L’anti-modèle européen

L’Europe, caractérisée par un excès de prélèvements et de réglementations, est devenu un contre-exemple pour les nations soucieuses de prospérer.

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Drapeau européen (Crédits Erwan F, licence Creative Commons)

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L’anti-modèle européen

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 24 août 2015
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Par Daniel J. Mitchell, depuis les États-Unis.

Drapeau européen (Crédits Erwan F, licence Creative Commons)
Drapeau européen (Crédits Erwan F, licence Creative Commons)

 

Bernie Sanders, le sénateur pseudo-socialiste du Vermont, considère que l’Amérique doit s’inspirer de l’Europe. Il n’a pas tort. Sans pour autant avoir raison. Puisqu’il pense que l’Europe est un modèle à suivre au lieu de la voir comme le contre-exemple qui indique les erreurs à éviter. Eh oui, même le président Obama a insisté sur le fait que les États-Unis sont plus performants que leurs homologues européens.

Dans sa chronique du Washington Post, le journaliste économique Robert Samuelson tire la sonnette d’alarme : ce serait selon lui une erreur de suivre le modèle européen caractérisé par davantage de prélèvements et un excès de réglementation. Il débute son propos avec (ce qui devrait être) un point évident concernant la réponse des entreprises face aux hausses salariales.

« Nous pouvons apprendre de l’Europe à propos de la création d’emplois, et de nombreux Américains devraient méditer la leçon suivante : si vous fixez le prix de la main-d’œuvre à un niveau trop élevé – en payant les travailleurs plus qu’ils ne produisent – les entreprises périclitent ou arrêtent d’embaucher. »

Il souligne ensuite que les mauvaises politiques en Europe conduisent à de mauvais résultats.

« L’économie de l’Europe est dans le marasme. La croissance dans la zone euro est faible (…) Le chômage de la zone euro est de 11,1%, à peine inférieur à son plus haut d’environ 12%. Cela contraste avec la chute du taux de chômage aux États-Unis, passant de 10% en octobre 2009 à 5,3% aujourd’hui. »

Et quelles sont, exactement, ces mauvaises politiques qui plombent l’Europe ? Pour faire simple : les États imposent trop de charges au secteur productif de l’économie.

« Dans un article passionnant du dernier Journal of Economic Perspectives, l’économiste Christian Thimann, un ancien haut conseiller de la Banque centrale européenne, actuellement en poste à la banque d’investissement française AXA, fait valoir que la crise de la dette et la faiblesse de la reprise en Europe proviennent des coûts de main d’œuvre élevés. « On ne parvient plus à créer d’emplois dans bon nombre de pays de la zone euro non en raison d’une « insuffisance de la demande », comme on le prétend souvent, mais plutôt parce que les coûts salariaux sont trop élevés par rapport à la productivité, parce que les charges sociales et fiscales sont lourdes et parce que l’environnement des affaires est trop pesant », écrit Thimann. »

Ce qui nous ramène au point soulevé par Samuelson au départ :

« Si les coûts engendrés par les nouveaux travailleurs surpassent les gains attendus en matière de hausse de chiffre d’affaires et de profits, les entreprises embaucheront moins ou plus du tout. »

Et au cas où les conséquences ne paraîtraient pas évidentes, il les explicite clairement :

« Nous ne devrions pas ignorer les implications de tout ceci pour les États-Unis. (…) Il est tentant de faire supporter le coût des politiques sociales par les entreprises. (…) L’« Affordable Care Act » (c’est-à-dire l’Obamacare) oblige les entreprises à fournir une assurance santé pour les travailleurs ; un salaire minimum de 15 $ augmenterait fortement les coûts de main d’œuvre pour de nombreuses entreprises ; et il y a des propositions en faveur de congés maladie ou de congés maternité obligatoires. Tous ces dispositifs semblent être de nobles causes, mais nous devons être attentifs aux conséquences imprévues. Si nous rendons l’embauche trop chère, il y aura moins d’embauche. »

Amen. Comme je l’ai déjà souligné, les entreprises ne sont pas des organismes de bienfaisance. Elles ne vont pas embaucher de nouveaux travailleurs si cela signifie une baisse des profits !

L’Europe a donc déployé nombre de ces politiques, si bien que le chômage est plus élevé. Et nous avons des politiciens en Amérique qui veulent reproduire les erreurs de l’Europe.

Mais le problème n’est pas seulement que les hommes politiques rendent l’embauche plus chère. Les mauvaises politiques étatistes rendent plus coûteux à peu près n’importe quoi.

Le quotidien britannique The Telegraph expose comment certains États européens rendent d’autres activités économiques inutilement coûteuses et compliquées.

« Faire des affaires au Portugal, en Irlande, en Italie, en Grèce et en Espagne est plus compliqué, plus coûteux et plus lent que dans les pays voisins, plus forts économiquement. (…) Observer le temps moyen pour obtenir un permis de construction, être connecté à un réseau électrique, exécuter un contrat et exporter des marchandises explique les écarts économiques. »

Ce graphique montre que le problème est particulièrement aigu en Europe du Sud.

EU-Regulatory-Burden

Terminons avec une remarque très importante sur les différences au sein de l’Europe. Alors qu’il est parfois utile et intéressant d’effectuer des comparaisons entre les grandes zones économiques (comparaison des taux de chômage de l’UE et des États-Unis ou comparaison des revenus moyens de l’UE et des États-Unis), il est également important de réaliser que les nations européennes (nonobstant les pressions pour l’harmonisation, la centralisation et la bureaucratisation de la Commission européenne) ont encore des marges de manœuvre considérables pour déterminer leurs propres politiques économiques.

Et si vous consultez attentivement les indices de liberté économique dans le monde vous verrez que les pays d’Europe du Nord comme la Finlande (classée 10e), le Danemark (19e), l’Allemagne (28e) et les Pays-Bas (34e) peuvent tous être considérés comme pro-marché libre, tandis que les pays d’Europe du Sud comme l’Espagne (51e), la France (58e), l’Italie (79e) et la Grèce (84e) sont beaucoup plus bas dans le classement.

Les pays nordiques sont particulièrement intéressants. Ce sont de grands États-providence, mais qui adoptent des politiques très pro-marché dans d’autres domaines. Donc, pour revenir sur les affirmations du sénateur Sanders, nous pouvons effectivement tirer quelques bonnes leçons des pays scandinaves dans d’autres domaines que celui de la politique budgétaire.


Sur le web. Traduction : Raphaël Marfaux pour Contrepoints.

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