Du mauvais usage des étiquettes

L’étiquetage de Behring Breivik paraît circonstanciel et destiné à introduire de la rationalité rassurante là où il n’en y a pas

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Behring Breivik

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Du mauvais usage des étiquettes

Publié le 27 juillet 2011
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En contrepoint de l’article « Quelles sont les idées du tueur d’Oslo ? »

Les étiquettes rassurent sur la provenance des fromages et l’origine des idées folles : dès que le massacre perpétré  en Norvège par Behring Breivik sur une centaine de ses concitoyens fut connu, les médias l’étiquetèrent d’extrême droite. Fixer un fou dangereux dans une catégorie répertoriée, c’est plus rassurant sans doute que d’avouer qu’il existe des fous en circulation, qui nous ressemblent et en tout cas, évoluent sans peine dans notre société.

Mais pourquoi d’extrême droite ? Breivik est islamophobe, certes, mais est-on certain que tous les adversaires de l’immigration musulmane soient de droite ou même d’extrême droite ? Breivik est aussi franc-maçon, un ordre qui se situe plutôt à gauche et en Norvège, proche du Parti travailliste au pouvoir.

Le manifeste publié par Breivik, pour « expliquer » son geste relève classiquement du délire propre aux fous intelligents. Ce texte se réclame des Croisades (les Croisades seraient d’extrême droite ?) mais il est pour l’essentiel un plagiat des manifestes d’un autre fou intelligent, américain, Ted Kaczynski, surnommé Unabomber (Un comme Université car il y enseignait les mathématiques). Or Unambomber, qui déposa 16 bombes dans des lieux publics avant d’être intercepté en 1995, était perçu comme d’extrême gauche, ennemi déclaré du progrès technique et du capitalisme, soutenu pendant son procès par le penseur anarchiste et écologiste, John Zerzan.

L’étiquetage de Breivik paraîtra donc circonstanciel, destiné à introduire de la rationalité rassurante là où il n’en y a pas et à mettre en difficulté par assimilation implicite les mouvements d’extrême droite, xénophobes, un peu partout en Europe. Je ne suis guère favorable à ces mouvements-là mais je ne suis pas certain que les impliquer dans le massacre en Norvège en fasse reculer l’influence. De même qu’attribuer le massacre au goût immodéré de Breivik pour les jeux vidéo ne renseigne ni sur le meurtrier fou ni sur l’influence (sans doute nulle) des jeux vidéo sur la violence en société.

Étiqueter Breivik ou étiqueter Unambomber en fait des êtres sociaux doués de raison, bonne ou mauvaise : en vrai, ils sont a-sociaux et les étiquettes sont donc mensongères. Admettons plutôt que l’Homme n’est pas forcément ni naturellement bon.

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  • – ABB n’attaque pas « des individus pacifiques au motif de leur identité communautaire », il ne pose pas une bombe devant une mosquée et ne tue pas des musulmans : il pose une bombe dans le quartier gouvernemental et attaque des membres du parti au pouvoir. Il attaque le gouvernement et ses soutiens : sous cet aspect, il est de gauche. Mais il n’est pas d’extrême-gauche, dans la mesure où il n’a rien contre le concept et la forme du gouvernement norvégien ; il n’aspire qu’à un changement relativement mineur de politique.
    – ABB est, au sens propre, réactionnaire : il aspire à un retour à une situation antérieure. Sous est aspect il est de droite. Mais pas d’extrême droite non plus, il n’aspire pas à une refondation sociale complète vers un « bon vieux temps » mythique.
    – il utilise une violence extra-ordinaire ; c’est le seul aspect qui en fait un extrêmiste.
    Tout cela en fait un individu déroutant, atypique, qu’il est bien tentant de cataloguer comme « fou » ou « extrême-truc ».

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