L’Amérique au chevet de l’Europe: un nouvel échec programmé?

Le recours à la création de nouveaux dollars pour alimenter le marché européen est une énième manœuvre qui échouera comme les autres

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

L’Amérique au chevet de l’Europe: un nouvel échec programmé?

Publié le 19 décembre 2011
- A +

Le recours à la création de nouveaux dollars pour alimenter le marché européen n’est qu’une solution de court terme et ne résout en aucun cas les problèmes structurels des différents pays membres.

Par Cécile Philippe
Article publié en collaboration avec l’Institut Économique Molinari

Au fur et à mesure que la crise s’intensifie en Europe et que les pays touchés sont de plus en plus nombreux – Irlande, Grèce, Espagne, Portugal et même la France –, l’Euro devient une monnaie risquée ainsi que les actifs dénommés en Euro. Si bien que les banques européennes ont de plus en plus de mal à se faire mutuellement confiance et à se prêter des fonds les unes aux autres. Le gel durable du marché interbancaire fermerait le robinet des crédits au secteur privé (entreprises et particuliers) et entraînerait tous les pays de la zone euro dans une récession durable.

Face à ce problème, la dernière thérapie de choc a été proposée par la Fed (la Banque centrale américaine) afin de rendre le dollar accessible à un coût très faible et ainsi récréer de la liquidité sur un marché européen en passe d’en manquer.

Ce procédé est d’autant plus adapté et efficace que le dollar est la monnaie de réserve internationale. Il y a d’ailleurs plus d’échanges effectués dans le monde dans cette monnaie que dans n’importe quelle autre monnaie (y compris l’Euro). Ensuite parce que l’Euro, du fait de menaces qui pèsent sur un certain nombre d’États-membres de la zone euro, n’inspire plus la même confiance qu’avant.

La pression sur le dollar a donc été très forte au cours des derniers mois au point qu’il était devenu difficile de s’en procurer sur le marché à un coût relativement faible, notamment via le marché interbancaire ou auprès des fonds monétaires américains. Une solution aurait été de faire appel directement à la Banque centrale européenne pour s’y fournir en dollar mais les banques commerciales qui auraient procédé de la sorte auraient immédiatement été stigmatisées. De plus, la BCE ne dispose pas d’une quantité sans limite de dollars et n’a pas non plus les moyens d’en imprimer directement.

Ainsi, afin de répondre au manque de liquidités sur le marché européen, la Fed en accord avec la BCE et les Banques centrales d’Angleterre, du Japon, du Canada et de la Banque nationale suisse a mis au point un procédé par lequel elles peuvent se procurer des dollars à bas prix.

Cette dernière a en effet accepté de créer des dollars et ainsi baisser drastiquement (0,5%) le taux d’intérêt perçu pour un échange dollars contre euros (ce qu’on appelle un swap). La BCE, notamment, a ainsi pu mettre à disposition des banques commerciales du dollar à bon marché (parce que produit en plus grande quantité).

À court terme au moins, la manœuvre semble avoir remporté un franc succès, en particulier parce que l’action concertée des Banques centrales a envoyé le signal aux marchés qu’elles étaient prêtes à appuyer sur la pédale de la création monétaire si nécessaire. Cela a suscité un véritable « rally » sur les marchés financiers qui voyaient le Dow Jones bondir de 4,23% le 30 novembre dernier et le CAC 40 grimper de 3%. L’Euro regagnait ainsi quelques points aux dépens du dollar (rendu moins cher par la politique de la Fed) et in fine la confiance semblait revenir au sein de la zone euro.

Les festivités risquent cependant d’être de courte durée. On peut déjà noter des tensions très fortes sur les marchés. En effet, si à court terme l’action des Banques centrales a pu redonner un brin de confiance aux investisseurs et a permis d’accroître la liquidité au sein de la zone, cette opération n’a en aucun cas résolu les problèmes structurels des différents pays membres.

Au contraire, le recours à la création de nouveaux dollars pour alimenter le marché européen suscitera des pressions à la hausse des prix et la question de la solvabilité de pays comme l’Italie, l’Espagne, le Portugal ou la France reste entière. Plus précisément, la valeur des actifs des banques européennes reste obscure et le danger de faillites en cascade est loin d’être écarté. En refusant de voir que le problème de la zone euro n’est pas un problème de liquidité mais de solvabilité, les pouvoirs publics gagnent certes un peu de temps à chaque fois mais ne le mettent pas à profit pour réduire drastiquement les dépenses publiques et déréglementer en priorité le marché du travail.

—-
Sur le web
Texte d’opinion publié sur 24hGold le 14 décembre 2011.

Voir le commentaire (1)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (1)
  • En fait, cela ressemble à une incitation à du surendettement souverain => comme les Etats sont submergés par leur endettement, on leur donne une « carte de crédit », à savoir ces nouveaux dollars bon marchés … et on renforce ainsi la spirale…. Quel aveuglement ! Quelle irresponsabilité ! A quand un véritable humanisme fondé sur le libéralisme (et le christianisme => voir #CharlesGave « Un libéral nommé Jésus ») ?!

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Charles-Henri Colombier est directeur de la conjoncture du centre de Recherche pour l’Expansion de l’Économie et le Développement des Entreprises (Rexecode). Notre entretien balaye les grandes actualités macro-économiques de la rentrée 2024 : rivalités économiques entre la Chine et les États-Unis, impact réel des sanctions russes, signification de la chute du PMI manufacturier en France, divergences des politiques de la FED et de la BCE...

 

Écarts économiques Chine/États-Unis

Loup Viallet, rédacteur en chef de Contrepoints... Poursuivre la lecture

Les monnaies suivent les civilisations depuis 3000 ans, elles sont des créations humaines, et pourtant elles restent des ovnis. Leur rôle est de permettre l’échange de biens à travers un support capable de « cristalliser » de la valeur dans le temps, une sorte de confiance palpable.

S’il est compliqué de définir une monnaie, c’est parce que nous avons utilisé des centaines de monnaies différentes qui n’ont rien de commun, à part être une monnaie. Et aucune d’entre elles n'entre dans les critères d’Aristote : unité de compte, réserve de... Poursuivre la lecture

Le sommet des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) s'est achevé sur une invitation à rejoindre le groupe adressée aux Émirats, à l'Égypte, à l'Iran, à l'Arabie saoudite, à l'Argentine et à l'Éthiopie.

Le sommet a fait couler beaucoup d'encre quant à l'impact de ce vaste groupe de nations, y compris des spéculations sur la fin du dollar américain en tant que monnaie de réserve mondiale si ce groupe est perçu comme une menace pour les États-Unis, ou même pour le Fonds monétaire international.

Plusieurs points doiv... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles