Faut-il créer une Autorité publique mondiale face à la crise ?

Commentaires sur le document que vient de publier le Vatican concernant la crise financière actuelle

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Faut-il créer une Autorité publique mondiale face à la crise ?

Publié le 27 octobre 2011
- A +

Le Vatican vient de publier un document d’analyse de la crise financière qui propose la création d’une Autorité publique mondiale qui serait au service du bien commun. Que faut-il en penser?

Par Damien Theillier, président de l’Institut Coppet
Article publié en collaboration avec l’Institut Coppet

Le Conseil pontifical Justice et Paix a publié ce lundi 24 octobre, une note intitulée : « Pour une réforme du système financier et monétaire international dans la perspective d’une autorité publique à compétence universelle ».

L’objectif est de proposer la création d’une Autorité publique mondiale qui serait au service du bien commun.

Pour le Saint-Siège, il s’agit du seul horizon compatible avec le contexte actuel. Le Conseil entend offrir une contribution aux responsables de la planète et à tous les hommes de bonne volonté face à la crise économique et financière qui a révélé – souligne le texte – des comportements d’égoïsme, d’avidité collective et d’accaparement des biens à grande échelle.

Extrait n°1 :

Au cours des dernières décennies, ce sont les banques qui ont fixé le crédit, celui-ci engendrant ensuite la monnaie qui, à son tour, a demandé une ultérieure expansion du crédit. De sorte que le système économique a été poussé vers une spirale inflationniste qui, inévitablement, s’est trouvée limitée par le risque pouvant être supporté par les instituts de crédit qui se trouvaient soumis au danger ultérieur de faillite, avec des conséquences négatives pour l’ensemble du système économique et financier.

Après la deuxième guerre mondiale, les économies nationales ont progressé, bien qu’avec d’énormes sacrifices de la part de millions et même de milliards de personnes qui, par leur comportement, en tant que producteurs et entrepreneurs d’une part, et de consommateurs et épargnants d’autre part, avaient eu confiance en un développement progressif et régulier de la monnaie et de la finance dans la ligne des potentialités de croissance réelle de l’économie.

À partir des années 90 du siècle dernier, on constate que la monnaie et les titres de crédit au niveau mondial ont augmenté plus rapidement que la production des revenus, et ce également pour les prix courants. Ce qui a provoqué la formation de poches excessives de liquidité et de bulles spéculatives, transformées ensuite en une série de crises de solvabilité et de confiance qui se sont diffusées et suivies dans les années suivantes.

Une première crise a sévi dans les années 70, jusqu’au début de la décennie suivante, en rapport avec les prix du pétrole. Puis, ce sont les pays en voie de développement qui ont connu toute une série de crises. Il suffit de penser à la première crise que le Mexique a vécue dans les années 80, à celles du Brésil, de la Russie et de la Corée, puis à nouveau du Mexique dans les années 90, de la Thaïlande et de l’Argentine.

La bulle spéculative sur les immeubles et la crise financière récente ont la même origine dans le montant excessif de monnaie et d’instruments financiers au niveau mondial.

Jusque-là, on ne peut qu’applaudir à un diagnostic tout à fait convaincant du mal monétaire et financier dont nous souffrons. Le texte semble prometteur.

Extrait n°2 :

Une orientation de style libéral – réticente à l’égard des interventions publiques dans les marchés – a fait opter pour la faillite d’un institut international important, en pensant ainsi pouvoir limiter la crise et ses effets. Ce qui, hélas, a entraîné la propagation du manque de confiance, qui a induit des changements soudains d’attitudes réclamant des interventions publiques sous différentes formes et de vaste portée (plus de 20 % du produit national) afin de tamponner les effets négatifs qui auraient emporté la totalité du système financier international.

La Banque Fédérale américaine… une institution libérale ? Hélas, on retrouve ici, sous la plume du Vatican, l’un des plus grands poncifs de ce début de XXIe siècle. La Banque Fédérale est un organisme d’État chargé d’appliquer la politique monétaire du pays. Qu’il soit indépendant de l’administration en place ne signifie pas qu’il s’agisse d’un organisme privé. Il s’agit bien au contraire de la plus grosse machine à réglementation monétaire, c’est elle qui fixe les taux de l’argent et qui fait marcher la planche à billets.

Extrait n°3 :

En 1991 déjà, après l’échec du collectivisme marxiste, le bienheureux Jean-Paul II avait mis en garde contre le risque d’« idolâtrie » du marché qui ignore l’existence des biens qui, par leur nature, ne sont et ne peuvent être de simples marchandises.

Commentaire de Thomas Woods, du Mises Institute :

On nous a assuré que les économistes les meilleurs et les plus brillants dirigeaient la Fed. Ce sont des gens qui nous ont dit que la hausse des prix des logements était adossée à des fondamentaux solides. Alan Greenspan a dit aux gens d’acheter à taux variables. Ben Bernanke a déclaré en 2006 que les prêts hypothécaires étaient sains. Et ainsi de suite… Chaque fois que la hausse des taux pouvait décourager la folle spéculation immobilière, la Fed a maintenu des taux faibles. En d’autres termes lorsque le marché essayait d’allumer les feux rouges, la Fed les mettait tous au vert.

Si nous avions vraiment été les promoteurs de « l’idolâtrie du marché », nous aurions écouté le marché. Au lieu de cela, les autorités centrales ont masqué ce que le marché essayait de nous dire. L’idolâtrie ne vient pas du marché, mais des banques centrales, les sources institutionnalisées de l’aléa moral et de l’instabilité financière dans le monde. (L’aura d’infaillibilité et le culte de la personnalité entourant les présidents de la Fed font du langage de l’idolâtrie une pure et simple poésie).

Par la suite, le document attaque violemment le libéralisme, accusé d’être à l’origine de la crise. Pourtant, comme le fait remarquer Jeffrey Tucker, « il n’y a rien dans le libéralisme à l’ancienne (c’est-à-dire dans le soutien au marché libre) qui approuve la « liberté » d’émettre du papier et d’appeler cela de l’argent. Au contraire, le libre marché est fortement réglementée par des lois naturelles. La seule liberté des banques est de fonctionner comme des entreprises normales. Celles qui font de l’expansion monétaire sans limite finissent toujours par mourir et celles qui maintiennent des finances saines  finissent par prospérer. »

Extrait n°4 :

Sur le chemin vers la construction d’une famille humaine plus fraternelle et plus juste et, avant encore, d’un nouvel humanisme ouvert à la transcendance, l’enseignement du bienheureux Jean XXIII semble particulièrement actuel. Dans la Lettre encyclique prophétique Pacem in terris de 1963, il observait que le monde s’acheminait vers une plus grande unification. Il prenait donc acte du fait que, dans la communauté humaine, venait à manquer la correspondance entre l’organisation politique «sur le plan mondial et les exigences objectives du bien commun universel». Aussi souhaitait-il que soit un jour créée «une Autorité publique mondiale».

Face à l’unification du monde conciliée par le phénomène complexe de la mondialisation, et face aussi à l’importance de garantir, outre les autres biens collectifs, celui représenté par un système économique et financier mondial libre, stable et au service de l’économie réelle, l’enseignement de Pacem in terris apparaît aujourd’hui encore plus vital et digne d’être concrétisé de façon urgente.  Dans le sillage de Pacem in terris, Benoît XVI aussi a exprimé la nécessité de constituer une Autorité politique mondiale.

Une question demeure toutefois : comment une telle autorité mondiale serait-elle exonérée des erreurs et de l’orgueil des représentants des gouvernements et des banques centrales nationales ? Par quel miracle cette autorité mondiale échapperait-elle à l’aveuglement des autorités locales ?

L’autorité politique mondiale en question aurait les défauts qui ont depuis longtemps été analysés par les grands auteurs libéraux :

– Lord Acton : un tel pouvoir corromprait les hommes qui en seraient chargés ;
– Friedrich von Hayek : la concurrence politique pour ce pouvoir attirerait les hommes les plus corrompus ;
– Ludwig von Mises : même un honnête homme qui résisterait à la corruption du pouvoir serait incapable de faire ce qu’on attend de lui à cette position : la planification centralisée ne marche pas.

Commentaire de Jeffrey Tucker, du Mises Institute :

C’est à peu près aussi naïf que ceux qui ont favorisé la création de la Fed parce qu’ils s’imaginaient que la Fed pourrait contrôler l’expansion du crédit dans le système bancaire. En fait, c’est pire que cela, car nous avons eu un siècle d’expérience pour savoir que la banque centrale ne conduit pas à la responsabilité, aux flux de crédit réglementés et à une monnaie saine, mais précisément au contraire. C’est comme un médecin qui recommanderait un poison pour soigner l’empoisonnement, qui administrerait de l’héroïne pour arrêter une addiction à la cocaïne.

Si la centralisation de l’argent, du crédit et de l’autorité politique est la cause de ce problème, comment une centralisation supérieure pourra-t-elle le régler ? N’est-ce pas plutôt de subsidiarité dont nous aurions besoin ? Au lieu de donner toujours plus de pouvoir à de nouvelles élites mondialisées, ne devrions-nous pas rendre ce pouvoir à la société, à l’échelon local ?

À lire : L’éthique de la production de monnaie, de Guido Hülsmann. Économiste autrichien spécialiste des questions monétaires et bancaires, Guido Hülsmann est aussi catholique. Dans son ouvrage il s’intéresse à la théorie monétaire envisagée sous un angle éthique. Il cite par exemple les théologiens scolastiques comme Oresme ou Buridan, mais sa réflexion est de bon sens et universelle. Elle vise à répondre à la question : que seraient de « bonnes » institutions monétaires ? une « bonne » politique monétaire ? une « bonne » organisation bancaire ? etc.

À lire aussi : Thomas Woods, Débacle, Valor Editions.

—-
Sur le web

Voir les commentaires (9)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (9)
  • amusant de lire les delires de benoit 16 sous papes et de la caste des princes de l eglise quand on connait ou plutot ne connait pas les finances du vatican. opacite et corruption voila les grandes lignes de la gestion financiere de l etat pontifical.

  • C’est la venue de l’Antechrist qui se prépare par l’annonce de la création d’une autorité publique universelle ou mondiale et pendant ce temps, le Vatican continue de rejeter le vrai Jésus Christ Ressuscité et Glorieux qui est apparu à Dozulé , en Normandie, en France . A Dozulé, le Christ annonce un changement universel et son RETOUR GLORIEUX pour notre génération .

  • Les lois naturels du marché m’ont toujours laissées perplexes dans la mesure où la publicité en est venue à créer les besoins en prétendant les satisfaire par la suite. On est donc loin du  »naturel ». Autre incompréhension face au marché (ici monétaire), il est aberrant qu’un État aille quêter le droit d’expansion monétaire à des privés auxquels ce même État a autorisé ce droit. Évidemment, ce concept attire toujours le même blabla sur l’inflation, l’épargne et autres arguments controuvés qui affectent autant sinon d’avantage  »la main invisible du marché ». Pourtant, autant à droite (http://douglassocialcredit.com/about.php) qu’à gauche (http://economiedistributive.free.fr/spip.php?rubrique1) ont été proposées des solutions pas plus farfelu que celle du soi-disant marché autorégulateur qui au-delà de la théorie n’a jamais prouvé son existence. On peut bien sûr faire comme les marxistes et prétendre que c’est parce que la théorie est mal appliquée mais on sait où ce genre d’aveuglement doctrinaire peut mener!

    • Vous écrirez 100 fois : « La monnaie n’est pas un bien public. La création monétaire est un acte privé. L’Etat qui imprime de la monnaie est un faux-monnayeur. L’Etat qui s’endette vole les épargnants. »

  • « Par quel miracle cette autorité mondiale échapperait-elle à l’aveuglement des autorités locales ? »

    Eh bien parce que le conseil vient du Vatican pardi !

  • Vous écrirez 1000 fois : la création monétaire est l’affaire des peuples et de leurs États, sinon c’est une fraude déguisée et l’usurpation des pouvoirs par le particulier face au public. L’épargne est de l’argent retiré du flux monétaire et doit être compensé par le crédit si on veut que le cycle soit équilibré. Sinon c’est le mythe bien entretenu de l’argent qui fait des petits et toute l’arnaque de la création de la monnaie  »saine » par le privé qui refait surface. L’intérêt (le pendant de l’épargne selon les capitalistes), provient de l’époque où l’éleveur empruntait un bélier à son voisin afin d’accoupler ses brebis et en lui promettant un agneau à titre de compensation. La nature créait le  »revenu d’intérêt ». Lorsqu’on emprunte de l’argent, on sera bien mal aviser de créer la monnaie nécessaire à la rente d’intérêt. Et comme le système se veut plus ou moins fermé, seul un petit nombre pourra s’acquitter de son intérêt au dépend des autres qui en seront systématiquement incapable. Pour assainir les marchés et camoufler la non-pérennité du système on a alors le choix entre le réformer en profondeur ou se taper une bonne petite guerre qui générera du salaire sans véritable création de richesses (bien au contraire, on détruit la production…). Petite vidéo intéressante : http://youtu.be/kgA2-bWXSN4. Sans rancune.

    • L’aveuglement doctrinaire à effectivement conduits les coco et leur économie alternative vers des contrées plus rouge (sang). Le liberalisme n’à jamais conduit à cela 🙂
      « une fraude déguisée et l’usurpation des pouvoirs par le particulier face au public »
      étrange comme cette définition s’applique très bien aux gens de la FED, et de l’état US (et leur contrepartie européenne )http://www.ronpaul.com/on-the-issues/fiat-money-inflation-federal-reserve-2/
      « L’arnaque » de la création monétaire saine ? l’arnaque qui consiste à dire que uune monnaie ne peut être produite comme ca , pouf par la magie de l’état sans correlation avec la réalité?http://atlasnetwork.org/guidetosoundmoney/

  • La création monétaire n’est certainement pas l’affaire de l’Etat, pas plus que l’Etat n’appartient au peuple. Avec votre doctrine, le peuple devient propriété de l’Etat (mise en esclavage). C’est l’anti-thèse du respect de la propriété privée, donc de la vie et de la liberté. Votre doctrine, c’est l’Etat immoral.

    La monnaie est un bien privé. L’Etat qui prétend s’occuper de la monnaie est un faux-monnayeur.

  • L’analyste financier Adrian Salbuchi vous propose de revenir sur les mécanismes du système financier international. En se basant sur l’exemple très précis de l’Argentine, il démontre les limites du système actuel. Vous y découvrirez pour quelles raisons ça ne pas fonctionner. Sa perspective pour l’avenir est très simple, l’effondrement complet. La seule solution de sauvegarder votre capital est de changer dès aujourd’hui vos monnaies papier en bien tangible ayant une réelle valeur. Car selon lui c’est bien toute l’économie mondiale qui va très rapidement s’effondrer.

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

La démocratie libérale est un régime politique jeune et fragile. Elle commence véritablement à se concrétiser à la fin du XIXe siècle, et n’existe que dans une trentaine de pays dans le monde. Le primat de l’individu constitue son principal pilier qui est d’abord politique : garantir les droits naturels de l’Homme (la vie, la propriété, la liberté, la vie privée, la religion, la sécurité…) et limiter l’action de l’État¹.

La propriété de soi d’abord, la propriété des choses par le travail ensuite, la pensée critique (libre examen), la t... Poursuivre la lecture

Peste et famine vont sévir, le délire ultralibéral anéantir les acquis sociaux, et les sauterelles ravager les cultures. C’est, à peine caricaturé, la réaction de la plus grande partie de la presse française (notamment Ouest France, FranceTVinfo, France24, LaTribune, Alternatives économiques...) à l’arrivée au pouvoir, le 10 décembre, en Argentine de Javier Milei, élu sur un programme libertarien, c’est-à-dire de réduction drastique du rôle de l’État sur les plans économique et sociétal.

Le récit dominant en France serait que l’économi... Poursuivre la lecture

Le libéralisme classique français a été porté par des auteurs presque exclusivement masculins, et qui pour certains des plus fameux (Turgot, Bastiat, Tocqueville) n’ont pas laissé de postérité : ce qui devrait engager à ne pas rechercher leur opinion sur la sexualité. C’est pourtant ce que je ferais, et la démarche n’est peut-être pas vaine.

 

Les premières conceptions religieuses

Aux premiers âges de l’histoire de l’humanité, la sexualité, incomprise, est déifiée : des autels sont dressés devant des pierres d’apparence ph... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles