Le Panama des pauvres

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Les "Rap Tout Vampires" du fisc interprétés par les Inconnus

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Le Panama des pauvres

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 12 avril 2016
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À l’heure qu’il est, tout, ou à peu près, a été dit au sujet des #PanamaPapers et à mesure qu’ils sont remplacés dans l’actualité par des #PoitouCharentesPapers plus riches en rebondissement.

On ne compte plus les articles plus ou moins enflammés d’une presse largement acquise aux objectifs étatiques de la lutte contre l’évasion fiscale, et il est fort difficile de trouver quelques rappels essentiels, depuis le fait qu’une bonne partie de ces placements ne sont pas illégaux en passant par celui que nos parangons journalistiques se pignolent gentiment sur des documents volés, jusqu’au rappel, essentiel, que l’impôt, dans un monde normal, est consenti et non extorqué comme il l’est actuellement.

Plus rares sont les analyses qui permettent de replacer ces révélations dans leur contexte mondial, et notamment dans la lutte acharnée que les États-Unis mènent depuis de nombreuses années pour, d’une part, conserver l’hégémonie de leur monnaie, d’autre part, s’assurer de rentrées fiscales conséquentes, et enfin, de rapatrier, par la force s’il le faut, le maximum de capitaux chez eux.

À ce titre, je ne peux que signaler cet article paru sur l’AGEFI qui fait un historique clair des dernières manœuvres américaines et qui, paru avant l’affaire des #PanamaPapers, prend une saveur particulière en expliquant assez bien, en creux, l’absence assez visible de ressortissant américain dans les révélations qui furent faites récemment : dès lors, ces révélations – qui semblent être tombées sans beaucoup d’efforts sur les genoux de nos frétillants journalistes – s’inscrivent assez bien dans la tendance globale d’un resserrement de l’étau américain.

taxer c'est volerUne fois les analyses techniques et les enjeux géopolitiques passés en revue, une fois écartés les cris outrés des thuriféraires étatiques et des soumis obséquieux de la ponction fiscale, il reste l’évidence que, pour l’homme de la rue, ces révélations n’en sont pas.

De tous temps semble-t-il, l’État ou ce qui en tenait lieu s’est arrogé le droit de prendre une partie des richesses obtenues par le travail des uns pour, dans le meilleur des cas, construire et entretenir des biens communs et abonder à un intérêt collectif aux définitions diablement fuyantes, ou, dans le pire des cas, agrandir la fortune d’autres, peu nombreux mais bien placés. Et de tout temps (vraiment de tous temps), l’homme de la rue s’est donc efforcé de payer ce qu’il estime juste pour cette part d’intérêt collectif, ou supportable pour la fortune de ceux qui, en échange, prétendent lui assurer une certaine sécurité. Mais à l’exception des idiots utiles et de ceux qui se sont laissés intoxiquer par les notions fumeuses et collectivistes de l’extorqueur, personne n’est réellement dupe de ce qui se passe.

Mieux : tout le monde pratique, à sa manière et à chaque fois qu’il le peut, toutes les formes possibles d’évasion fiscale et de réduction raisonnée de cette pression de l’État sur sa richesse, aussi infime soit-elle.

philosoraptor taxes

D’ailleurs, c’est exactement le sens d’un récent sondage Odaxa que rapporte Le Point : s’ils avaient « beaucoup d’argent », 19% des Français chercheraient à faire de l’évasion fiscale pure et simple. Et en se contentant d’une « situation financière aisée », le nombre grimpe à 78% dans le cas d’une optimisation fiscale, montrant d’ailleurs au passage que chacun comprend bien la différence entre les opérations effectivement illégales pour cacher ses possessions, et celles qui ne relèvent que de la légalité bien comprise.

Le Point et les analystes qui se sont penchés sur le sondage notent ensuite avidement que 83% des sondés estiment la fraude grave et, pour 88% d’entre eux, nuisible à l’économie, mais de façon encore plus intéressante, remarquent qu’un Français sur cinq accorderait son vote à un élu pourtant malhonnête, jugeant son efficacité plus importante que sa probité (au passage, le paysage politique français actuel tend à prouver que le sondage sous-estime très largement cette proportion). Pour Odaxa, cette capacité des Français à accepter ainsi quelqu’un de malhonnête s’expliquerait par certaines habitudes prises au quotidien.

Autrement dit, malgré des années de propagande pro-étatique grossière, d’incitations plus ou moins violentes à rentrer dans le rang fiscal, de campagnes de délation, malgré les discours dégoulinants de moraline d’un Camp du Bien si délicieusement pro-impôts tous azimuts, les révélations de ces #PanamaPapers sont bien loin de déclencher l’unanimité du peuple contre la fraude et sont aussi loin d’obtenir un support franc, massif et indiscutable dans la lutte contre celle-ci.

sapin et le consentement à l'impôt

Peut-être chaque Français sent-il, confusément, que cette traque fiscale au maillage de plus en plus fin ne présage rien de bon pour sa propre liberté ? Peut-être s’estompe petit à petit l’effet du gros bobard maintes fois entendu selon lequel une traque fiscale efficace permettrait des rentrées abondantes et donc un impôt plus faible ?

Il faut dire que la traque en question est tout sauf efficace, et ce d’autant plus que les politiciens sont les premiers à y échapper, notamment lorsqu’ils s’évertuent à construire des édifices légaux taillés sur mesure pour leurs petits besoins personnels.

Il faut dire que la traque en question a la curieuse manie de toujours taper sur les mêmes populations, celles de ceux qui, justement, n’ont qu’assez peu de moyens d’y échapper.

Il faut dire qu’en parallèle, même lorsque cette traque s’intensifie, et même lorsque Bercy nous pipeaute des résultats phénoménaux, les impôts continuent de grimper toujours plus haut, toujours plus fort. Autrement dit, tout indique qu’une traque efficace permet plutôt d’augmenter les impôts que les diminuer ; les naïfs qui imaginent encore qu’avec zéro fraude fiscale, le poids de la ponction serait rikiki en seront pour leurs frais : c’est exactement le contraire qui se passe en réalité.

En pratique, là où les riches font des pieds et des mains pour échapper au fisc en utilisant des montages complexes tels que ceux décrits dans les PanamaPapers, les pauvres font finalement eux aussi des pieds et des mains pour échapper à la même ponction. En fait, le Panama des pauvres, c’est le travail au noir ou les opérations hors TVA non déclarées aux administrations.

Et lorsqu’on a compris qu’en définitive, la tentative d’échapper au fisc occupe tout le monde, et ce, de plus en plus à mesure que ce dernier se montre toujours plus vorace, on ne peut s’empêcher de poser plusieurs questions :

Combien coûte, en temps, en trésor d’ingéniosité et en tracas divers l’utilisation raisonnée de ces opérations et de ce travail au noir ? Toute cette énergie dépensée pour échapper à une ponction devenue trop grande ne serait-elle pas mieux employée à produire, directement, de la richesse ?

Et que peut-on dire d’un système fiscal où, du plus riche au plus pauvre, tous s’emploient à essayer d’y échapper ? Si tant d’individus, des plus riches au plus pauvres, tentent tous d’éviter le cadre légal, le problème vient-il encore de ces individus ? Ne vient-il pas plutôt du cadre légal lui-même ?

Or, qui échappe subtilement, de façon décontractée, et tout à fait légale à ce cadre légal, si ce n’est ceux qui, justement, le définissent ?

impots et taxes
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  • On peut rajouter le panama de nos élus : plusieurs salaires == plusieurs déclarations de revenus == tranches basses du barême == pas d’impots.

    Ah oui mince, ce n’est pas de l’évasion fiscale, c’est une petite niche fiscale, auto votée bien entendu.

    • Sur la rémunération des élus, je conseille la lecture de « Pilleurs d’Etat » de Philippe Pascot. Très instructif.

  • sans doute mais le taux de recouvrement de l’impôt en France avoisinent les 98% donc au final le français fraude parce qu’il paie 🙂

    • Effectivement, la France a un taux de recouvrement phénoménal. Ce qui lui épargne le sort de la Grèce, pour l’instant. Le cout de ce recouvrement est également phénoménal, autour de 20%. Pour rejoindre l’auteur, que de ressources gaspillées!

  • L’hypocrisie hystérique est franchement marrante.
    Anecdote:
    Au RU, ma femme de ménage, non déclarée, clandestine, émarge pas loin de 40 000£ a l’année, en travaillant très dur et efficacement, soit plus que ma femme, déclarée, assistante de direction, avec certes, ses 40h/semaine.
    Je ne vois aucun intérêt a remplir des formulaires pour nous faire imposer pour 2h/semaine. Elle non plus, pour pas loin de 60 h/semaine. Below the radar is just fine, thanks very much, parce que j’ai fais le choix, interdit a vous autres cons d’anglais, de souscrire a une retraite privée et une assurance santé privée, et, accessoirement, de ne rien déclarer en revenus.
    Ma femme de menage est atterrée, scandalisée, par ces sales riches égoïstes qui font tout pour ne rien contribuer.
    Ma femme a du mal a rester calme.

    La dyslexie fiscale collective fera toujours des ravages tant que les individus ne seront capables d’analyser leur position vis a vis de l’état, et du role de moutons, passer au role de clients, libres de leurs choix, et exigeants, très exigeants, vis a vis des dépenses.

    • Habitant à Londres je doute qu’il lui reste quelques choses de convenable sur les 4000: au final elle paie tout par cash quoi, travailler au black pour arrondir les fins de moi why not mais en faire sa life mouais il a y mieux quoi…chacun fait ce qu’il veut bien entendu 🙂

  • entre ceux qui fraudent ceux qui bénéficient de niches fiscales ou sociales , il n’y a que les cloches pour payer l’impôt et y consentir..normal , ce sont des cloches , on leurs a toute leur vie seriné que le travail c’était la santé et ils l’ont cru !

  • travail au noir , ce n’est même plus un choix , c’est devenu une nécéssité pour subvenir aux besoins les plus indispensables ;

    • le travail au noir est un travail comme les autres sauf que l’on ne travaille pas pour nourrir le personnel politique et ses valets et qu’on n’attend rien en échange de l’état . c’est un travail d’avenir et on a tous les outils 2.0 pour le faire prospérer…franchement on n’a pas besoin de ses services d’ailleurs on ne les utilisent que forcé et ils ne sont JAMAIS nécessaires :
      la police…jamais d’ailleurs , ils s’en foutent avec la justice que l’on a
      la sécu…pas besoin quand on bosse
      l’école…..faut pas rigoler , sans payer c’est le futur au smic puis au RSA
      l’armée…on est en guerre ?
      les routes…..bof
      il reste quoi qu’un bon flingue ne peut pas régler ?

  • Rajoutez « l’impôt consenti » qui consiste à promettre un gain en échange d’une obole (2€) pour une multiplication de la mise de départ quasi stratosphérique: le Loto. Sachant que la majorité de l’obole est absorbée par l’Etat.

  • C’est un secret bien gardé, c’est d’ailleurs ce qui a fait bondir le plus les états-majors dont celui de Bercy, mais je veux bien parier que le montant des impôts non payés (au sens du montant initial de la fraude et non sa multiplication sous l’effet des amendes et autres) est inférieur à celui résultant des négociations occultes qui sont le privilège de Bercy. Et qu’il en est de même pour toutes les grandes nations ou presque.
    C’est cette inégalité de traitement qui fait bondir nombre d’entre nous. Entre les barrières à l’entrée des carrés protégés, l’alourdissement des contraintes brutes non reportables qui impairent systématiquement davantage à périmètre inférieur et cette distinction entre corvéables et négociables, les entrepreneurs ne s’y retrouvent plus.
    De l’autre côté, on agite l’impôt sur le revenu comme étendard, occultant la succession et l’accumulation d’impôts et taxes en tout genre, que ce soit via les consommation de services obligatoires ou les contraintes sur les prix imposées par les distorsions de marché que provoque l’interventionnisme intéressé de l’état ou de ses obligés.
    Là aussi, les sommes en jeu dépassent largement tous les montants considérés ici.
    Si au moins on libérait le temps concerné, mais non. Toutes les réformes se traduisent par une extension de la lutte et un accroissement des péripéties administratives et fiscales avec son cortège de risques induits. Et c’est encore pire depuis la vague de simplification datant de quelques décennies maintenant.

  • Les commentaires sont fermés.

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