Glyphosate : l’indignité nationale et européenne

L’Union européenne n’a pas trouvé d’accord sur le renouvellement du glyphosate. Retour sur un scandale politique et idéologique.

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Glyphosate : l’indignité nationale et européenne

Publié le 10 novembre 2017
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Par André Heitz.

Le glyphosate, un herbicide « génial »

Est-il encore possible d’écrire sans se faire écharper que le glyphosate est un herbicide de très grande valeur pour l’agriculture et l’environnement, avec un excellent profil toxicologique et écotoxicologique ?

Efficace, bon marché (il n’est plus la propriété brevetée de Monsanto depuis… 2000), répondant de manière optimale aux besoins des agriculteurs et des gestionnaires de l’environnement pour le désherbage total, la destruction des couverts, la préparation des lits de semences.

Le glyphosate est un élément clé de l’agriculture respectueuse de l’environnement, notamment de l’agriculture de conservation et des techniques culturales simplifiées (sans labour), n’en déplaise aux idéologues du bio et de l’« agro-écologie » chimiphobe.

 

Une formidable manipulation médiatique

Nous assistons cependant, ces temps-ci, à une des plus extraordinaires manœuvres médiatiques et sociopolitiques dont l’équivalent historique serait à chercher dans les décennies les plus sombres de l’histoire du XXe siècle.

La différence est qu’il s’agit maintenant d’une substance, d’un facteur de production et de gestion de l’environnement, et non de personnes. Pas un article de presse qui ne parle du « glyphosate, substance controversée » (par qui, du reste ?) ou du « glyphosate, déclaré cancérogène par l’OMS » (dans le meilleur des cas, c’est « cancérogène probable par le Centre International de Recherche sur le Cancer »).

 

Le glyphosate « cancérogène probable », vraiment ?

Ce classement (annonce ici, monographie ici) – ou plutôt ce qu’on en a fait – est ce qu’on appelle en statistique une valeur aberrante, un hors-type.

Toutes les agences d’évaluation et de régulation du monde qui se sont penchées sur le glyphosate ont conclu qu’il ne présentait pas de risques pour les applicateurs en conditions normales d’emploi (sauf pour les yeux), et encore moins pour les consommateurs :

  • l’ANSES en France (avec toutefois une dose de politiquement correct pour ne pas déplaire totalement) ;
  • l’EFSA (par exemple ici pour la mise à jour de son évaluation après le classement du CIRC) et l’EchA en Europe (avec le travail préparatoire des autorités allemandes BfR et BAuA et le concours des experts des États membres) ;
  • l’APVMA en Australie ;
  • l’ARLA au Canada ;
  • l’EPA aux États-Unis d’Amérique (par exemple ici) ;
  • la Commission de Sécurité Alimentaire au Japon ;
  • l’EPA en Nouvelle-Zélande ;
  • l’OFAG (pour le dernier document, chercher « Position de l’OFAG au sujet du glyphosate ») et l’OSAV (ici, avec lien vers une fiche thématique) ainsi que le Conseil Fédéral (le gouvernement) en Suisse.

 

Ce classement a aussi été mis en perspective, au mieux, et invalidé, au pire, par la maison mère du CIRC, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), notamment dans le cadre de la Réunion Conjointe FAO/OMS sur les Résidus de Pesticides (JMPR) – page d’accueil ici, rapport résumé ici, traductions partielles ici).

Ce produit maintenant voué aux gémonies a été en vente libre pour les particuliers dans les jardineries, et même les supermarchés. C’est quasiment le seul herbicide vendu prêt à l’emploi.

Encore vendu, car l’hystérie antipesticides de la loi Labbé durcie par la loi sur la transition énergétique l’a condamné à compter du 1er janvier 2019 ; mais rassurez-vous, les marchands proposeront aux particuliers des « alternatives » dites « naturelles » – plus dangereuses et surtout bien plus chères au mètre carré traité (quelque 20 à 30 fois dans le cas de l’acide pélargonique).

 

Un classement à relativiser…

Il n’y a aucune mise en perspective.

C’est pourtant simple : le CIRC évalue un danger, les autres agences, évaluent un risque en tenant compte de l’exposition et des mesures de prévention et de mitigation.

Pour le CIRC, le glyphosate est dans la même classe de danger que par exemple la viande rouge ; les émissions des fritures à haute température ; la combustion du bois en intérieur, particulièrement dans les cheminées ; le métier de coiffeur ; le travail posté… et aussi l’eau chaude (dans les boissons).

 

… et pire, fruit d’une machination

Mais il y a pire : le classement du CIRC en « cancérogène probable » a toutes les caractéristiques d’une machination. Longtemps suspecté, ce fait est maintenant démontré au-delà de tout doute.

Une presse militante et une presse panurgique occultent ce qui constitue un véritable ensemble de scandales : classement répondant à un projet socio-politique et non scientifique, conflits d’intérêts matériellement pertinents, non prise en compte de résultats scientifiques essentiels, massage des données utilisées pour leur faire dire le résultat souhaité, changements de dernière minute… jusqu’aux copinages et services rendus aux opposants au glyphosate.

Il n’est pas anodin que le CIRC refuse obstinément d’expliquer le sens à donner à son classement et les conséquences à en tirer, comme il le fit, par exemple, pour la viande rouge et la charcuterie classée, elle, en cancérogène certain.

 

Un groupe de travail du CIRC dont la moitié a versé dans le militantisme

De plus, la moitié du groupe de travail du CIRC qui a frappé le glyphosate d’opprobre a cosigné, en novembre 2015, une lettre demandant au Commissaire Européen à la Santé Vytenis Andriukaitis de rejeter l’évaluation du glyphosate par l’EFSA (et, insistons, les experts des États membres à l’exception de la Suède).

Ce sont : Gloria M. Calaf, Francesco Forastiere, Lin Fritschi, Charles W. Jameson [devenu expert pour des cabinets d’avocats], Hans Kromhout, Matthew K. Ross, Ivan I. Rusyn [a aussi participé à une audition sur le glyphosate devant le Bundestag], Consolato Maria Sergi, Lauren Zeise. Cette manifestation de militantisme s’est produite huit mois à peine après le classement du glyphosate par le CIRC.

Que faut-il en conclure pour la crédibilité de ce classement ?

Les conflits d’intérêts, ici intellectuels, se manifestent aussi postérieurement. Mais les activistes et leurs amis si affûtés sur les conflits d’intérêts allégués des experts de l’« autre bord », y compris pour des motifs futiles, sont restés étonnamment silencieux… La paille et la poutre…

 

L’étrange M. Portier

La lettre avait été rédigée par M. Christopher Portier, ancien agent éminent d’institutions états-uniennes de la protection de la santé et de l’environnement passé activiste d’une ONG (voir par exemple son CV publié par le CIRC).

Coopté par les dirigeants du CIRC comme « spécialiste invité » dans leur groupe de travail, alors qu’il n’avait, de son propre aveu, aucune connaissance particulière du glyphosate et des autres substances examinées par le groupe (voir ici, notamment page 40 dans le texte) et ici, ou encore ici, un article qui a été publié dans le Times).

Passé discrètement, une semaine après la publication du classement du CIRC, comme consultant au service de cabinets d’avocats prédateurs espérant toucher le jackpot de plaintes déposées contre Monsanto (contrat ici – il l’était déjà avant pour d’autres sujets fondés, eux aussi, sur un classement de substance par le CIRC, voir ici, pp. 75 et seq.).

Contributeur aux efforts de guerre contre le glyphosate de certaines ONG européennes (voir par exemple ici : « Civil society (HEAL) » est un lien vers la présentation de M. Portier… qui s’est gardé d’y annoncer qu’elle a été faite pour Health and Environment Alliance)…

Tout cela en attendant que d’autres faits d’arme ne soient dévoilés.

 

Renouvelé pour 15 ans au Canada, victime de la comitologie et de l’indigence politique en Europe

L’autorisation du glyphosate a été renouvelée au Canada pour quinze ans en avril 2017.

En Europe, on a assisté à une véritable pantalonnade. Les règles de la comitologie exigent une double majorité des États membres pour l’adoption ou le rejet d’une mesure proposée par la Commission : 55 % des pays (soit 16), représentant au moins 65 % de la population totale de l’UE. Dans la pratique, souvent, la Commission sonde les États et ne fait procéder à un vote formel que si la perspective d’une majorité est acquise, ou si elle est acculée.

Une minorité de blocage est donc réunie en termes de population avec 35 %. L’Allemagne et la France réunies font presque 29 %. Il suffit donc qu’un autre grand pays ou deux ou trois plus petits votent contre ou s’abstiennent (le résultat est le même) pour que l’Union soit bloquée. Et quand les deux « grands » sont cabrés, certains « petits » trouvent avantage à s’abstenir à Bruxelles plutôt que de manifester une position qui serait impopulaire à la maison.

Dans la saga du glyphosate, l’Allemagne s’est toujours abstenue : c’est l’exportation à Bruxelles de l’accord de gouvernement de la grande coalition, fût-ce au mépris des intérêts de l’Union (et de l’Allemagne) et fût-ce sur une question pour laquelle la science (à commencer par celle de l’Institut Fédéral – allemand – d’Évaluation des Risques…) devrait prévaloir. La France… hélas.

 

Un renouvellement pour 15 ans ? Na !

La Commission avait initialement proposé un renouvellement de quinze ans, conforme aux usages pour des produits réévalués et réputés sûrs (pour rappel : on l’utilise depuis 40 ans). Les États membres se sont ingéniés à être dans la non-décision.

La France de M. Hollande et de Mme Royal avait commencé par s’abstenir ou indiquer une intention de s’abstenir, puis voté contre.

C’est que Mme Royal s’est vu offrir des fleurs… « au nom de 40 ONG, […] pour mon combat vs. le glyphosate au niveau européen », a-t-elle écrit dans un gazouillis du 25 mai 2016. L’honneur et la considération de la France abandonnés pour le prix d’un bouquet…

 

Dix-huit mois de sursis… et de chienlit

Selon les règles de la comitologie, la décision échoit à la Commission en cas d’absence de décision des États membres.

Mais la Commission a tenu à ce qu’elle soit prise par ceux-ci (voir par exemple ici, point 1.1.2 – la déclaration est plus récente). Marre de devoir porter le chapeau de décisions impopulaires (et rendues impopulaires par des gouvernements ravis d’avoir pu refiler le mistigri à la Commission).

Le glyphosate est ainsi devenu l’otage d’un bras de fer. Le 29 juin 2016, trois jours avant l’échéance de l’autorisation alors en cours, la Commission a prolongé l’autorisation de dix-huit mois maximum en attendant une évaluation de l’Agence Européenne des Produits Chimiques (EchA). Celle-ci a confirmé le classement actuel (opinion complète ici) : les preuves scientifiques ne remplissent pas les critères pour classer le glyphosate en cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction (l’annonce a été faite le 15 mars 2017).

 

Un renouvellement pour 10 ans ? Na !

La Commission a alors proposé un renouvellement de dix ans, à la fois pour faciliter la prise de décision et pour répondre en partie à une première résolution non contraignante du Parlement Européen, du 13 avril 2016, acquise à la suite d’un remarquable retournement de situation, préconisant une durée de sept ans.

La France – celle maintenant de M. Macron et de M. Hulot – a marqué à nouveau son hostilité.

 

À Paris, un plan de sortie de crise gouvernementale camouflé en plan de sortie du glyphosate

Mais il a été reconnu au niveau national qu’il fallait une sortie en douceur du glyphosate (c’est une douce illusion, mais c’est de la politique). Entre les cinq à sept ans préconisés par M. Travert et la sortie immédiate de M. Hulot (c’est à double sens ici…), et après un beau pataquès de communication, le Premier ministre a décidé… de ne pas trancher fin septembre 2017.

Selon un communiqué de presse du 25 septembre 2017 :

Pour les autres usages, et notamment l’usage agricole, le Premier ministre a demandé au ministère de l’Agriculture et de l’alimentation et au ministère de la Transition écologique et solidaire de lui présenter – avant la fin de l’année et en fonction des conclusions des états généraux de l’alimentation – les conditions d’un plan de sortie du glyphosate, compte tenu de l’état de la recherche et des alternatives disponibles pour les agriculteurs. 

C’est là plutôt un plan – foireux – de sortie de crise larvée du gouvernement et réelle de quelque ego (devinez…). Car il n’y a pas de sortie réaliste du glyphosate sur le plan tant agronomique qu’économique (n’en déplaise…).

Prudent, M. Philippe avait ajouté :

Le gouvernement réaffirme son engagement d’obtenir avant la fin du quinquennat des progrès significatifs vers l’interdiction de l’usage des substances dangereuses et vers une agriculture moins dépendante aux pesticides.

 

Nous ne savons pas où nous allons, mais nous y allons « de façon calme, ordonnée, prévisible – et irréversible »

Devant l’Assemblée Nationale, le 10 octobre 2017, répondant à Mme Bénédicte Taurine (LFI), il avait notamment déclaré :

Notre but est très simple. Nous partons de l’idée qu’il nous faut fixer des objectifs à la fois clairs, prévisibles et irréversibles. Constatant qu’il n’existe pas à ce jour de produits qui puissent aboutir aux mêmes résultats que ceux élaborés à partir du glyphosate, constatant que certains agriculteurs souhaitent pouvoir transformer leur façon de produire mais que d’autres se trouvent dans la nécessité d’utiliser ces produits, j’ai demandé au ministre de l’agriculture et au ministre d’État chargé de la transition écologique de préparer une stratégie de sortie du glyphosate.

Ainsi, en tenant compte de l’ensemble des connaissances scientifiques et de l’évolution des pratiques agricoles, nous pourrons définir de façon calme, ordonnée, prévisible – et irréversible – les moyens de faire évoluer notre modèle de production agricole.

 

Un plan de sortie du glyphosate/de crise vite oublié par M. Hulot

Flashback. Le 23 septembre 2017, M. Hulot affirmait dans Ouest France :

La science découvre chaque jour des phénomènes de bio accumulation, d’effets cocktails. Contre le glyphosate et son rôle de perturbateur endocrinien, et peut-être d’antibiotique surpuissant, il y a un faisceau de présomptions qui justifie d’appliquer le principe de précaution.

Le 7 septembre 2017, l’EFSA avait pourtant publié son avis selon lequel le glyphosate n’était pas un perturbateur endocrinien. Mais tout est permis en politique, surtout post-moderne…

La Commission a reporté le vote prévu pour le 5 octobre 2017. Nouvelle échéance : le 25 octobre.

Mais le concours s’est poursuivi à Paris. Le Premier ministre avait annoncé l’intention de voter contre la proposition (de dix ans) de la Commission (notamment dans le communiqué de presse du 25 septembre 2017). Le 23 octobre 2017, M. Hulot – pourtant chargé de définir un plan, donc supposé se prononcer après avoir évalué les conditions matérielles de sortie – proposait… trois ans. Explication :

Pendant ces trois ans, on regarderait tout ce qu’on peut trouver en termes d’alternative et aider ceux pour lesquels l’utilisation du glyphosate est indispensable à se pencher sur d’autres pratiques et d’autres techniques.

Comme si nous ne savions pas ce qui existe « en termes d’alternatives »… et que nous tiendrions la main de certains agriculteurs, et leur enverrions un post it… Et dire qu’il est chargé par le Premier ministre de co-établir un plan de sortie d’ici la fin de l’année…

Pourquoi trois ans ? Posture de marchandage dans le souk gouvernemental.

 

Un renouvellement pour 5 à 7 ans ? Na !

La Commission a donc été obligée de reporter également le vote du 25 octobre 2017.

Car à la posture de la France et d’autres pays comme l’Autriche et l’Italie s’ajoutait la difficulté qu’a Mme Merkel de monter sa coalition Jamaïque en Allemagne, et donc le maintien de l’abstentionnisme de la grande coalition. La Commission a aussi annoncé qu’elle proposerait une durée de cinq à sept ans, qu’elle a ramené tout récemment à cinq ans, pour un vote prévu le 9 novembre 2017.

Le Premier ministre Édouard Philippe s’est joint au concours de pipi : le 25 octobre 2017, la France aurait été prête à accepter trois ou quatre ans ; c’est devenu, aux toutes dernières nouvelles, trois ans. Au moins avons-nous là une ligne d’arrivée… qui sera peut-être bien déplacée… une fois de plus.

 

La Macronie succombe aux expédients politiciens

C’est un énorme gâchis. Mais ce n’est pas la Hollandie, nous assure-t-on…

C’est peut-être pire ! Dans Le Times du 23 octobre 2017, « War against chemicals is a shame on science » (la guerre contre les substances chimiques est une honte pour la science – texte complet ici), M. Matt Ridley écrivait que les politiciens français réclament une interdiction en public… et argumentent contre cette interdiction en privé.

 

Il n’y a pas d’alternative au glyphosate

C’est qu’il y a une réalité incontournable : il n’y a pas d’alternative au glyphosate – de solution de substitution –, en tout cas pas avec les mêmes propriétés et avantages.

On peut certes imaginer un retour à la binette, et c’est du reste une option qui plaît à bien des patates de canapé qui croient connaître les solutions à utiliser en agriculture pour avoir réussi à garder une plante verte pendant quelques semaines. Il y a même des agronomes, hélas…

Certes, des agriculteurs se passent de glyphosate, l’INRA a montré – en Bourgogne, près de Dijon – que l’on pouvait s’en passer grâce à des rotations longues, mais les solutions ne sont pas transposables partout, et encore moins généralisables. Et elles ont un coût. Voir ici, un sérieux appel à la raison et la prudence du chercheur de terrain (pas du manipulateur de statistiques).

Imaginez : pour détruire une culture de couverture avec un grand gyrobroyeur de six mètres, il faut parcourir une distance cinq fois supérieure à celle d’un pulvérisateur avec une rampe de 30 mètres ; ce sont cinq traces de tracteur et de compaction au lieu d’une. À 4 km/h dans le premier cas, pour faire un travail soigné, et 12 km/h dans le second, le temps passé est dans un rapport de 15 à 1. Que vaut-il mieux : deux litres de glyphosate à l’hectare en désherbage chimique, ou deux passages avec trois ou quatre litres une fois d’antigraminées et l’autre fois d’antidicotylédones ? Ou 50 litres de gazole en désherbage mécanique ? Etc.

 

Un désastre économique annoncé

Sur le plan général, les chiffrages prédisent des pertes de un à deux milliards d’euros pour l’agriculture française (rapport complet de la Fondation Concorde ici) et 500 millions pour la seule SNCF qui doit assurer la propreté de ses lignes et de leurs abords.

La chute des rendements est évaluée à des niveaux à deux chiffres, et ce également en Allemagne et au Royaume-Uni ; inutile, donc, de mettre en cause le lobbying de la FNSEA abhorrée par la bien-pensance. Ce sont là des pertes de revenus pour les agriculteurs, déjà en situation peu avantageuse, mais aussi pour toute la filière agroalimentaire et ses emplois, notre commerce international et notre balance commerciale.

Mais cela vaut bien quelques sacrifices que de sacrifier aux lyncheurs de pesticides et à nombre d’acteurs politiques animés par le besoin compulsif d’exister et de soigner leur image auprès de leur clientèle. Au sein de l’équipe gouvernementale c’est pour l’un à l’échéance d’un an, et pour d’autres, du quinquennat…

 

Le glyphosate, et tous les autres après…

En fait, le problème est encore plus grave !

C’est dit fort et clair par le CEO du Sustainable Food Trust :

Si le Roundup est interdit, ce ne sera assurément qu’une question de temps avant que l’attention ne se porte sur d’autres pesticides toxiques actuellement disponibles. Cela pourrait être le début de la fin de l’utilisation des herbicides en agriculture telle que nous la connaissons, ce qui mènera à un nouveau chapitre de l’innovation et de la diversité.

« …un nouveau chapitre… » ?

Un retour vers le passé.

Rappelons que le rendement du blé conventionnel est en France supérieur à 70 quintaux/hectare et que le bio traîne à moins de 30 (les difficultés liées au désherbage ne sont qu’un des facteurs de cette différence). Supprimons les intrants chimiques – car il n’y a pas de raison de se limiter aux herbicides – et la France nourrira sa population… huit mois sur douze.

 

L’expertise et l’évaluation sacrifiés

Et ce n’est pas fini !

L’irresponsabilité collective de nos gouvernants et législateurs – de Bruxelles et des capitales – a ruiné le principe même du processus décisionnel fondé sur la science ou, pour prendre un terme qui heurte moins la bien-pensance postmoderne – la connaissance.

Dans cette guignolade, ils ont donné la préséance à une opinion dite « publique » largement manipulée. Manipulée par des ONG et une industrie de la pétition dont le fond de commerce est précisément la manipulation des opinions ; par des médias pour qui l’audience ou le militantisme, souvent les deux, prime sur la déontologie journalistique ; par des politiciens démagogues ; dans le cas présent par une collusion de fonctionnaires et d’experts du système onusien (voir ici et, pour les recherches d’une blogueuse allemande, ici, ici et ici – traduit… et il y a une suite à venir), d’activistes et de lobbyistes du biobusiness (notamment l’USRight to Know), et d’avocats prédateurs (voir par exemple ici une reproduction d’une publicité pour recruter des plaignants) ; et par nos gouvernants et législateurs eux-mêmes.

Quelle crédibilité a encore, par exemple, l’EFSA quand sa conclusion d’absence de propriétés de perturbation endocrinienne est ignorée et, en fait, contredite par un ministre qui fut bateleur de petit écran ? Le problème n’est pas récent. Mme Ségolène Royal n’a-t-elle pas « condamné » du haut de son omniscience, en mars 2017, le lendemain de son annonce, la décision de l’ECHA – en fait du Comité d’Évaluation des Risques composé d’experts des États membres – de ne pas classer cancérogène probable le glyphosate ?

Une décision dont la motivation n’avait pas encore été publiée…

Quel expert potentiel aura encore la motivation pour siéger dans des instances d’évaluation dont les avis seront contestés par les pouvoirs législatif et politiques pour des motifs purement d’opportunité politique et électorale (et pour affronter la perspective d’être traîné dans la boue par les opposants adeptes de l’ad hominem) ?

Notons que la Chambre des Représentants états-unienne demande des comptes au CIRC et à son directeur (et à des instances états-unienne dont le comportement n’est pas au-dessus de tout soupçon). En France, l’Assemblée nationale veut une enquête sur l’indépendance des agences européennes d’évaluation… lesquelles ont déjà expliqué la situation moult fois.

 

La « science » poubelle a droit à une place au soleil

Le comble de l’indigence politique et morale a été atteint – en attendant de voir pire encore – par le Parlement Européen dans sa proposition de résolution non contraignante du 4 octobre 2017 sur les « critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien ».

Il demanda en effet :

… à la Commission de garantir que ce même document d’orientation précise qu’aucune hiérarchie ne donne la priorité aux données scientifiques générées conformément à des protocoles d’études convenus au niveau international par rapport aux autres données scientifiques.

La « science » poubelle ou la « science » militante doit avoir voix au chapitre !

Il s’est trouvé deux eurodéputés pour accepter de mettre ça dans un projet de résolution. Les 389 eurodéputés qui ont adopté la résolution y ont-ils souscrit ? La version provisoire du texte adopté ne contient plus la disposition, mais il n’y a pas eu de proposition d’amendement déposée sur ce sujet.

La politique postmoderne non seulement cautionne la « science » postmoderne, mais la promeut !

Cela vaut pour Bruxelles/Strasbourg, mais aussi Paris où un ministre de la Transition écologique (et, aussi, mais en second lieu seulement, solidaire) trouve « des phénomènes de bio accumulation, d’effets cocktails », un « rôle de perturbateur endocrinien, et peut-être d’antibiotique surpuissant » (interview à Ouest France) aux meilleures sources de la « science » postmoderne. Et où un président et un Premier ministre estiment que le maintien de la paix gouvernementale vaut bien quelques milliards d’euros… avec le sabotage de la construction européenne en prime.

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