Le train de la reprise va dans le mur

L’économie ne se remet pas, et ne peut pas se remettre, tant que les politiciens s’occupent de son cas.

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Le train de la reprise va dans le mur

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 4 juin 2015
- A +

Par Bill Bonner.

Train_Montparnasse (Image libre de droits)

« Bill, vous admettez que vous êtes souvent en tort… ou ‘en avance’… » commence une lettre sympathique, « alors en quoi êtes-vous différent de tous les autres économistes de Wall Street ? »

C’est une bonne question. Et petit à petit, nous finirons par y répondre.

D’abord, nous rappellerons à nos lecteurs que notre opinion, inchangée depuis les tréfonds de la crise en 2009 jusqu’à aujourd’hui, est non seulement que l’économie ne se remet pas, mais qu’elle ne peut pas se remettre, pas tant que les autorités s’occupent de son cas.

Aujourd’hui, nous avons encore plus de preuves. Six ans après que le train de la « reprise » a soi-disant quitté la gare, le PIB US recule à nouveau. Les autorités elles-mêmes l’affirment dans leurs derniers chiffres, qui viennent d’être révisés. Selon les statistiques, l’économie américaine a reculé de 0,7% au premier trimestre. La croissance des dépenses des ménages, parallèlement, a été divisée par deux depuis le dernier trimestre 2014.

S’il y a une reprise, ce n’est franchement pas visible dans ces chiffres. Ce qui ne devrait pas vous surprendre. Au lieu de se débarrasser de dettes excessives et impayables, les autorités en ont rajouté une couche. Selon McKinsey, 57 000 milliards de dollars ont été ajoutés aux niveaux de dette mondiaux depuis le creux de 2009. Pire : le crédit bon marché a transféré la richesse réelle des gens ordinaires vers l’industrie financière. De la sorte, le système tout entier a été perverti… et la croissance réelle a cessé. Après tout, c’est dans l’économie ordinaire, les usines et les entreprises, que la richesse est créée ; pas à Wall Street.

Les riches, qui possèdent des actifs financiers, sont devenus plus riches. Les pauvres, les jeunes et la classe moyenne, n’ayant que leur labeur à offrir, sont devenus plus pauvres. Le marché boursier à lui seul a plus que doublé la valeur nette des actionnaires depuis 2009. Mais il n’a rien ajouté à la valeur nette des travailleurs, comme l’illustre le calcul suivant : en 1982, un travailleur américain moyen pouvait acheter le S&P 500 tout entier avec 15 heures de son temps de travail.  À présent, le malheureux devrait travailler deux semaines et demie.

Le système est corrompu… et dangereusement dysfonctionnel

Mais pourquoi est-ce que personne ne le dit ? Les faiseurs d’opinion comme Paul Krugman et Larry Summers comprennent de travers, intentionnellement. Comme si les autorités n’avaient pas déjà dressé assez d’obstacles, ils en veulent plus. « Plus de réglementation ! » « Plus de redistribution ! » « Plus de crédit, plus de dépenses, plus de dettes, plus de guerres, plus de plans insensés de toutes sortes ! »

Ils veulent plus de « gestion » de la part de ceux-là même qui ont déjà causé ce gigantesque gâchis, des gens comme eux. Et l’élite (ainsi que tout le monde ou presque) est à 100% derrière eux. Ils sont décidés à essayer de protéger et prolonger l’économie magique des trois dernières décennies. Cette économie a été rendue possible par une gigantesque augmentation de la dette… qui a mené à d’énormes augmentations des actions, des obligations, de l’immobilier, de l’art contemporain et des bonus dans l’industrie financière. Personne ou presque ne veut voir prendre fin les trois décennies passées.

Mais qui parle pour les trois prochaines décennies ? Qui parle pour M. et Mme Tout-le-Monde… pour les jeunes… pour l’avenir inconnu, rempli de surprises ? Qui se tient avec les anges mystérieux, invitant une dépression pour balayer les erreurs des trois dernières décennies… et encourageant la destruction créatrice pendant qu’elle assomme le capitalisme de copinage et affame les zombies ?

Nous !

C’est là l’idée que nous cherchons à faire comprendre depuis le début. Tout le monde veut plus de crédit, plus d’inflation, plus de bulle, plus de subventions et plus de privilèges. Qui est de l’autre côté ? Quasiment personne.

Mais ces 20 dernières années, nous avons construit un réseau de chercheurs, d’analystes, d’économistes et de penseurs qui soit indépendant de l’industrie financière, du gouvernement et des milieux universitaires. Pas de copinage. Pas de zombies. Pas de poudre aux yeux, pas de miroir aux alouettes.

Notre devise : nous avons parfois raison… nous avons parfois tort… et nous doutons toujours.

Comment en est-on arrivé là ?

Chaque jour, nous essayons de relier les points. Comment se fait-il que les banques centrales, les grandes entreprises, la finance, le gouvernement et les chercheurs universitaires sont tous du côté de politiques qui ne fonctionnent pas ? Comment se fait-il que les seniors… et notamment les baby-boomers vieillissants… en sont venus, eux aussi, à se mettre du côté du diable ?

Nous ne faisons pas seulement allusion aux politiques financières et monétaires des six dernières années, mais à un biais plus profond et plus pernicieux. Depuis l’administration Carter, le gouvernement américain, tout comme la majorité des gouvernements occidentaux, accumule des déficits budgétaires persistants, faisant passer, dans les faits, les coûts des avantages actuels sur les épaules des salariés de demain. La Fed lutte contre des corrections du crédit, tout en permettant des bulles du crédit, depuis les années 80. Et depuis six ans, les autorités défendent si activement et agressivement le passé que l’avenir n’a pas une seule chance.

Il était évident, dès le départ, qu’ajouter plus de dettes, de renflouages et de réglementations pesantes n’allait pas faciliter le progrès. La reprise était toujours « juste au coin de la rue », nous disait-on. Mais à chaque coin passé, aucune reprise n’était révélée. À présent, on vient de prendre un nouveau virage… et le train ne va nulle part !

Il y a moins de véritables emplois aux États-Unis qu’il y a 15 ans. Les revenus des ménages sont eux aussi plus bas. On pourrait croire que Janet Yellen lèverait les bras au ciel : « vraiment, ce qu’on fait ne fonctionne pas. On va donc arrêter ».

Aucune chance. Autant demander à l’armée US, la CIA, la NSA et à tous les fournisseurs du secteur de la défense d’admettre : « Ces guerres au Proche-Orient ne mènent nulle part. Franchement, on ne sait même plus qui est ennemi de qui est ami. À partir de maintenant, on va laisser les autochtones régler leurs propres problèmes. »

Cela n’arrivera pas.

Parce que le système tout entier a été corrompu par l’argent facile des autorités.

À suivre…

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Créer un compte Tous les commentaires (14)
  • Comment se fait-il que les banques centrales, les grandes entreprises, la finance, le gouvernement et les chercheurs universitaires sont tous du côté de politiques qui ne fonctionnent pas ?

    Si si cela fonctionne : ils peuvent rester au pouvoir et accessoirement s’en mettre plein les poches.

  • Ce n’est pas gentil de dénigrer nos si chers (dans tous les sens du terme) et si géniaux politiques …
    Tout va mieux (pour eux) depuis ce qu’il est convenu d’appeler « la crise »
    Les comptes se redressent (pas les miens les leurs)
    Mes enfants à bac + 5 trouvent tous du travail (à Pôle emploi)
    Mon médecin va bien (il est parti en retraite et depuis personne)
    Mes impôts ont baissé (c’est pour rire)
    Je me passionne pour la vie politique (plutôt pour mon jardin)
    Je suis manipulé à tout va par tous les médias aux ordres et mon neurone commence à griller (pour me protéger je ne lis plus la presse écrite et zappe les infos à la télé)

    Alors ces politiques là qu’il s’agisse de la gauche décadente ou de la droite avec le retour de l’agité du bocal, ils peuvent bien se brosser pour que je prète une oreille attentive à leurs élucubrations schizophréniques.

  • Marc, je note que vous n’avez aucun respect pour les clowns qui gèrent notre pays aidés en cela par tous ces spécialistes en économie et banquiers qui leur prodiguent de judicieux conseils

  • Bel état des lieux, mais quelles sont les solutions ?
    Une crise énorme comme en Grece ou en Espagne pour que les gens votent pour des politiens d’un nouveau genre ?
    Ou les développements des initiatives citoyennes et durables parce que l’etat ne fait plus rien de réaliste ?
    Personnellement, j’ai fait le choix de mettre mon épargne dans une banque durable, j’ai moins d’interets, mais je pense que mon argent sert à faire avancer les choses durables…

    • politiciens d’un nouveau genre ????
      Tu n’a rien compris. Siriza et Podemos sont au contraire l’archétype des politiciens à l’ancienne, démagogues et drogué à l’argent gratuit des autres via la banque centrale.
      Mais au fond c’est logique, ça va avec ton choix de « mettre ton épargne dans une banque durable », c’est à dire une banque qui promeut en fait l’inefficacité, le gaspillage. Moins il y a de production d’intérêt, moins le projet est rentable, moins il est durable.

      • Je veux bien discuter de Siriza et Podemos mais je suis outré par vos propos sur les banques durables. Je suis convaincu que ce type de banques est bien utile. Comment pouvez vous dire  » le gaspillage. Moins il y a de production d’intérêt, moins le projet est rentable, moins il est durable » ?
        c’est n’importe quoi.
        Triodos existe depuis les années 80, se développe dans de nombreux pays, a prouvé qu’elle avait une évolution stable, contrairement aux banques traditionnelles. Sa politique est d’avoir une tension salariale de 10 maximum, ce qui veut dire que le plus gros salaire ne peut pas dépasser 10x le plus petit.
        Il n’y a pas d’inefficacité et de gaspillage, les interets sont réguliers et durables, contrairement au fond spéculatifs, qui peuvent tout perdre en peu de temps…
        Enfin, mettez votre argent où vous voulez, les fonds sur l’alcool, le tabac et les assurances décès rapportent à fond, c’est sur que ça changera pas la société.

    • Perso, j’ai rien contre les banques durables mais par contre: « pour que les gens votent pour des politiciens d’un nouveau genre  » juste lol. ces partis de gauche surtout podemos est très proche d’ne partie de la gauche sud américaine (la gauche chaviste) dont on voit les résultats économiques désastrueux. le plus inquiétant c’est que face a désastre économique, ils sont de plus en plus autoritaires. déja qu’à la base, ils n’étaient pas spécialement très démocrates.
      Syriza me fait aussi pensé au PASOK des année 80 (qui a justement ruiné la Grèce). Je ne vois pas en quoi on peut parler de renouveau.

  • 22 000 Chômeurs en plus : 120 000 en réel.
    Ohh les vilains Cameron du RU, Merkel d’Allemagne, qui créen des emplois non payés d’après les Socilialistes Jaloux.
    Président d’Espagne Mr. Rajoy
    Mars : 165 000 Chômeurs en moins et 76 000 entreprises nouvelles crées.
    Avril : 119 000 Chômeurs en moins. et 56 000 entreprises nouvelles crées.
    Mai : 117 000 Chômeurs en moins et 106 000 entreprise nouvelles crées.
    3 Mois : 401 000 Chômeurs en moins 238 000 nouvelles entreprises.

    Malgré de tels chiffres, il n’a pas eu de bonnes élections : il les a gagné, mais sans enthousiasme.

    • C’est vrai que de son côté, notre gouvernement a perdu les élections intermédiaires, mais avec enthousiasme, et il est toujours en place.

      • Avec 23% de Français qui lui font confiancce, c’est une victoire à la Pyrrhus! Et plus les Français attendent mieux ils vont cumuler la crise du remboursement et la crise du désert économique. Je ris d’avance quand on va penser à diminuer le nombre des fonctionnaires ou leur rémunération: grève au finish et démission du « pouvoir » garantis: là, la France sera vraiment foutue, comme dirait « h16 ».

      • Il a encore des chances d’être réélu, si MLP est au second tour avec lui. Il doit dissuader ses alliés de se présenter au premier tour, pour lui assurer d’être présent au second tour.

        Mais vu la politique en fRance, cela fait en pratique peu de différences. Juste une coloration, comme les teintes de cheveux.

        • Je suis Belge, mais si le choix en France se résumé à MLP, Sarko et ses casseroles et Flamby, je vous plaint.

          • en Belgique, c’est pas bcp mieux. Et dire que le MR est censé être un parti libéral. Aujourd’hui, il n’y a plus de partis socialistes dans le gouvernement fédéral, donc les partis a pouvoir n’ont aucunes excuses pour justifier leurs politiques socialistes. Les partis politiques tiennent plus à des organisations mafieux remplis de carriéristes q’à de véritables partis politiqes

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