Bilan de 10 ans de décriminalisation des drogues au Portugal

Les lois encadrant et criminalisant l’usage et le commerce de la drogue devraient être fondées sur des preuves empiriques et non sur la spéculation et la peur

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Bilan de 10 ans de décriminalisation des drogues au Portugal

Publié le 5 juillet 2011
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Le cas de la décriminalisation des drogues au Portugal souligne l’argument pragmatique en faveur de la décriminalisation.

Par Alex Korbel.
Il y a dix ans ce mois-ci, le Portugal rejetait l’approche classique de la politique de lutte contre la drogue (davantage de lois, de mobilisation policière, des peines de prison plus rigides) et allait dans le sens opposé en dépénalisant les drogues, même la cocaïne et l’héroïne.

Ceux qui font de la guerre contre la drogue une priorité prédisaient des conséquences catastrophiques à cette réforme, dont une crise majeure de la santé publique dans le pays.

Dix ans après, toujours pas de catastrophe en vue.

Comme l’a montré Glenn Greenwald dans un rapport de l’Institut Cato publié en 2009, le Portugal se porte bien et à bien des égards il se porte mieux que d’autres pays de l’Union européenne qui ont suivi la ligne dure de la pénalisation de l’usage de drogues.

Cette loi, votée le 1er octobre 2000, a aboli les sanctions pénales pour tous les stupéfiants – et pas seulement pour la marijuana mais aussi pour les drogues dures comme l’héroïne et la cocaïne. Cette réforme ne concerne que la consommation personnelle : le commerce de drogue demeure une infraction pénale.

Après dix ans, l’expérience portugaise montre empiriquement ce qui se passe réellement – et ce qui ne se produit pas – lorsque les sanctions pénales contre la possession de drogue sont levées.

 

Baisse de la consommation de drogue

L’usage des drogues dans de nombreuses catégories démographiques a diminué en termes absolus, y compris chez les 15-19 ans. Lorsque les taux d’utilisation ont augmenté, les hausses ont été modestes et beaucoup moins importantes que dans la plupart des autres pays de l’Union européenne, qui continuent à utiliser une approche de criminalisation de l’usage des dorgues.

Le Portugal, dont les problèmes liés à la consommation de drogue étaient parmi les pires en Europe, a maintenant le plus faible taux d’utilisation de marijuana et un des plus bas de cocaïne. Les pathologies en partie liées à l’usage de drogue, y compris la transmission du VIH et de l’hépatite ont sensiblement diminué.

 

Absence d’appel au retour de la criminalisation de la consommation de drogue

Au-delà de ces données chiffrées, le succès de la décriminalisation est illustré par l’absence d’agitation politique en faveur d’un retour à la criminalisation. Les citoyens portugais, comparant la situation hors de contrôle des années 1990 avec la situation actuelle très grandement améliorée, n’ont pas envie d’un retour à la criminalisation et dans ce pays à la tradition religieuse si vivace, aucun politicien influent ne préconise de le faire.

La décriminalisation est devenue politiquement tenable lorsque le Parlement portugais a convoqué une commission d’experts apolitiques chargée de déterminer comment le pays pourrait le mieux répondre à ses graves problèmes de drogue. La commission a constaté que la décriminalisation est la meilleure politique de réduction des méfaits liés aux drogues, et les événements ont maintenant démontré la sagesse de cette recommandation.

 

Pourquoi décriminaliser est-elle la bonne solution ?

Dire que la décriminalisation améliore les problèmes liés à l’usage de drogue peut sembler contre-intuitif.

1/ Quand un gouvernement menace de transformer en criminels les consommateurs de drogues, un mur de la peur est élevé entre responsables politiques et citoyens. Ce mur – la stigmatisation et la peur qu’il provoque – était le principal obstacle à l’efficacité des programmes d’éducation et de traitement dans les années 1990 au Portugal.

2/ Le traitement de la toxicomanie comme un problème de santé, et pas comme une infraction pénale, est plus efficace que la prison pour détourner les toxicomanes de la consommation de drogue.

3/ Quand un gouvernement n’engloutit plus des quantités excessives d’argent public dans la poursuite, l’arrestation et l’incarcération des consommateurs de drogues, cet argent public peut être utilisé dans des programmes et services de traitement efficaces (cliniques de méthadone, etc.).

Quelle que soit notre opinion sur la libéralisation des lois encadrant et criminalisant l’usage et le commerce de la drogue, il convient que ce débat soit fondé sur des preuves empiriques et non sur la spéculation et la peur.

Sources : Tim Lynch pour Cato@Liberty et Glenn Greenwald pour le Cato Institute

Lire l’article Drogues sur Wikiberal et ses liens externes

Voir les commentaires (8)

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Créer un compte Tous les commentaires (8)
  • Merci à Alex Korbel pour cet article très intéressant.

    • Merci. Comme indiqué à la fin du texte, cet article reprend deux textes publiés par l’Institut Cato, et est principalement la traduction du texte de Glenn Greenwald. Merci à lui, donc !

  •  » Cette réforme ne concerne que la consommation personnelle : le commerce de drogue demeure une infraction pénale.  » Pour rappel.

  • Faut-il dépénaliser et la consommation et la vente, ou seulement la consommation?

    • On peut commencer par dépénaliser la consommation ; ensuite, on peut encadrer la vente (comme pour l’alcool et le tabac).

  • «en dépénalisant les drogues, même la cocaïne et l’héroïne.»

    FAUX! Ce n’est que la *consommation* qui a été dépénalisée. Pas la production ni le commerce de la drogue!

    C’est plus qu’une nuance!

  • Les commentaires sont fermés.

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