Le bateau coule, parlons chiffons.

Pendant que la France s’enfonce, les médias se focalisent sur les nouilleries de Lefebvre et Julliard.

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Eleve en salle de classe (Crédits BiblioArchives - LibraryArchives, licence Creative Commons)

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Le bateau coule, parlons chiffons.

Publié le 31 août 2011
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Le bateau coule, parlons chiffons.

Oups, c’est vraiment ballot : apparemment, des banques européennes ont largement sous-estimé les pertes qu’elles pourraient faire si la Grèce faisait défaut. Si l’on ajoute les déclarations moites et paniquées de Christine Lagarde sur le besoin urgent de recapitalisation de ces banques, déclarations qui ont tourneboulé la pauvre Laurence Parisot, on se dit que la situation est tendue comme un élastique qui ne demande qu’à claquer en allant cogner un œil ou deux. C’est pourquoi nous allons parler natalité et orientation sexuelle dans les manuels de classe.

Parce qu’en effet, pour Bruno Julliard, l’actualité du moment, c’est la petite polémique politicienne d’un petit groupe de députés (80, tout de même…) qui se lance à l’assaut de manuels scolaires qui dégenrent.

Bruno Julliard, c’est ce frétillant et perpétuel étudiant qui aura mené de hautes luttes contre les méchantes poussées ultranéolibérales dans l’Édulcoration Nationale lors du combat contre le Contrat Première Embauche et qui avait alors reçu le soutien logique d’un certain Nicolas Sarkozy bien décidé à l’époque à avoir la tête de Villepin.

Depuis notre brave Bruno a réussi le transfuge parfait de poseur étudiant à glandeur élu en évitant méticuleusement tout contrat de première embauche et tout travail afférent. C’est donc tout naturellement qu’il a été accueilli à bras ouverts au sein du Parti Officiellement Socialiste pour y jouer le rôle fondamental de secrétaire national pour les questions d’Éducation.

Et comme c’est bientôt la rentrée et qu’on avait quitté les classes, en juin dernier, sur le douloureux, l’épineux, l’essssentiel problème du Genre dans les manuels scolaires, il était plus que temps que les députés s’agitent à nouveau sur cette question et que, symétriquement, les journalistes fassent leur travail en propulsant leurs gros micros mous au nez du Bruno.

Et ça ne loupe pas, Bruno leur répond, et ce d’autant plus facilement qu’il estime que « Le ministre de l’Éducation ne doit pas céder à ses pressions et doit se saisir de tout urgence de cette question importante. » ! Eh oui, aborder la théorie du genre dans les manuels scolaires, c’est une question importante, qui mérite amplement que le ministre s’en saisisse de toute urgence !

Parce que, voyez-vous, « Il faut quand même rappeler que le taux de suicide des jeunes homosexuels est sept fois plus élevé que dans le reste de la population » hein n’est-ce pas.

Oui, je sais, ça n’a qu’un rapport très très timide avec le sujet, mais Julliard improvise un peu. Que voulez-vous, il doit absolument répondre quelque chose, là, voilà, regardez, tous ces micros mous qui pleurnichent pour avoir une bonne phrase un peu moelleuse à se mettre sous la dent !

Julliard et le syndrome du gros micro mou

Pour Bruno, donc, s’il faut absolument aborder la question du genre dans les manuels SVT, c’est parce que le taux de suicide des jeunes homosexuels est plus grand que dans le reste de la population. Avec le même raisonnement parfaitement crétin, on pourrait aussi noter que le taux de délinquance est supérieur chez les populations d’origine étrangère en France, et donc aborder la question de la race dans les manuels SVT.

Si vous venez de bondir à la lecture de la phrase précédente sur la race, c’est normal. Et vous comprendrez aussi pourquoi on peut aussi bondir à la déclaration du Bruno en mode « gros micro mou ». Mais pour lui, c’est une polémique déjà dépassée puisqu’en fait, il devient absolument nécessaire d’aborder tous ces concepts, toutes ces théories (dont au passage tout indique qu’il s’agit de fumisteries de première bourre) le plus tôt possible histoire de « contribuer à l’éducation et la formation des futurs citoyens ».

Il a raison : c’est effectivement le but réel de l’Éducation Nationale, et non, comme certains pourraient le croire, de fournir avec les impôts des parents un savoir de base à l’élève et une capacité à se trouver du travail. Que nenni : il s’agit de former de bon petits soldats de la République Citoyenne et Festive.

Et puis, comme cela permet d’occuper un peu les médias et d’éviter les sujets qui fâchent, on ne va pas s’en priver, hein !

On pourrait croire que ce jeu d’occupation de la scène médiatique est un apanage des clowns de gauche, mais rassurez-vous : les socialistes de droite sont aussi avides de tirer à eux la couverture médiatique pour camoufler les trous béants vers lesquels tout le monde galope pourtant obstinément.

Le cas pathologique de Frédéric Lefebvre illustre ainsi parfaitement les ravages de la hontectomie et de la parfaite étanchéité des cerveaux des politiciens à toute forme de connaissance ou savoir économique.

Pour lui, si la France se tire si mal de la crise économique, c’est parce qu’elle pond trop de lardons !

« Pourquoi est-ce si difficile pour la France de faire baisser le chômage ? Il faut dire la réalité : parce qu’on a un taux de natalité beaucoup plus important que beaucoup d’autres pays, parce qu’on a beaucoup de Françaises et de Français qui entrent sur le marché du travail alors que l’Allemagne, par exemple, qui a un taux de natalité qui s’est effondré, a beaucoup moins d’Allemandes et d’Allemands qui entrent sur le marché du travail.»

Moi, je pense qu’il faut décerner un prix à Fred. Il est vaillant, le bougre : partir ainsi, à l’assaut des cimes ardues de la macro-économie à l’échelle de l’Europe, armé seulement d’un petit canif et d’un cerveau acheté en solde aux puces de Saint-Ouen, cela nous a un petit air de Guillaumet dans les Andes. Avec, bien sûr, la différence notable que Guillaumet aura laissé une trace impérissable dans l’histoire des héros des hauteurs azurées, alors que le pauvre Fredo ne laissera qu’une trace de couleur discutable dans l’histoire des rigolo souterrains qui creusent pour s’occuper.

On peine, en fait, à comprendre le raisonnement qui sous-tend qu’une forte natalité entraîne du chômage et de la misère. Sauf à considérer la France comme un pays du tiers-monde, bien sûr, ce qui n’est pas absurde sur le long terme au vu des efforts désespérés que lui, ses amis et ses adversaires politiques entreprennent tous pour parvenir à cette sombre destinée…

L’évidence est qu’une population vigoureuse n’est pas, en soi, une source de chômage (ni, d’ailleurs, une source de croissance). C’est, en substance, une source de renouvellement.

Après, toute la question consiste à savoir ce qu’on fait de ce renouvellement, de cette jeunesse. On peut, par exemple, l’employer à peigner des girafes, comme le fait avec brio Bruno Julliard. Elle ne produit donc plus vraiment de richesses et finit même par coûter. Et là, évidemment, les petits trous faisant les grands gouffres, on se retrouve rapidement avec des soucis, dont le chômage fera partie.

On peut aussi la laisser se créer ses propres emplois, en favorisant les initiatives, les prises de risques et de responsabilités, en n’étouffant pas ces inspirations par de la paperasse, des lois, des taxes, des ponctions, des cotisations.

En tout cas, vous voyez, vous avez lu tout un billet et vous avez oublié le principal : les banques françaises sont dans le caca, les bourses hésitent, les gouvernements aussi, l’or grimpe et tout le monde sait que la récession a déjà commencé.

Finalement, les grosses blagues et le sexe, ça marche toujours.
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Les auteurs : Nathalie Sayac est Professeure des universités en didactique des mathématiques, directrice de l’Inspe de Normandie Rouen-Le Havre, Université de Rouen Normandie. Eric Mounier est Maitre de Conférences en didactique des mathématiques, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC).

 

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