Qui sert qui ?

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Qui sert qui ?

Publié le 3 juin 2015
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Cela fait des mois que l’idée est en l’air. Cela fait des années que je vous relate les tentatives pitoyables des politiciens français pour tenter de taxer par tous les moyens les géants de l’internet, et notamment en s’attaquant à la bande-passante. C’est donc sans surprise, mais avec une assez grande lassitude qu’on découvre, encore une fois, une tentative de Bercy pour – à nouveau ! – taxer la bande-passante.

Alors qu’en 2010, le sénateur Marini avait proposé de taxer certains flux en tabassant les annonceurs publicitaires sur internet, alors qu’un peu plus tard, il s’était agi de faire payer certains acteurs (fortuitement américains) en fonction du volume de données personnelles collecté et détenu, alors que Fleur Pellerin (à l’Économie Numérique à ce moment-là) s’y était essayée il y a deux ans puis il y a quelques mois (à la Culture) sans grand succès, c’est donc au tour d’Emmanuel Macron de revenir à la charge avec toujours les mêmes arguments moisis : les pov’zopérateurs se font bouffer toute leur gentille bande-passante par les méchants zaméricains, et pour le moment il n’y a pas d’autre solution que de demander de l’aide au gouvernement qui pourra se rattraper en bombardant le contribuable qui a les poches très profondes.

Cette idée revient trop souvent, depuis trop longtemps, et les fonds manquent si cruellement à l’État français qu’il faut s’habituer, dès à présent, à ce que votre bande-passante soit prochainement taxée.

Tax Money

Eh oui, encore une fois, vous allez être amené à la tonte. Oh, bien sûr, on prétendra présenter la facture aux industriels, mais ceux-ci se contenteront, en toute logique, de la reporter, au moins en partie si ce n’est en totalité, aux clients finaux. Que voulez-vous : vous pouvez toujours mettre une taxe sur le lait, ce ne sera jamais la vache qui la payera. Et le plus agaçant, de loin, est que cette taxe n’est en réalité réclamée par personne à l’exception des habituels ponctionnaires, et surtout pas par ceux qui devront en subir la charge une fois mise en place, c’est-à-dire essentiellement… les consommateurs.

Devant cette énième introduction d’une taxe à marche forcée, je ne peux m’empêcher de me demander combien de temps encore le peuple français – et dans une moindre mesure, le reste du monde aussi – va supporter cette domination systématique des États sur sa vie. Combien de temps faudra-t-il pour que chaque consommateur, puis chaque contribuable, puis mieux encore, chaque citoyen se rende compte qu’il est devenu l’esclave servile et constamment humilié de celui qui était désigné, au départ, pour l’aider, le protéger, et le servir ?

Regardez les choses en face : non, l’État n’est pas là pour organiser la ponction. Il n’a jamais été destiné à mettre son peuple sous le joug, pas plus qu’il n’a été conçu pour dénombrer le cheptel, en prendre les appétissantes mensurations, avant de le tondre, le découper ou le ponctionner autant qu’il lui plaît.

Dans un monde normal, dans lequel le citoyen contrôle effectivement les institutions, l’État doit demander, obséquieusement, avec la plus grande humilité, l’autorisation d’avoir le droit d’espérer obtenir éventuellement un pécule de la part du citoyen. Moyennant quoi, ce dernier lui accorde (ou non) cette autorisation, après un calcul éventuel. Encore mieux, le citoyen peut même déterminer a priori les postes de dépenses qu’il souhaite affecter à l’argent qu’il consent à donner.

La réalité est bien sûr un tantinet différente : l’État pioche ce qu’il veut, le citoyen doit se taire. L’État lui rend éventuellement s’il estime, de son propre chef, avoir trop pris. Parfois, il n’en fait rien. Dans les deux cas, le citoyen doit se taire. Et si l’État veut tout prendre, ce qu’il ne manquera pas de faire dans les prochains mois en France lorsque la situation partira en sucette, le citoyen devra aussi se taire.

pawel kuczynski - oppression fiscale
pawel kuczynski – oppression fiscale

Effectivement, on a complètement oublié qui sert qui. On a même inversé les rôles. Seuls quelques gauchistes pathétiques aux pulsions totalitaires mal contrôlées s’en réjouissent encore. Et seuls quelques naïfs sociodémocrates croient encore aux vertus démocratiques censées mettre un frein aux ardeurs étatiques… La bonne blague.

Non, décidément, on a complètement oublié que dans un monde normal, c’est le politicien qui sert l’électeur, et non l’inverse. Dans ce pays où l’électeur n’est plus qu’une clef pour la serrure des caisses publiques desquelles couleront les picaillons par millions, le politicien ne répond plus de ses agissements et n’a plus d’ordre à recevoir de son électeur qu’aux douloureux mais trop, bien trop rares moments du vote. Il n’est qu’à voir le luxe de précautions dont s’entourent les personnages de l’État, les élus et les politiciens en vue pour ne pas être en contact trop direct avec la foule, avec ce peuple qui l’a mis là, pour bien comprendre qui sert qui, qui se sert, et qui finance.

Décidément, on a totalement désappris que c’est le fisc qui devait servir le contribuable et non l’inverse. Dans un monde normal, une association à but non lucratif comme devrait être l’État, qui reçoit chez elle des donateurs qui amènent, tous les ans, des centaines de milliards d’euros (oui, des centaines de milliards !), ferait l’effort d’ouvrir toutes grandes ses portes, offrirait de bons fauteuils moelleux voire un petit café en cas d’attente, et finirait tout entretien par un merci presque obséquieux et, le regard inquiet, par la question rituelle « Vous reviendrez bien l’année prochaine, s’il vous plaît, dites ? »

En lieu et place de quoi, on a le droit à des horaires alambiqués, des réceptions glaciales, un guichet froid et des explications volontairement confuses pour extirper le maximum d’argent sous la contrainte. Et c’est vrai pour tous les services publics en général, qui sont devenus une illustration parfaite de ce parfait renversement de valeurs, où celui qui paye, lourdement, de sa sueur et de son temps, est reçu comme un chien, devant des grilles, appelé par un numéro inscrit sur un petit ticket de papier recyclé, et comment vous n’avez pas le Cerfa 27B-6 ? Ah mais désolé il va falloir revenir…

distributeur de tickets d'attente

On a oublié qui sert qui, et qui, du policier ou de l’honnête citoyen, doit défendre qui (non, l’embuscade avec un radar n’est pas une protection, désolé). On a omis qui rapporte à qui, qui doit respect à qui. Non, messieurs les élus, je ne vous dois que le respect qu’on doit à un majordome, et encore, disons un intendant qui sabote son travail et celui des maîtres du château.

Et ayant ainsi inversé, petit-à-petit, mais complètement, la hiérarchie, on en a inversé le sens des valeurs, le sens du respect, et le sens des devoirs. Tout à coup, le citoyen doit son consentement à l’impôt. Il doit se rendre à tel guichet, à tel administration, à tel rendez-vous fixé par une autorité qu’il paye de son travail. Il est convoqué par l’élu, le ministre, le président comme un larbin auquel il doit obéissance. Il doit laisser le passage aux cortèges officiels. Il doit faire des efforts, il doit payer, il doit surtout se taire et mieux encore qu’encaisser… décaisser.

Et devant tel renversement, nombreux sont alors ceux qui s’étonnent que les enfants ne respectent plus les enseignants, que les policiers maltraitent l’honnête citoyen, que le fisc harcèle le contribuable ou que le politicien méprise presqu’ouvertement le citoyen.

Quelque part, à un moment donné, ce citoyen s’est fait monumentalement entuber.

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  • Tout cela ne donne pas envie de créer de la richesse. Nos entrepreneurs trouvent des pays bien plus accueillants. Pauvre Phrance, vive que renaisse la France.

  • Triste et vrai.

    Nous assistons à la même « dégénérescence » en Suisse où les politiciens ont peu à peu compris que le cheptel électoral – le terme est approprié – voterait quasiment toujours pareil aux élections, peu importe ce qu’ils font. Pour les référendums c’est ponctuellement différent mais cela reste anecdotique ; par exemple, un politicien pourra complètement nier une décision populaire, il gardera son poste.

  • on cible Google et Amazon et on tue les start-ups du cloud-computing françaises. Si la loi sur le renseignement n’était pas suffisante, voilà que les choses sont réglées.
    Même s’il y a de forte chance que l’introduction de cette taxe va encore une fois échouer (comme la taxe sur les emails, les SMS, etc.) pourquoi lancer son entreprise en France avec cet épée de Damoclès au dessus de la tête.

  • le citoyen c’est fait entuber un certain 14 juillet 1789 , d’homme il devint citoyen ,de sans culottes il devint sans dents , on lui offrit la voiture pour qu’il servent mieux la république ..mais c’est trop de liberté alors on la lui retire , depuis il ne vit plus qu’a travers son portable le peu de liberté lui restant encore mais pas pour très longtemps ….

  • Excellent article. J’aime beaucoup l’analogie entre l’Etat et une association à but non lucratif. Merci Monsieur Hache Seize. Vous reviendrez bien demain, s’il vous plait dites? 😉

  • N’oubliez pas de préciser que cette mesure taxatoire est quasi mondiale, les USA sont également sur les rangs. Au delà de prélever de l’argent afin d’entretenir un train de vie toujours plus dispendieux, l’état conforte ainsi son pourvoir car, il est facile de prévoir que cette taxe, une fois appliquée ne pourra qu’aller croissant et limitera ainsi, par effet de seuil, l’accès du plus grand nombre à internet, cherté oblige.

  • Croire qu’un état sera au service des citoyens c’est croire à une nature humaine contraire à la réalité.

    Le premier texte libertarien du monde mettait déjà en garde contre cette situation, il s’agit du chapitre 8 du 1er livre de Samuel, dans la Bible :

    Samuel rapporta toutes les paroles de Yahweh au peuple qui lui demandait un roi.

    Il dit: «Voici quel sera le droit du roi qui règnera sur vous: Il prendra vos fils, et il les mettra sur son char et parmi ses cavaliers, et ils courront devant son char.
    Il s’en fera des chefs de mille et des chefs de cinquante; il leur fera labourer ses champs, récolter ses moissons, fabriquer ses armes de guerre et l’attirail de ses chars.
    Il prendra vos filles pour parfumeuses, pour cuisinières et pour boulangères.
    Vos champs, vos vignes et vos oliviers les meilleurs, il les prendra et les donnera à ses serviteurs.
    Il prendra la dîme de vos moissons et de vos vignes, et la donnera à ses courtisans et à ses serviteurs.
    Il prendra vos serviteurs et vos servantes, vos meilleurs boeufs et vos ânes, et les emploiera à ses ouvrages.
    Il prendra la dîme de vos troupeaux, et vous-mêmes serez ses esclaves.
    Vous crierez en ce jour-là à cause de votre roi que vous vous serez choisi, mais Yahweh ne vous exaucera pas.»
    Le peuple refusa d’écouter la voix de Samuel; ils dirent: «Non, mais il y aura un roi sur nous,
    et nous serons, nous aussi, comme toutes les nations; notre roi nous jugera, il marchera à notre tête et conduira nos guerres.»

  • Excellent article, si proche de mes propres pensées. Je reconnais que j’ai été un serviteur bien docile jusqu’à présent. L’ennui, c’est que le ras le bol est venu d’un coup et que je serais facilement révolutionnaire maintenant. Mais pour quoi ? Pour qui ? 1789 nous a montré que non seulement le système n’avait pas changé (seules les têtes l’ont été) mais que la période qui a suivi a été l’une des pires de notre histoire pour finalement aboutir à un régime militaire (certes éclairé mais militaire quand même).
    Alors que faire ? Le vote ne sert à rien, la moindre velléité de résistance pacifique nous fait passer pour de dangereux terroristes SOCIAUX…Ne nous reste t’il que la lutte armée ?
    Triste constat….

  • Quelque part, à un moment donné, ce citoyen s’est fait monumentalement entuber.

    Oh là, je sens un instant d’optimisme. Ce ne serait pas totalement, et/ou longuement ❓

    Le politocard, pas poli pour un sous, fait exprès de bégayer au moment opportun.
    « Le politicien sert » devient « Le politicien se sert », largement dans la caisse publique puisque c’est gratuit, ben oui c’est pas lui qui paye…
    S’il le faut on passera de 8 à 4 Mb/s de débit …)

  • Que des politiciens nous narguent en France , Suisse ou ailleurs ce n’ est pas étonnant puisque les gens comme on le voit dans de nombreux comm et articles sont assez stupides pour croire qu’ ils votent en les élisant ce qui est exactement le contraire puisque ils les élisent pour ne pas voter !
    c’est difficile à comprendre hein ?
    Le jour ou les Maryvonne de France et Navarre comprendront ça ! c’ est pas gagné ! très loin …

  • Je crains que vous n’ayez raison. La France est communiste dictature et il faudra faire un plan (avec des réunions avec un ombre pléthorique de participants pour mettre en place des procédures un avenant à un contrat,

  • Les commentaires sont fermés.

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