L’Europe et la grande peur

Aujourd’hui, l’Europe a peur, une peur quasi-religieuse et obsessionnelle de l’apocalypse annoncée par des prédicateurs d‘une nouvelle Église

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L’Europe et la grande peur

Publié le 27 janvier 2012
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Le chemin qui mena au bien-être et aux facilités dont nous jouissons chaque jour fut balisé d’erreurs, d’errements, d’approximations peu à peu rectifiées et faisant l’objet d’évolutions constantes. Mais aujourd’hui, l’Europe a peur, une peur quasi-religieuse et obsessionnelle de l’apocalypse annoncée par des prédicateurs d‘une nouvelle Église.

Par Jo Moreau

Il fut un temps où chaque catastrophe engendrée par une nouvelle invention induisait des recherches sur les causes du dysfonctionnement, et débouchait sur les perfectionnements et les modifications permettant de les éviter, ou du moins d’en atténuer les conséquences.

Les premiers chemins de fer furent la cause de multiples catastrophes entraînant la mort de nombreux passagers. Déjà à l’époque, les médias se déchaînèrent contre cette « invention du diable » qui affolait les troupeaux. Mais heureusement, les responsables politiques et les industriels ne remirent nullement en cause ce formidable outil de développement.

Que dire de l’application du gaz de houille, au début du XIXe siècle, d’abord nauséabond et dangereux à l’usage, au vu de ses composants très toxiques. Il était produit dans des « usines à gaz », à proximité immédiate des villes dont il éclairait les nuits. Après de multiples améliorations, il fut dans l’après-guerre remplacé par le gaz naturel que nous connaissons aujourd’hui, nettement plus sécurisant. Mais à aucun moment, le principe même de l’usage du gaz ne fut remis en question.

Les premiers avions à réaction commerciaux furent également un dramatique échec. Mais les progrès technologiques découlant de l’étude des épaves des De Havilland « Comet » britanniques qui s’écrasaient permirent ensuite la mise en service de « jets » plus sûrs et plus performants.

On pourrait ainsi multiplier les exemples, car le chemin qui mena au bien-être et aux facilités dont nous jouissons chaque jour fut balisé d’erreurs, d’errements, d’approximations peu à peu rectifiées et faisant l’objet d’évolutions constantes.

Mais aujourd’hui, l’Europe a peur, une peur quasi-religieuse et obsessionnelle de l’apocalypse annoncée par des prédicateurs d‘une nouvelle Église, et cette peur paralyse de plus en plus les différents vecteurs de son dynamisme et de son développement.

Le nucléaire qui nous menace tous, un réchauffement climatique catastrophique provoqué par les activités humaines, des OGM qui nous promettent des mutations monstrueuses, une pollution qui nous étouffe lentement, des gaz de schiste dont l’exploitation va bouleverser notre environnement, des micro-ondes qui nous cuisent à petit feu et j‘en passe. Plutôt que pousser la recherche et débattre sereinement des problèmes pour trouver des solutions, l’Europe, fatiguée de tout et surtout d’elle-même, préfère le renoncement scientifique, politique, économique, moral et culturel.

Nous assistons à une capitulation sur tous les fronts dans un pathétique remake hollywoodien de la chute de l‘empire romain.

Heureusement, on a inventé le merveilleux et hyper-populiste « principe de précaution », destiné à préserver nos malheureuses populations de toutes ces inventions du diable et des innombrables catastrophes qui en sont les conséquences inévitables. Et qui permet au monde politique de surfer sur la vague électoralement rentable de la sécurité à tout prix. Si certaines recherches fondamentales se poursuivent malgré tout, c’est presque honteusement et en toute discrétion.

Et pendant que la Chine prépare la conquête de l’espace avec de nouveaux véhicules spatiaux, l’Europe a construit une avionnette propulsée à l’énergie solaire. Avant de redécouvrir le cerf-volant ? À chacun ses ambitions.

Minuscule Europe sur une carte du monde, que ses renoncements frileux ne pourront cependant protéger des pseudo-dangers qu‘elle redoute tant, entraînée dans un rêve d’avènement d’une société pastorale confraternelle et angélique, nourrie au fromage de chèvre. Un fantasme qui n’aura d’autre issue qu’une paupérisation dramatique de ses populations, et une soumission totale aux autres puissances émergentes partout dans le monde.

Des sociétés qui fondent l’espoir de leur développement sur la confiance en la science pour maîtriser les errances des nouvelles technologies, mais certainement pas sur leur interdiction.

Comme le fit l’Europe dans des temps maintenant révolus, quand elle n’avait pas peur du progrès.

—-
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  • On pourrait appliquer à l’Europe actuelle la phrase de Coluche :
    « la morale devient rigide quand le reste ne l’est plus »

    Cette vieille Europe risque de devenir à terme un parc d’attractions grandeur nature pour le plus grand bonheur des touristes étrangers …

  • L’Europe est confite dans des peurs millénaristes et pour le première fois depuis 500 ans rejette la science et le progrès.

  • « pathétique remake hollywoodien de la chute de l‘empire romain »

    C’est exactement ça. Tellement de confort qu’on en est venu à l’exiger, plutôt qu’à le conquérir ; à tel point que toute innovation est maintenant perçue comme source de danger, vu qu’on n’a plus ni la volonté ni le courage de l’apprivoiser.

    À force de ne plus mourir de froid, de faim, de la grippe… on en est arrivés à ne serait-ce qu’avoir peur de se faire un bleu ou de se casser un ongle. Flippant de connerie…

  • L’explication de cette Europe paralysée par la peur et l’irrationnel, minée par le relativisme moral, démoralisée et en crise généralisée (dette, éducation, insécurité, chômage…) se trouve en partie dans les actions subversives des tenants du marxismes et ça remonte à l’époque de la guerre froide.
    Ces actions ont été délibérée et planifiée par le bloc communiste, avec d’énormes moyens humains et financiers pour infiltrer l’Occident, ce serait étonnant que ça n’ait eu aucun effet, surtout quand on voit comment tous les organes influents de la société, à savoir les médias, les syndicats, les « intellectuels » et l’enseignement ont été noyautés par des marxistes convaincus et jamais repentis (Maurice Duverger, Grand Officier de la Légion d’Honneur avait déclaré en 1964 que « La supériorité technique du mode de production socialiste planifié sur la production capitaliste est un fait massif et incontestable », une propagande ahurissante au regard du destin fatal du communisme mais qui ne choquait personne en France).

    Ceux qui pensent que ça relève de la théorie de la conspiration ou de la paranoïa devraient regarder le témoignage de Bezmenov (alias Tomas Schuman, on trouve ses nombreux écrits et interviews vidéo sur le net), un spécialiste de la propagande et de la manipulation psychologique des foules et… transfuge du KGB. Il expose clairement comment les soviétiques ont planifié la désinformation et l’endoctrinement à l’échelle planétaire, avec l’objectif de convertir l’Occident au marxisme de manière progressive et insidieuse sur plusieurs générations, exemples et résultats concrets à l’appui. Il explique la technique subversive choisie, planifiée en 4 étapes :
    – la démoralisation
    – l’endoctrinement
    – la crise
    – la solution
    Le communisme s’est effondré avant de cueillir le fruit de son travail mais la graine a été plantée et le fruit existe bien, il n’y a qu’à faire l’état des lieux de notre pays et de l’occident en général, on est frappé de constater à quel point la réalité se rapproche des objectifs fixés par les initiateurs de cette guerre de l’ombre (ce que Hayek appelle « la bataille des idées »). Le fait de savoir qu’elle a été planifiée sur le long terme signifie que même si elle s’est terminée faute de combattants, on va en payer les conséquences pour un bon bout de temps.

    Bezmenov donne quand même sa solution pour renverser les vapeurs : revenir aux valeurs traditionnelles qui ont été le socle et l’origine du succès de la civilisation occidentale et que les gauchistes ont cherché pendant des décennies à saboter, avec un succès certain.

    • Votre analyse tient peut-être la route en France, … mais ce pays est noyauté par le « à gauche toute » depuis longtemps. Le progressisme envers et contre tout, le scientisme, l’étatisme, la planification, ce sont des graines qui y ont été plantées bien avant la formation du KGB. À semer des graines de blé dans un champs de blé, ouep, on se retrouve avec du blé (enfin, c’est juste une image : je ne parle de rien de plus que la plante).

      En outre, prenons le contre-exemple des USA : niveau complaisance avec l’endoctrinement moscovite, on a vu mieux (la France, tenez – je vous l’accorde). Pourtant, la folie interventionniste et étato-centrée, elle a fini par bien s’y implanter aussi (passons l’exemple fondateur de la guerre de sécession, n’opposant pas simplement que pro-esclavagage contre pro-apartheid, mais plus fondamentalement pro-autodétermination vs pro-« big government »). La politique keynesianiste, là-bas aussi, ça marche à plein (enfin, ça marche… ça adhère, quoi ; comme les tâches). Les empilements de régulations, les demandes incessantes d’autorisation au Department of [insérez le truc inutile idoine], l’immixtion du « big government » dans autant de domaines qu’il est possible (et même plus : vers l’infini et au delà), la consanguinité industrialo-étato-monétaire, en bref, l’interventionnisme, ça leur est tout sauf étranger (et que ce soit en général un poil moins pire qu’en France, ça ne change pas grand chose à l’affaire).

      Alors, si votre blabla conservateur fait bien mouche sur un ou deux trucs, reste qu’il est loin d’être généralisable ; et que les conservateurs qui versent dans le socialo-étatisme, c’est très loin d’être inédit, y compris au pays de ce bon vieux purgeur de Joseph (McCarty, pas Staline). D’ailleurs, en France, les plus conservateurs, ce sont les socialos : conserver les (faux) « droits » sociaux et autres avantages tous plus indus que farfelus, c’est bien leur motto.

      Faites gaffe, quand vous souhaitez la préservation des valeurs traditionnelles ; ce seront peut-être d’autres traditions que celles auxquelles vous pensiez, qui s’en retrouveront sanctifiées. À utiliser l’argument d’autorité « mes traditions, y a que ça de vrai », vous utilisez les mêmes armes que les socialo-étatistes made-in France (et vous finirez par en devenir un, comme les UMPistes ou les MODEMiens : à combattre le feu par le feu, y a pas, en général, on finit en torche humaine – il y a pire que de se faire battre par son ennemi : c’est de devenir comme lui ; et pire encore, sans même s’en rendre compte).

      Non – la solution pour inverser la vapeur, elle consiste à arrêter de casser les burnes des gens, tout autant que de leur soutenir : si on veut qu’ils se rendent compte que, leurs burnes, elles tiennent toutes seules, sans avoir besoin d’attelles (soient-elles bleu-gland-rouge), et que, étant les leurs, ils sont quand même les mieux placés pour les protéger, il n’y a pas trente-six solutions. La question n’est pas de savoir quelle tradition issue d’un passé, hum, qui appartient au passé, par définition, est la meilleure (sans préjuger de la pérennité des traditions, qui peut bien s’avérer [ou non], si on laisse faire les choses) : la question est d’arriver à rappeler aux gens que la meilleure manière de se sortir de la merde, c’est encore d’être libre de le faire eux-mêmes (et ça, en France, c’est tout sauf ancré dans les traditions majoritairement représentées).

  • le plus curieux c’est que le prophètes du principe de précaution ne l’appliquent qu’aux légumes et aux vaches (« pas d’OGM! ») et surtout pas aux institutions humaines (famille, mariage etc), soigneusement sélectionnées par les humains au cours de l’histoire…

    bref, comme d’ab avec les écolobobos, on applique les grands principes sélectivement en fonction des priorités idéologiques….

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