Les non-dits des primaires républicaines

Les médias savent parfaitement user et abuser du calendrier électoral pour pousser le candidat de leur choix

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Les non-dits des primaires républicaines

Publié le 27 janvier 2012
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Les médias savent parfaitement user et abuser du calendrier électoral pour pousser le candidat de leur choix en prétendant étendre à l’échelle de l’Amérique les résultats d’une consultation partielle dans une poignée d’États fédéraux.

Par Stéphane Montabert, depuis Renens, Suisse

Les républicains Rick Santorum, Mitt Romney et Newt Gingrich, le 19 janvier 2012 à Charleston, en Caroline du Sud.

La « victoire surprise » de Newt Gingrich en Caroline du Nord n’en est une que pour des médias qui font campagne pour Mitt Romney, souffrent d’une ignorance crasse quant au fonctionnement des primaires américaines, ou les deux.

Depuis l’affrontement entre Hillary Clinton et Barack Obama lors des primaires démocrates de 2008 et la couverture quasi-obsessionnelle de l’événement, le grand public européen a une connaissance générale du mécanisme de désignation des candidats aux États-Unis.

Les deux grands partis américains choisissent leurs champions à travers une série d’élections, État par État. Cette année, Barack Obama visant sa réélection, seul le Parti Républicain est concerné. La désignation se déroule entre le début de l’année et l’été pour se conclure lors de la Convention Républicaine, qui aura lieu cette année à Tampa Bay, en Floride, du 27 au 30 août. Cela laisse bien peu de temps aux candidats à l’investiture pour sillonner les 50 États américains. Traditionnellement, le mécanisme de désignation obéit donc à un calendrier serré où les États se succèdent toujours dans le même ordre, évitant qu’un prétendant ne se démène dans le New Jersey pendant qu’un autre écume les routes de l’Utah.

La première désignation a lieu en Iowa à travers un caucus, dès le 3 janvier. La primaire du New Hampshire survient la semaine suivante, puis lui succèdent la Caroline du Sud, la Floride, le Nevada et le Maine. Ce chapelet débouche sur le « Super Mardi » du 6 mars, ou une dizaine d’États organisent leurs désignations simultanément, et où de vraies tendances nationales commencent enfin à se dégager. D’autres dates importantes sont programmées ultérieurement, impliquant plusieurs États en même temps ou des poids lourds électoraux (Texas, Californie), permettant de maintenir un semblant d’intérêt jusqu’à la fin de la course.

Mais le mode d’organisation des primaires permet aussi quelques illusions – pour rester poli. La dynamique en est une. Si vous êtes en tête à la première étape du parcours républicain, on peut s’attendre à ce que les médias parlent de vous. Cela fait de la publicité gratuite, attire les ralliements de donateurs et de militants et peut éventuellement susciter un véritable engouement.

Un candidat à la présidence au moins, Rick Santorum, a tout misé sur ce phénomène. Il a ainsi fait campagne pendant des mois uniquement en Iowa, première étape des primaires. Alors que d’autres candidats levaient des fonds et partageaient leur temps entre différentes régions, lui sillonnait les comtés de l’Iowa et rendait visite à chaque assemblée locale. Ne ménageant pas ses efforts, il comptait sur une victoire décisive lors de cette première étape pour se faire connaître et déclencher un effet boule de neige. Hélas pour lui, la confusion des résultats a perturbé le script du scénario. Rick Santorum s’est retrouvé en tête, mais au coude-à-coude avec Mitt Romney. Même si un nouveau décompte lui a finalement accordé l’Iowa, la clarification est arrivée trop tard pour lui procurer l’exposition dont il avait tant besoin.

Rick Santorum n’a pas été le seul à tenter de tourner l’organisation des primaires à son profit. Les médias savent parfaitement user et abuser du calendrier électoral pour pousser le candidat de leur choix en prétendant étendre à l’échelle de l’Amérique les résultats d’une consultation partielle dans une poignée d’États fédéraux.

En effet, tous les États n’ont pas la même légitimité dans la désignation. Non seulement la force des Républicains est relative – et une communauté politique en minorité ne choisit pas ses représentants de la même façon qu’une autre en majorité – mais l’organisation du scrutin lui-même est sujette à de grandes variations.

Quelle Amérique est favorisée par le calendrier actuel? Au vu du battage médiatique autour de Mitt Romney, pas besoin d’être grand clerc pour deviner. L’Iowa est à gauche depuis 1999 même s’il a tourné casaque (comme une bonne partie des autres États) lors des élections de mi-mandat de 2010: c’est donc un de ces « swing states », un État centriste dont la population peut voter parfois Démocrate et parfois Républicain. Le New Hampshire est encore plus démocrate, il n’a même pas changé de bord à cette occasion.

Le New Hampshire fait également partie de la dizaine d’États pratiquant des primaires ouvertes. Cela signifie que n’importe quel citoyen peut participer à la désignation du candidat républicain, peu importe son affiliation politique. Si les militants démocrates locaux se sont déplacés pour participer aux primaires – et pourquoi s’en priveraient-ils! – sur quel candidat ont-ils porté leur choix, le plus à droite ou le plus à gauche, à votre avis?

Rien d’étonnant donc à ce que Mitt Romney, le plus démocrate des candidats républicains, engrange des succès dans ces premières consultations. Bien entendu, les médias attirent peu l’attention sur cet aspect « technique » des primaires, pourtant lourd de conséquences. 44% des électeurs du New Hampshire participant aux primaires n’étaient ainsi pas inscrits comme Républicains, confirmant la théorie de Rush Limbaugh et Sarah Palin comme quoi Obama (et ses électeurs) préfèrerait s’opposer à Romney, perçu comme le candidat le plus facile à battre en finale.

Au mensonge par omission dans le New Hampshire succéda un mensonge plus flagrant en Caroline du Sud. L’électorat républicain y est suffisamment confiant pour ne pas avoir à soutenir un tiède, mais les médias jouèrent à fond la carte du « peuple américain pour Mitt Romney », n’hésitant pas à accorder à celui-ci une popularité totalement fantaisiste. Le 14 janvier, une semaine avant le vote, ils créditaient encore leur poulain de 37% d’intention de vote contre seulement 12% pour Newt Gingrich. Répétant la partition si bien jouée en 2008 avec John McCain (un autre républicain centriste lui aussi poussé par les médias pour échouer en fin de parcours) Mitt Romney allait l’emporter. Avec trois victoires de suite, les primaires républicaines seraient quasiment jouées.

L’effet de ces sondages pipés est loin d’être anodin. Ils démobilisent les partisans qui ne soutiennent pas le favori: dans un scrutin majoritaire, il faut avoir la foi chevillée au corps pour aller voter en sachant le résultat joué d’avance. De plus, la Caroline du Sud pratique elle aussi les primaires ouvertes! Tout était donc en place pour favoriser l’influence des Démocrates locaux votant naturellement pour Romney.

Contre toute attente, la manœuvre a échoué, et dans les grandes largeurs. « L’archi-favori Mitt Romney » s’est pris les pieds dans le tapis en ne récoltant que 26% des suffrages, contre 40% pour « le revenant » Newt Gingrich, un Républicain nettement plus à droite. Le scénario à la McCain ne s’est donc pas répété.

Bien qu’Obama fasse comme si, l’Amérique de 2012 n’est pas celle d’il y a quatre ans. La naïveté est une faiblesse dont on guérit rapidement. Un certain nombre de citoyens ont compris les manœuvres dont ils faisaient l’objet et en ont pris de la graine. Nous en aurons la démonstration lors du scrutin en Floride le 31 janvier. Toutes les caractéristiques sont réunies pour un test électoral réellement significatif : un État peuplé, important sur le plan fédéral, organisant des primaires où seuls les membres du Parti Républicain peuvent voter.

Je ne suis pas loin de penser que, quels que soient les sondages qui prétendent le contraire, Mitt Romney pourrait y finir troisième derrière Newt Gingrich et Ron Paul, un résultat qui briserait pour de bon le mythe de « l’Amérique pour Romney » monté de toutes pièces par les médias.

Mais ceux-ci ont d’autres tours dans leur sac. Affaire à suivre…

—-
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  • Sérieux, c’est quoi cette article, oui Romney est le chouchou des médias mais de là à tomber dans la théorie du complot, c’est petit, oui il y a des jeu d’intérêt dernière la campagne mais les sondages « dans les grandes lignes » correcte.

    Et vous avez regarder les sondage à la sortir des urnes? C’est 99% sûr cela, et bien une grand partie des électeurs se sont prononcé au dernier moment en Caroline du Sud, la victoire de Gingrich n’est du qu’à sa performance dans le débat précédent se scrutin. Sinon en dehors de cela Gingrich n’a aucun soutient sérieux (pas de financement, ni de supporteur), il est normal qu’il n’a pas des scores important, ces scores sont uniquement du au fait qu’il n’y a aucun autre concurrent face à Romney (sauf Paul mais c’est un peu particulier, il sera LE concurrent de Romney mais d’ici quelque semaine).

    Note: Avec toute les casseroles que Gingrich traîne c’est un miracle qu’il n’est pas encore été forcé de quitté la course, miracle que ces qualité de débatteur explique en grand partie (bad miracle).

  • excellente explication !

    à poursuivre

    merci

  • Ron Paul père du gouverneur de Floride ??? Rand Paul, fils de Ron est…Sénateur…du Kentucky.
    L’actuel gouverneur de Floride s’appelle Rick Scott, et a 60 ans…

    • Effectivement trop d’erreurs de base qui montrent que l’auteur connait très mal le sujet !
      « une poignée d’états fédéraux » : il n’y a qu’un état fédéral aux Etats-Unis
      « Ron Paul père du gouverneur de Floride » : il fallait l’inventer

  • Article ridicule, la victoire de Newt vient du débat et de sa merveilleuse défense face au rumeurs. De plus, Obama aurait plus de mal contre Romney que Gringrich, essentiellement auprès des classes moyenne, Mitt étant plus rassembleur

    • Il faut avoir été véritablement lobotomisé par les médias pour gober sans ciller leur pitoyable explication.

      Que le passage de Gingrich à l’antenne ait été réussi, je n’en doute pas. Mais justifier ainsi le transfert de 28% des intentions de vote de l’électorat en une semaine, c’est juste grotesque. Rien que ces hypothèses sont extrêmement insultantes pour l’électorat (républicain), donnant l’impression d’une girouette capable de changer de poulain sur un bon mot.

      Transposé en France, cela revient à accepter l’idée qu’en France, un débatteur habile se retrouverait en tête du premier tour de l’élection présidentielle simplement en parlant bien au cours d’une émission.

      Avons-nous seulement une idée de l’audience dudit débat? A-t-il eu quoi que ce soit de réellement homérique genre cafouillage fatal de Romney? Bien sûr que non.

      Mais bon, pour justifier l’écart entre les estimations fantaisistes et la réalité sortie des urnes, il fallait bien une explication, quitte à la faire jaillir du chapeau.

      Vous avez tout gobé, bravo.

      Ah, je pense que M. Gingrich va aussi briller à la télé en Floride. J’en suis sûr à 200%, parce qu’il parle bien, mais parce qu’il faudra bien trouver une explication à son avance sur les autres…

      • Et dire que Romney a été le chouchou des médias qui n’ont vu arriver personne d’autre est une blague ! Il y a eu pas moins de 3 ou 4 prétendants (Perry, Cain, Gingrich…) qui à leurs yeux ont fait la course en tête à des moments différents durant la campagne… Ca ne faisait qu’une ou deux semaines qu’ils « chouchoutaient » Romney et les deux derniers jours, 6 sondages différents ont fait état du retournement de situation en Caroline du Sud.
        Je suis le premier à critiquer le traitement de l’information que font les mainstream media et la crédibilité des sondages, mais votre théorie du complot est exagérée, paranoïaque et peu crédible. Quand on voit les erreurs de base que vous faites dans votre article, on se demande bien comment vous pouvez être à la fois si peu renseigné et développer des théories aussi compliquées tout seul..
        Avant de vous intéresser aux « non-dits », commencez par apprendre les « dits », à savoir : Ron Paul n’est pas le père du gouverneur de Floride, entre autres.

        • Pourquoi parler de complot? Croyez-vous que je pense que quelques types mystérieux se sont réunis dans une salle obscure pour décider que ce serait Romney?

      • Il suffit de voir un débat républicain pour se rendre compte que Ron Paul n’est pas Black-Listé.
        Vous savez Mr. Montabert, je trouve ça triste de dire que vos lecteurs sont « lobotomisé » s’ils ne sont pas d’accord avec vous. Dommage, pour une fois que quelqu’un parlait de la primaire républicaine, on aurait attendre un article de fond, sur le changement provoqué par l’arrêt de la Cour Suprême en 2010 sur les « PAC ».
        Au lieu de ça, vous expliquez que les médias soutiennent un candidat en particulier (ce qui est au fond étrange), et vous occultez totalement le soutien que Perry à apporté a Newt, chose qui peut avoir une (légère) importance.

      • Sinon, Romney a refusé de publier sa feuille d’impôts la semaine précédant le scrutin. Comment aurait il pu gagner?
        Il a dit avoir gagné peu d’argent en 2011 grâce à ses discours, vérification faite, il a gagné juste « 400 000 » dollars. Comment aurait il pu gagner?
        La Caroline du Sud est un état religieux et Santorum a insisté sur les position qu’a pu avoir Romney sur l’avortement. Comment aurait il gagner?
        Ensuite, il y a eu deux débats dans la semaine. Newt y a été bien meilleur, sa réponse sur sa femme (« Utiliser mon ex-femme à deux jours de la primaire est proche de la chose la méprisable que je puisse imaginer ») est à montrer dans tout les cours de Science Politique. Son attaque contre les médias est un modèle du genre.
        Les gens ont peut etre décidé qu’il valait mieux voter pour le candidat avec qui il partage le plus de conviction et non plus celui qui aura le plus de chance de vaincre Barack.

  • Effectivement, quand je vois tous les médias répéter comme un perroquet que Gingrich est un excellent débatteur et que, oh miracle, ses talents oratoires lors d’un seul débat (où il avait à s’expliquer, brillamment dit-on, comment il a pu tromper sa seconde femme pendant aussi longtemps, ouh hou !!!) l’ont propulsé à 40% en Caroline du Nord, j’ai tout de suite mon alarme anti-foutage de gueule qui sonne. Quand on voit le black-out scandaleux sur Ron Paul, il faut être complètement lobotomisé pour croire que les médias ont encore une quelconque déontologie journalistique pour nous rapporter les faits sans les déformer.

    C’est d’autant plus drôle que ceux qui reprennent sur le ton de la Vérité si Je Mens ce mythe du super-Gingrich n’ont jamais visionné un seul débat de Gingrich, notamment quand Ron Paul est là et ne comprennent peut-être même pas un traitre mot d’anglais. Mais visiblement, il suffit de répéter assez souvent un mensonge, aussi gros soit-il pour que ça devienne vérité.

  • Au final, vous vous êtes trompé sur la Floride. Pourquoi ne pas le dire? pourquoi ne pas avoué que vous vous êtes trompé et que vous n’aviez pas les connaissances requises sur le sujet ?
    C’est dur d’avouer ses erreurs mais ça fait un bien fou, je vous le promets.

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