Chronique de la folie écologiste ordinaire

Dans la France de 2012, le chiendent est mieux protégé que la propriété privée. Littéralement.

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Chronique de la folie écologiste ordinaire

Publié le 3 février 2012
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Est-ce vraiment justifié de faire payer deux millions d’euros au contribuable pour la destruction de 500 m2 de l’habitat d’Euphorbia Terracina, une plante protégée sans intérêt particulier?

Un article de Vincent Bénard.

Nous vivons une époque formidable.

Tenez, au détour d’une lecture, nous apprenons que l’agglomération de Perpignan a été condamnée à effectuer pour deux millions d’euros de travaux pour compenser la destruction de 500 m2 d’une plante protégée, l’Euphorbe de Terracine.

 

Euphorbia Terracina, une inconnue qui gagnerait à le rester

Les 500 m2 détruits avaient le mauvais goût de se trouver sur une dune qui a servi à l’aménagement d’un port dans le cadre d’une ZAC de neuf hectares. La plante en question est, parait-il, en voie d’extinction, du moins en France, « car elle a disparu des Alpes Maritimes », et n’est plus présente que dans cinq départements du bord de la Méditerranée sur sept.

Cette plante a-t-elle un véritable intérêt écologique ?

Esthétiquement, en tout cas, personne ne la regretterait. Aucun usage pharmaceutique ne semble recensé non plus, même si certaines euphorbes étaient prescrites par la médecine chinoise traditionnelle. Apparemment, la chose n’a aucune vertu culinaire, son latex est même un poison pour les herbivores. Certes, quelques larves de papillon peuvent s’en nourrir, mais je peine à croire que la disparition d’un parterre de 500 m2 sur la dune de Perpignan constitue une menace majeure pour la chaîne alimentaire.

Visiblement, les Californiens estiment que c’est une plante invasive. Ce slide PDF nous explique que hors de son milieu natif méditerranéen, c’est une vraie cochonnerie qui tend à coloniser et détruire les plantes natives. Un peu comme la renouée du Japon chez nous.

La lecture de sites australiens ou américains nous apprend même qu’elle est assez banale, pousse facilement sur le bord des routes et dans n’importe quel milieu dunaire, et, en Australie, visiblement, il est autorisé de lui faire son affaire à coups de pesticides. Mais attention, il est recommandé de se prémunir contre les projections de sève blanche dans les yeux et sur la peau.

Bref, l’intérêt de protéger une plante comme l’Euphorbia Terracina parait assez mineur, dus-je faire bondir quelque botaniste de passage par ici. Elle n’est en tout cas pas menacée de disparition complète, très loin s’en faut !

 

Le prix de l’euphorbe : 4000 euros le m2 !

Mais les voix de l’écologie ont leurs raisons que la raison ignore.

Pour avoir arraché ces quelques plants d’Euphorbe Terracina sur 500 m2, la collectivité, c’est-à-dire les contribuables de Perpignan et de ses riantes banlieues, vont devoir lâcher… deux millions d’euros pour acheter 27 hectares de zones de réimplantation, réimplanter cette fichue plante et entretenir ces 27 hectares de terrain pendant 30 ans.

Vous avez bien lu : la collectivité va devoir acheter, replanter et entretenir 27 hectares de terrains pour compenser 500 m2 de perte d’une espèce protégée pour des raisons qui échappent au sens commun. Et ce coût de deux millions ne couvre pas les pertes d’opportunité liées à l’impossibilité, pour la collectivité, de faire un meilleur usage de ces 27 hectares pendant 30 ans.

Cela nous met le m2 de plante parasitaire à plus de 4000 euros. Et elle ne se fume même pas !

Ce fait divers m’amène quelques réflexions.

 

La nature, déesse intouchable ou sauvage à apprivoiser ?

Tout d’abord, ne nous méprenons pas, je n’ai rien contre une protection raisonnable de l’environnement.

Mais en l’occurrence, les limites de la raison sont largement dépassées.

La destruction incidente de 500 m2 d’une plante d’intérêt visiblement secondaire, pour ne pas dire plus, justifiait-elle que la collectivité doive isoler 27 hectares (270 000 m2) pour la réimplanter ? 500 m2 n’auraient ils pas suffi ? Ou, disons, 2000 m2, pour tenir compte d’un coefficient de dispersion raisonnable ?

Pourquoi fallait-il obliger la collectivité à payer 540 fois la surface de plante détruite ? À entretenir des terrains pendant 30 ans pour réimplanter une espèce dont une recherche Google d’une minute nous apprend (toujours via les Australiens) qu’elle est l’une des plus robustes de sa famille et qu’elle prolifère parfois comme le chiendent ? Et, bon sang, pourquoi faut il protéger cette plante-là ?

D’une façon générale, bâtir, tracer des routes, construire des bâtiments, transforme le milieu récepteur de ces aménagements.

L’humanité a au cours des siècles déforesté la nature à un rythme autrement plus rapide que de nos jours (la forêt regagne du terrain depuis l’après guerre, malgré les cris d’orfraie des associations écologistes), parce qu’il fallait bien créer des terrains agricoles. Avant de protéger la nature, l’Homme a dû s’en protéger, et il est encore souvent victime de ses foucades. Nos anciens, bien qu’ayant parfaitement intégré le fait que la nature, une fois apprivoisée, devait les nourrir, vivaient dans un environnement bien moins propre que l’image d’Épinal que nous vendent les nostalgiques de l’état de pure nature cher à Jean-Jacques Rousseau. L’air des villes était incroyablement pollué par les rejets des poêles à bois puis à charbon, et par les déjections d’animaux (chevaux de trait, etc.) qu’il fallait nettoyer avec des moyens de fortune. L’assainissement des déjections était sommaire, et les habitants de l’aval des rivières souffraient fréquemment de fièvres coliformes apportées par les déjections des communautés établies à l’amont.

Pour améliorer leurs conditions hygiéniques d’existence (on ne disait pas « écologiques » à l’époque), nos anciens ont artificialisé leur espace : agriculture, routes, réseaux sanitaires, maisons avec toiture, vitres, et installations de chauffage, puis usines, lignes électriques, etc. Apparemment, cela n’a pas trop mal marché, à en juger par l’accroissement des populations mondiales et des espérances de vie, y compris dans les pays les moins favorisés économiquement.

Les espèces, quant à elles, se sont adaptées. Quand une autoroute déboise des nids d’implantation de hannetons pique-prune, ceux ci, tout simplement, vont migrer ailleurs. Pourtant, aujourd’hui, des associations d’écologistes peuvent stopper pendant dix ans les travaux d’une autoroute (Tours-Le Mans, en l’occurrence) à cause de quelques souches d’implantations de ces insectes à peine visibles à l’œil nu.

 

L’écologie prétexte coûte cher…

Vouloir empêcher ce mouvement de transformation de l’espace naturel en espace artificialisé avec intelligence, au motif que des espèces « à protéger » s’y trouvent, pour répondre le mieux possible aux besoins d’une humanité qui croît toujours, c’est mettre la nature au dessus de l’Homme, c’est l’empêcher d’améliorer sa coexistence mouvementée avec la nature, et donc ses conditions de vie.

Je pourrais être intarissable sur les inepties que la nouvelle religion biodiversitaire impose à tous les aménageurs de France et d’ailleurs, et sur leur coût pour la collectivité, pour un avantage environnemental imperceptible.

Un exemple : aujourd’hui, la mode est à l’aménagement de crapauducs sous les routes, pour permettre aux grenouilles de traverser sans se faire aplatir. Soit. Visiblement, le taux d’utilisation d’un crapauduc bien implanté n’est pas mauvais. Mais certains observateurs ont remarqué que les hérons avaient parfois repéré ces crapauducs et s’installaient en sortie pour faire de véritables festins. Pour la protection des grenouilles, on a vu mieux.

Réponse des commissions environnementales qui examinent les projets routiers : « il faut munir les crapauducs de dispositifs éloignant les hérons ». Authentique.

Et je ne parle pas de projets routiers annulés parce que passant à moins de 2000 mètres d’un littoral, ou de l’obligation récente de choisir un tracé routier prioritairement en fonction de son faible impact sur la biodiversité de façon prioritaire sur n’importe quel autre critère, notamment la proximité de populations humaines (qui ça ?) où le coût et la difficulté technique.

On marche sur la tête.

L’ensemble des surcoûts liés aux contingences environnementales pour les aménagements routiers neufs, pour ne parler que de ce qui m’est familier, représente au bas mot 30 à 50 % d’augmentation au kilomètre pour une route ordinaire. Sur ce pourcentage, la plus grande partie est liée à des motifs tout aussi frivoles que ceux exposés ci-dessus. Il n’y a aucun calcul économique lié à ces exigences. Pourtant, il devrait être possible d’évaluer la valeur du « mieux-disant écologique » créé par ces surcoûts, et donc de ne retenir que les sujétions présentant un rendement intéressant. Mais ces calculs ne sont jamais effectués.

 

Vous valez moins que du chiendent !

Mais il y a plus grave.

Si une commune classe un terrain vous appartenant en zone protégée, par exemple en espace boisé classé (classement très difficile à défaire), car, par malheur vous y avez laissé pousser quelques arbres un peu vigoureux, alors vous n’avez que vos yeux pour pleurer, la valeur de votre terrain tombe à zéro, et il est très peu probable qu’un juge applique l’article L-160-5 du Code de l’urbanisme (celui qui dit quand un déclassement de terrain peut valoir indemnisation) avec largesse, et vos voies de recours contre une telle « expropriation réglementaire » sont faibles.

De même, si une espèce pour laquelle les écologistes locaux se sont pris d’affection vient à pousser (ou à établir sa nichée, pour les animaux), sur votre champ, malheur à vous. Votre terrain pourra subir les affres d’un des multiples zonages écologiques (N, ND, Natura 2000, etc.) que la bureaucratie a sécrété, et vous devrez passer par les fourches caudines de l’administration pour avoir le droit d’y faire quoi que ce soit.

Bref, dans notre société actuelle, le contribuable paiera bien plus pour quelques plants d’Euphorbe que ce que vous pourrez recevoir comme compensation pour privation du droit d’usage de votre propriété selon vos propres décisions. Dans la France de 2012, le chiendent est mieux protégé que la propriété privée.

Par contre, votre voisin, qui aura laissé son terrain dans un état épouvantable, touchera le jackpot quand, grâce à ses bonnes relations avec la municipalité, voire pire, il verra son terrain déclaré constructible, ce qui, compte tenu de la rareté de ces attributions de faveurs en ces temps de malthusianisme foncier généralisé, permet de multiplier sa valeur par 100 et plus. Votre incitation à détruire l’environnement sur votre propriété avant que la plus petite once d’intérêt environnemental ne soit détectée par les zoneurs écologues est donc maximale.

Et de ce fait, l’environnement trinque. Un exemple hélas dramatique : les incendies qui ont dévasté la forêt grecque à l’été 2007, qui ont tué 84 personnes et détruit l’équivalent d’un demi département français de forêt parfois millénaire, ont été déclenchés par des propriétaires inquiets d’un renforcement des lois sur la protection des espaces boisés… Sans tomber dans ces extrêmes, les exemples de « dégradation préventive » de l’environnement par des propriétaires soucieux de préserver le potentiel constructible ou agricole d’un terrain sont nombreux et largement documentés par des think tanks tels que le PERC.

 

Privatiser la protection de l’environnement pour l’améliorer

Comme l’a fort bien montré le prix Nobel d’économie, Elinor Orstrom, ce sont les institutions fondées sur la propriété privée qui protègent le mieux l’environnement.

En Angleterre et aux USA, des fondations environnementales très puissantes achètent les terrains qu’elles veulent protéger, et édictent sur ces zones des réglementations privées contractuelles, utilisables par les tribunaux contre tout contrevenant. Les lois de l’offre et de la demandent poussent ces associations à s’approprier les terrains les plus prioritaires de leur point de vue.

Quant aux développeurs et aménageurs, l’obligation de ne pas altérer la valeur des terrains protégés de leur voisinage les a longtemps poussé à respecter les normes implicites du moment, lesquelles se sont améliorées au fur et à mesure que le progrès permettait d’éliminer des nuisances jugées auparavant inévitables. Des associations de propriétaires privés, dont certains auront à cœur de préserver une certaine qualité environnementale, et qui seront soumis au principe judiciaire ancestral de responsabilité individuelle, auront une bien meilleure influence sur la qualité de l’environnement que des règlements bureaucratiques et des associations d’écologues subventionnés qui tirent leurs ressources de leur capacité de nuisance à autrui, et des projets de développement gérés par des décideurs publics qui ne jouent pas avec leur argent.

Car telle est la dernière leçon de l’affaire de la ZAC de Perpignan : les décideurs qui ont créé le dommage sanctionné par la justice ne subiront, à titre personnel, aucun désagrément pour leur manque d’aptitude à appliquer la loi.

Certes, là loi est stupide, mais enfin, elle est la loi, et les décideurs publics ne manquent normalement pas de bureaucrates pour leur rappeler les risques qu’ils encourent en ne la respectant pas. En prenant en compte en amont l’existence de cette espèce protégée, ils auraient sans aucun doute réduit la facture finale pour le contribuable, et peut être même amélioré la qualité environnementale globale de leur projet. Mais dans un système où les contribuables subventionnent les défaillances individuelles, il ne faut pas s’étonner que celles ci soient… monnaie courante, ou plutôt fuyante.

—–
Lire également :

Sur le site de l’institut Turgot, les articles de Max Falque constituent une bonne introduction à l’écologie de marché et à la façon dont elle peut résoudre bien des problèmes que la réglementation échoue à traiter correctement.

Sur l’environnement des temps jadis, le volumineux ouvrages de Bjorn Lomborg, L’écologiste sceptique, est un must.

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