Hayek et l’épuisement des ressources naturelles

Hayek, l’un des plus grands penseurs en sciences sociales, a examiné brièvement, mais de façon convaincante, les questions des ressources naturelles

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Hayek et l’épuisement des ressources naturelles

Publié le 3 janvier 2012
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Hayek, l’un des plus grands penseurs en sciences sociales du 20ème siècle, a examiné brièvement, mais de façon convaincante, les questions des ressources naturelles.

Par Robert Bradley Jr. (*)

« L’épuisement des ressources naturelles » a été le refrain partagé par les intellectuels et les décideurs politiques depuis le début de l’industrie pétrolière. L.C. Gray (1913) et Harold Hotelling (1931) ont développé l’approche en termes de fixité de stock et d’épuisement des énergies fossiles qui a littéralement balayée la profession des économistes, tout comme la présidence de Jimmy Carter, durant les années 1970 troublées par les réglementations.

Rappelez-vous les jérémiades formulées par James Schlesinger, le Secrétaire à l’énergie du nouveau Department of Energy de Carter: « Nous sommes face à un cas classique malthusien de croissance exponentielle avec une source d’énergie finie. » Et Amory Lovins se devait de conclure en toute confiance:

Toutes les ressources de pétrole et de gaz doivent être soigneusement ménagées – c’est-à-dire extraites le plus tard et le plus lentement possible. Nos descendants nous en seront reconnaissants. Nous aussi, nous avons besoin de tracer un long chemin vers l’avenir.

Mais dans les années 80, nous sommes revenus à des conditions de surplus de pétrole et de gaz. Ce qui a permis aux voix perdues d’Erich Zimmermann et M.A. Adelman, mais aussi celle nouvelle de Julian Simon, de trouver leur public.

La conservation planifiée (ou le conservationnisme)

La vision malthusienne de l’appauvrissement du monde soulevait la question de savoir quel était le « bon » profil de consommation, ce qui impliquait inévitablement l’intervention du gouvernement pour corriger les « défaillances du marché » de la prétendue surproduction/surconsommation. Faisons entrer F.A. Hayek (1899-1992), l’un des principaux critiques du siècle de la planification gouvernementale.

Dans The Constitution of Liberty (1960), Hayek analysait « la nécessité d’une gestion centralisée de la conservation des ressources naturelles », une perspective qui était « particulièrement forte aux États-Unis, où le « mouvement pour la conservation » était d’une certaine façon la source de l’agitation pour la planification économique et contribuait beaucoup à l’idéologie indigène des réformateurs économiques radicaux ». [1]

Sans nier que l’erreur économique pouvait produire des déchets réels due à la « consommation de ressources irremplaçables », Hayek nous prévenait qu’il y avait peu de chance que le gouvernement possède la connaissance des conditions futures de prix et de rareté lui permettant d’imposer la « bonne » solution.

L’abondance créative

Tout en parlant de fixité, l’analyse dynamique de Hayek insistait pour considérer l’ensemble des ressources, et non pas ses parties.

Toute ressource naturelle représente un seul élément de notre patrimoine total des ressources épuisables, et notre problème n’est pas de préserver ce stock d’une façon particulière, mais de le maintenir toujours dans un état qui permettra sa contribution la plus désirable au revenu total, écrivait-il. L’existence d’une ressource naturelle particulière signifie simplement que, tant qu’elle dure, sa contribution temporaire à nos revenus nous aidera à en créer de nouvelles qui pareillement nous aideront dans le futur.

Cette vision « d’abondance créative » était la pièce manquante pour échafauder une alternative convaincante à la perspective de l’épuisement des ressources. Hayek avait touché du doigt quelque chose de plus grand qu’il ne l’avait réalisé – du moins jusqu’à ce qu’il découvre le travail de Julian Simon, auquel Hayek a adressé sa première lettre d’admirateur.

Le problème de la circularité argumentative

Hayek avait remarqué un problème de circularité dans l’argument de la conservation – planification: la consommation différée était encore un approvisionnement perdu pour l’avenir.

Citant un autre économiste (Anthony Scott), Hayek pointait l’ironie de la situation : « le défenseur de la conservation de l’environnement qui nous exhorte « à faire davantage de réserves pour l’avenir » sollicite, en fait, de moindres réserves pour la postérité. »

En d’autres termes, la consommation devait être évitée indéfiniment, et non pas simplement reportée à de futures échéances, sinon ce n’était pas de la conservation de ressources naturelles. Aussi, cette perspective créait une perpétuelle non-utilisation des ressources dans le présent – autrement dit une impossibilité.

Conclusion

F.A. Hayek a été l’un des plus grands penseurs en sciences sociales du 20ème siècle et a brièvement examiné, mais de façon convaincante, les questions de ressources naturelles, de même que d’autres économistes de l’école autrichienne tels que Ludwig von Mises, Murray Rothbard (voir mon article Resourceship: An Austrian theory of mineral ressources). Mais les idées de Hayek à propos de la conservation des ressources naturelles continuent d’éclairer le débat public actuel en matière de politique des énergies fossiles et des autres ressources « fixes ».

—-
Sur le web
Traduction : JATW pour Contrepoints.

Note :
[1] Comme l’ont fait d’autres économistes de l’époque, Hayek a défini la conservation des ressources naturelles par sa préservation plutôt que par son utilisation plus efficace ou plus « durable ». Cette dernière appellation étant l’usage courant aujourd’hui. J’expose l’évolution du sens de la conservation des ressources naturelles sur internet dans mon appendix, The Rise of Conservation Economics [La naissance de l’économie de la conservation].

(*) Ce billet est une adaptation d’un passage de mon livre intitulé Capitalism at Work: Business, Government and Energy (éditeur Scrivener Press: 2009), pp 215-16, 390.

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