation économique aussi, tout juste esquissée pour cause de crise mais avec des ouvertures nécessaires dans le carcan du Droit du travail : le sarkozysme aura dit, sinon fait, que l’entrepreneur soit reconnu comme le seul vrai moteur du dynamisme économique. La crise financière de 2008 a brisé cet élan libératoire : Nicolas Sarkozy a provisoirement cédé à la mythologie keynésienne qui ne laisse jamais dans son sillage que des dettes publique et pas d’emplois. Mais la Grèce et l’Allemagne, se répartissant les rôles, la cigale et la fourmi, ont reconduit le sarkozysme au bon sens : le contrôle des dépenses publiques pour restaurer l’investissement privé.

Ressaisissement aussi et retour aux sources libérales que le rapprochement avec l’Allemagne, partenaire et modèle, puisqu’en économie c’est la rigueur qui paie. Ce qui conduit le sarkozysme vers une Europe fédérale à terme, parce que la Fédération garantira des politiques économiques cohérentes et productives. On aura compris que le sarkozysme est, non pas un anti-gaullisme mais un post-gaullisme puisque nous avons changé de siècle et de société.

Le sarkozysme, c’est aussi le retour de la France à son espace naturel, l’Occident, plutôt que la troisième voie ou le ni-ni. De nouveau, nous voici les alliés diplomatiques et militaires des États-Unis. De nouveau, enfin, nous voici du côté des droits de l’homme en Géorgie, en Lybie, Syrie, Tunisie, Égypte et – un peu plus que du temps de Jacques Chirac – du côté des droits de l’homme en Chine et en Russie.

En conclura-t-on que le sarkozysme est une vision cohérente du monde, de la France dans le monde, de l’État en France ? Il n’en est sans doute que l’esquisse, une première tentative pour que notre nation rattrape son temps et le monde. Car à vouloir trop embrasser, trop vite, le sarkozysme est brouillon, reflet de l’impatience de Sarkozy, l’homme pressé de la Cinquième République : l’action paraît décalée de la réflexion, quand le messager occulte le message. Le sarkozysme au total, apparaît telle une pensée forte, indiscutablement contemporaine mais parfois en quête d’auteur.

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  • Rien ne prouve qu’il n’y a pas d’élitisme chez Sarkozy, qui est un énarque qui a raté son examen, mais un énarque quand même. Il y a un grand mouvement de décentralisation des moyens d’action dans notre époque, et Sarkozy n’en est pas l’acteur (ni aucun candidat à la présidentielle) même s’il s’entoure de gens de qualités, comme NKM ou Rosso-Debord, il y en a qui sont dans des postures du 19è siècle.

    Alors popularité ce n’est pas certain, vulgarité un peu, brutalité sans aucun doute (et qui pose problème politiquement)… ce qui lui est reproché c’est plutôt une certaine grossièreté, sans qu’on sache avec certitude si elle est feinte ou non. Ainsi il a tendance à ébrécher le monarchisme présidentiel en piquant des stylos de luxe plus qu’en utilisant des BIC, désolé.

    • NKM personne de qualité ? Vous n’avez pas bien dû l’écouter ou l’observer agir.

      • Je ne l’ai peut-être pas suffisamment observée. Elle me semble intelligente, déterminée et avoir dépassé le déterminisme qui plombe son parti, maintenant je ne la connais pas beaucoup, c’est vrai.
        En tous cas, manifestement, elle a conscience de devoir aussi composer avec une bande de blaireaux, c’est déjà un bon point.

  • « Le sarkozysme aura contribué à une démocratisation du pouvoir »

    Lol quoi.

    Le roi nomme quelques riches roturiers d’en face pour se les mettre dans la poche, ça n’a rien strictement rien à voir avec une « démocratisation ». Quand aux autres « acquis » les pires mesures socialiste du siècle sont bien annoncées ou prise sous son mandat. Rien n’a changé ou en pire dans l’oligarchie Française.

    Le lexique français devient de jour en jour de plus en plus ubuesque. Entre la « rigueur » les « économies » et la « démocratisation » les mots ne veulent plus rien dire.

  • « ne pas aimer le sarkozisme c’est ne pas aimer son temps… » Désolé j’aime mon époque, mais pas ce « sarkozisme brouillon » qui en 5 ans n’a pas su mettre en place et mener les réformes structurelles indispensable. Le « sarkozisme » c’est aussi un bilan que la crise n’excuse pas en totalité : Un déficit porté à 510 milliards et une dette à 1700 milliards, je pense que nos enfant se rappelleront de ce temps qu’aime tellement Guy Sorman, mais s’empresseront d’oublier N.Sarkozy…

  • Ne serait pas une tentative habile, mais néanmoins un peu cousue de fil blanc, de récupérer un « électorat libéral » n’ayant personne pour qui voter et tenté par le vote blanc ou l’abstention ?

  • Je ne sais pas ce que cet article fait ici, tant il ne contient des erreurs et des généralités.
    Arrêtez avec Guy Sorman, pitié pas un seul de ses articles n’est bon.

  • Chacun des renards qui se sont succéder au « poste suprême » de la république bannière française avait son style et sarkosy à le sien qui n’est pour ma part ni pire ni meilleur que ceux de ses prédécesseurs. Ce qu’il partage par contre avec ceux ci c’est la socialisation rampante de la société, ce gout pour le « fait du prince », l’autoritarisme de bon alois le tout couronnée par bonne couche de démagogie et de mensonges. Sarkosy à été élu président de la république c’est donc par définition, un menteur, une baudruche gonflé avec des milliers de m3 d’égo, une ambitions qui n’a d’égale que son incompétence. Après vous décoré ce tableau comme il vous plait ça reste une immonde croûte indigeste.

  • Il n’y a pas de « vision »: sur le fond c’est encore le socialisme et la politique de bas étage qui caractérise le mieux le sarkozysme.
    Et ça, c’est exactement la même chose depuis 30 ans, du jour où une génération a décidé de trahir ses enfants au nom d’un confort acheté à crédit.

  • Je trouve cet article delirant. Le sarkozysme c’est sarkosy. Le jour ou ce petit homme a ete porte au pouvoir par des idiots, il a atteint son niveau d’incompetence. En 5 ans de presidence, nous avons eu de l’agitation perpetuelle, sans un brin de debut de commencement de pensee, de la grossierete, une absence de culture terrifiante etc… avec lui et LE sarkosysme, nous avons une vision claire de l’idiocracy installee et qui se developpe a toute vitesse.

  • N’importe quoi ! Dire que le sarkozysme est représentatif de la modernité c’est vraiment ne rien comprendre au monde dans lequel on vit à la transition en route et les aspirations des peuples ! Sarkozy est le contraire de ce qu’exige l’époque ! Il est le dernier avatar d’un système déraillant qui est en train de s’effondrer !

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