Présidentielle 2012 : le vrai vainqueur ne sera pas celui qu’on croit

Personne ne peut prédire à ce jour qui sera le prochain président. Mais cela importe finalement assez peu

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Vote élection (présidentielle 2007 en France) (Crédits : Rama, licence Creative Commons)

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Présidentielle 2012 : le vrai vainqueur ne sera pas celui qu’on croit

Publié le 22 janvier 2012
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Vendredi dernier, le triple A de la France a été dégradé par l’agence Standard & Poor’s. Une annonce qui donne un indice supplémentaire concernant l’identité du vrai vainqueur de la prochaine élection présidentielle.

Article publié en collaboration avec In Eco Veritas

Vote élection (présidentielle 2007 en France) (Crédits : Rama, licence Creative Commons)
Vote élection (présidentielle 2007 en France) (Crédits : Rama, licence Creative Commons)

Il faut bien l’avouer : la France et les États-Unis n’ont pas l’habitude de jouer dans la même catégorie. Principalement parce que les Américains sont souvent  devant. Mais il est désormais une catégorie qui les rassemble. Depuis le 13 janvier dernier, la France a rejoint l’Amérique dans le groupe peu glorieux des pays dégradés par les agences de notation après que Standard & Poor’s a retiré le triple A français.

Cette annonce n’avait rien d’une surprise et avait été largement précédée sur les marchés par une augmentation des taux d’intérêt auxquels emprunte l’Hexagone, et ce depuis plusieurs mois déjà. Sans être une surprise, cette nouvelle constitue néanmoins un sérieux revers pour Nicolas Sarkozy, qui avait mis un point d’honneur à défendre l’excellence de la note française. Mieux, il avait fait du triple A un “trésor national”. Aujourd’hui, ces promesses ressemblent plus à une charge de Don Quichotte contre des moulins à vent. Incantatoires, mais vaines. En dépit d’une première série de mesures d’austérité pour calmer les investisseurs, le signal est désormais clair : il faut faire plus.

Jusqu’à présent, en France, l’austérité s’est traduite principalement par une augmentation des impôts. Certains n’ont pas manqué de souligner la contradiction politique pour Nicolas Sarkozy et son gouvernement qui s’étaient engagés, jusqu’à une date encore récente, à ne pas alourdir le poids de la fiscalité. Mais qui se préoccupe encore des promesses passées ? La France se débat toujours avec un imposant déficit et son niveau d’endettement, presque équivalent au PIB annuel de l’Inde, poursuit une irrésistible croissance. Le chômage s’élève à 9,3% et la croissance n’a atteint les 1,7% qu’avec peine en 2011. La priorité du gouvernement semble être désormais de sauver le vieux navire de l’État providence français, sans brûler trop de soutiens politiques.

Le débat pour la croissance se fait attendre

En tant que responsable politique de droite assumé, Nicolas Sarkozy s’est montré étonnamment timide dans sa volonté de reformer le pays. C’est la grande différence qui l’oppose au Premier ministre britannique David Cameron que le concept de “Big Society” a poussé à réaliser d’importantes coupes dans les effectifs de la fonction publique et à poursuivre la privatisation de pans entiers du secteur étatique. Le Président français a échoué à stimuler l’économie du pays. Mais il y a plus : la relance de la croissance n’a jamais semblé aussi absente du débat public.

C’est là où le bât blesse. Les entreprises françaises continuent d’être fortement pénalisées par un coût élevé du travail, principalement en raison du fardeau que représentent les charges sociales. Le Code du travail, un pavé de 2700 pages, constitue encore et toujours un puissant frein à l’introduction de flexibilité sur le marché de l’emploi. A l’école, et a fortiori dans l’esprit de beaucoup de Français, les entreprises sont encore associées à des lieux d’aliénation plutôt que comme un tremplin permettant à l’individu de s’épanouir. Et que dire des dépenses de l’État — 56% du PIB ­— qui pèsent lourdement sur la vitalité de l’économie dans son ensemble ? Cinq ans après l’élection de l’actuel locataire de l’Élysée, le chantier pour libérer la croissance en France reste à entreprendre. La tâche n’est certes pas aisée, étant donné la force du corporatisme qui immobilise le pays depuis déjà de longues années.

Cela explique peut-être pourquoi, à trois mois du scrutin, la campagne présidentielle semble si insipide et discrète. Les enjeux essentiels n’y sont pas abordés. Revenons en 2007, souvenons nous de cet indicible espoir qui avait bouleversé les Français à l’issue du règne finissant de Jacques Chirac. Les candidats, Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy en tête, avaient réussi à capter l’attention des électeurs et à insuffler une incroyable énergie dans la campagne. Signe qui ne trompe pas, l’abstention s’y était révélée particulièrement basse par rapport aux précédentes élections et Nicolas Sarkozy jouissait d’une forte popularité une fois élu. Aujourd’hui, il est l’un des présidents les plus impopulaires de la Ve République.

Des marges politiques étroites

Dans un tel contexte politique, une chose est sûre : le prochain président aura à remplir une mission incroyablement  difficile pour assainir ces écuries d’Augias que sont les finances publiques. Politiquement, l’exercice sera impopulaire et économiquement risqué. Et il n’y a pas pire perspective pour un homme politique. Parmi les candidats, aucun ne semble susciter de réel enthousiasme. Cette semaine, François Hollande a d’ailleurs annoncé qu’il ne pourrait pas appliquer intégralement son programme en raison du contexte économique.

Les partis aux extrémités de l’échiquier politique ne semblent pas liés par de tels considérations. Pour le Front de Gauche, comme pour le Front national, les solutions sont simples, mais hélas incroyablement démagogiques. La réalité de la dette et des déficits publics leur semble insignifiante, car ils pensent pouvoir mettre en coupe réglée chaque millimètre de l’économie. C’est une immense erreur. Si leurs chances d’être élus sont faibles, ils devraient néanmoins recueillir un nombre inhabituellement élevé de votes. Signe du désarroi qui a gagné la population.

Quant aux partis modérés, PS et UMP, ils n’ignorent pas que les marges de manœuvre pour gouverner seront ténues. Ils devront réduire les dépenses de l’État et repenser les fondements même de l’intervention publique s’il veulent convaincre les investisseurs de la fiabilité financière de la France.

Bien évidemment, personne ne peut prédire à ce jour qui sera le prochain président. Mais cela importe finalement assez peu. En l’absence de réformes pour la croissance, le vrai vainqueur de l’élection sera l’austérité.

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Sur le web
Version française de l’article paru sur le site du Huffington Post le 19 janvier 2012.


 

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