7 stratégies de manipulation pour les nuls [REPLAY]

7 règles qui peuvent vous permettre de vous interroger sur la manière dont on vous informe…

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7 stratégies de manipulation pour les nuls [REPLAY]

Publié le 25 décembre 2014
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La rédaction de Contrepoints vous propose de redécouvrir d’ici la fin de l’année les articles phares de 2014. Aujourd’hui, un article de Michel Gay.

Par Michel Gay.

guignol credits le guignol à roulettes (licence creative commons)

Ce petit bréviaire des sept stratégies de manipulation à l’usage des « nuls » est inspiré par les « Dix stratégies de la manipulation » (et les multiples variantes) qui sont en accès libre sur internet. Bien que ce texte soit un « hoax » (canular) attribué à tort au linguiste et philosophe américain Noam Chomsky, les méthodes énoncées sont intéressantes car elles semblent être appliquées dans les sociétés humaines avec une remarquable permanence depuis l’antiquité. Elles auraient cependant pu servir d’introduction à deux de ses livres1 : La fabrication du consentement et Armes silencieuses pour guerres tranquilles qui sont de violentes critiques de la manipulation de(s) masse(s).

1) La stratégie de la distraction

Élément primordial du contrôle social, la stratégie de la distraction consiste à détourner l’attention du public des mutations importantes décidées par les élites politiques et économiques (comme la transition énergétique par exemple…) grâce à un flot de distractions et d’informations insignifiantes. Elle est d’inspiration romaine et antique : « panem et circenses » (du pain et des jeux). Le football, les jeux en réseau et certaines émissions de télévision en sont les versions modernes.

2) Créer des problèmes puis offrir des solutions (stratégie du pourrissement)

Cette méthode est aussi appelée « problème-réaction-solution ». Elle consiste à créer une « problématique sociale » d’où naîtra une demande populaire. En clair, on crée d’abord un problème (ou on laisse se détériorer une situation) pour susciter une réaction du public, afin que celui-ci soit lui-même demandeur des mesures qu’on souhaite lui faire accepter.

Un directeur de cabinet ministériel disait : « on sait ce qu’il faut faire, mais on ne le fera pas parce que la population n’est pas mûre ». Par exemple : les prisons sont saturées mais construire des prisons donne une mauvaise image (encore plus pour un gouvernement « de gauche »). Quelques reportages bien tournés montrant la promiscuité intolérable des prisonniers susciteront une réaction d’indignation de la population qui applaudira à l’annonce de nouvelles constructions « humanitaires ». On pourra aussi laisser se développer « un désordre social inacceptable », comme la violence urbaine, afin que la « vox populi, vox dei » soit demandeur de moyens supplémentaires pour les forces de l’ordre.
Le public est souvent myope. Il n’accepte le changement que lorsqu’il y est contraint ou ému et, lorsqu’il le demande, il est souvent bien tard.

3) La stratégie de la gradation (ou des paliers successifs)

Découlant du point précédant, la stratégie de la gradation permet de faire accepter une mesure inacceptable, il suffit de l’appliquer progressivement, en « dégradé », sur une durée de plusieurs années. C’est de cette façon que des conditions socio-économiques radicalement nouvelles peuvent être acceptées par une population où chacun défend son pré carré, ses habitudes et « ses avantages acquis ».

4) La stratégie du différé

Une autre façon de faire accepter une décision impopulaire est de la présenter comme « douloureuse mais nécessaire », en obtenant l’accord du public dans le présent pour une application dans le futur. Il est toujours plus facile d’accepter un sacrifice futur qu’un sacrifice immédiat. D’abord, parce que l’effort n’est pas à fournir tout de suite. Ensuite parce que le public a toujours tendance à espérer naïvement que « tout ira mieux demain », et que le sacrifice demandé pourra être évité. Enfin, cela laisse du temps au public pour s’habituer à l’idée du changement, et pour l’accepter le moment venu.

5) Infantiliser le public

La plupart des publicités et des discours utilisent des arguments et un ton particulièrement infantilisants, comme si le public était un enfant. Lui faire croire par exemple que, sans énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) et sans nucléaire, il va pouvoir vivre de partage, d’amour, de vent et de soleil grâce à la « transition énergétique » est une présentation séduisante pour des immatures. Certains y croient, comme on croit au Père-Noël. « Si on s’adresse à une personne comme si elle était âgée de 12 ans, alors, elle aura une réaction aussi dénuée de sens critique que celle d’une personne de 12 ans2« .

6) Faire appel à l’émotionnel plutôt qu’à la réflexion

Faire appel à l’émotionnel est une technique classique pour court-circuiter l’analyse rationnelle, et donc le sens critique des individus. De plus, l’utilisation du registre émotionnel permet d’ouvrir la porte d’accès à l’inconscient pour y implanter des idées, des désirs, des peurs… comme la peur des radiations, des OGM , des « petites ondes » et plus généralement de l’industrie et de la science.

7) Désinformer pour maintenir le public dans la culpabilité, l’ignorance et la bêtise

Comme ce fut le cas pendant des siècles lorsque la connaissance était tenue par la noblesse le clergé. Le public, les journalistes et la plupart des élus sont aujourd’hui incapables de comprendre les technologies et les méthodes de désinformation. C’est flagrant dans la manière de présenter le concept flou de « transition énergétique » que chacun comprend à sa façon (moins de fossiles pour l’un, sortir du nucléaire pour un autre, manger bio ou local pour un troisième, …). De plus en plus de rouages décisionnels de l’État et de grandes organisations sont investis par des idéologues d’un monde « idéalisé », sans industrie, sans nucléaire et sans émission de quoi que ce soit (gaz à effet de serre, ondes,…) qui utilisent les médias pour soutenir une idéologie décorrélée des réalités.
Respirer même va devenir culpabilisant, car on aggrave ainsi notre « empreinte carbone » en rejetant du CO2 qui est un… gaz à effet de serre.

Vous êtes maintenant « affranchis ». En écoutant (ou en lisant) les médias dans les prochains jours, saurez-vous reconnaître une des sept stratégies de manipulation ?

  1. La fabrication du consentement de Noam Chomsky & Edward Herman, De la propagande médiatique en démocratie éditions Agone.
  2. Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles » (Noam Chomsky)
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  • très bon article et on peut se demander pourquoi et ce depuis 1970,prmière vague new âge autant de gens croient les yeux fermés à tout ce qui leur est écrit ou montré grâce aux médias alors qu’il suffit de prendre du recul avant de foncer dans le mur des inventions fabriquées pour beaucoup et ce très souvent dans le but de récolter des voix électorales .Faut bien trouver quelque chose qui fasse tomber l’adversaire et c’est la même chose dans d’autres domaines comme l’alimentaire ou pour descendre un concurrent il faut accuser de tous les maux un produit qui a du succés,je pense aux dindes /volatile

  • nos politiciens sont périmés ; leur politique est aveugle ,vieillotte ; les zélus ne sont pas à la même page que nous , ils ne lisent pas le même livre , ils ne vivent pas dans le même monde , or donc , ils deviennent innutiles et sans aucune valeur pour la france et ses citoyens ;raisons pour lesquelles ils doivent sans arrêt chercher des chemins tortueux et mensongers pour contenir les sans dents qui sans cela se révolteraient illico presto avec les dégats que l’on immagine ;en dehors de ça , je vous souhaite à tous ( mais pas à eux , les zélus )un bon noël ;

  • Et cet article? A quelle stratégie de manipulation appartient-il? 😉
    Faites un effort!

  • C’est ce genre de connaissances qu’il serait urgent d’enseigner dans les écoles…
    Merci Contrepoints pour tous ces beaux articles.
    Joyeuses fêtes !

  • Osons aller jusqu’à la 10ème !

    8/ Encourager le public à se complaire dans la médiocrité

    Encourager le public à trouver « cool » le fait d’être bête, vulgaire, et inculte…

    9/ Remplacer la révolte par la culpabilité

    Faire croire à l’individu qu’il est seul responsable de son malheur, à cause de l’insuffisance de son intelligence, de ses capacités, ou de ses efforts. Ainsi, au lieu de se révolter contre le système économique, l’individu s’auto-dévalue et culpabilise, ce qui engendre un état dépressif dont l’un des effets est l’inhibition de l’action. Et sans action, pas de révolution!…

    10/ Connaître les individus mieux qu’ils ne se connaissent eux-mêmes

    Au cours des 50 dernières années, les progrès fulgurants de la science ont creusé un fossé croissant entre les connaissances du public et celles détenues et utilisées par les élites dirigeantes. Grâce à la biologie, la neurobiologie, et la psychologie appliquée, le « système » est parvenu à une connaissance avancée de l’être humain, à la fois physiquement et psychologiquement. Le système en est arrivé à mieux connaître l’individu moyen que celui-ci ne se connaît lui-même. Cela signifie que dans la majorité des cas, le système détient un plus grand contrôle et un plus grand pouvoir sur les individus que les individus eux-mêmes.

  • « Alors y voudraient qu’on soit intelligent et y nous prennent pour des cons ? Ben comment on ferait alors ? »
    Coluche (1979)
    Depuis 35 ans que ça dure, on peut se demander ce qui différencie les stratégies de manipulation des pratiques de tripotage…

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Nicolas Quénel est journaliste indépendant. Il travaille principalement sur le développement des organisations terroristes en Asie du Sud-Est, les questions liées au renseignement et les opérations d’influence. Membre du collectif de journalistes Longshot, il collabore régulièrement avec Les Jours, le magazine Marianne, Libération. Son dernier livre, Allô, Paris ? Ici Moscou: Plongée au cœur de la guerre de l'information, est paru aux éditions Denoël en novembre 2023. Grand entretien pour Contrepoints.

 

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