Désindustrialisation : la France est allée trop loin

Il faut en finir avec l’accumulation des politiques contradictoires.

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Friches industrielles credits G Chauvet photographies (licence creative commons)

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Désindustrialisation : la France est allée trop loin

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 17 décembre 2014
- A +

Par Jean-Luc Ginder.

Friches industrielles credits G Chauvet photographies (licence creative commons)

Le déclin relatif de l’industrie est une tendance naturelle, de la même manière qu’il y a eu un déclin de l’activité agricole remplacée par l’industrie.

Ainsi l’activité industrielle tend à être remplacée par le secteur des services. Une société qui se développe et se sophistique consomme davantage de services et moins de produits industriels. Mais comme ce sont les produits industriels qui portent les gains de productivité remarquables, les prix de production et de vente sont à la baisse. Des exemples dans notre quotidien : téléviseurs, téléphones…

Le problème ne provient pas de cette évolution générale mais du rétropédalage industriel de la France depuis les quinze dernières années. Les résultats français sont inférieurs à ceux des pays ayant une fiscalité moindre et à ceux à fiscalité plus lourde, inférieurs à ceux qui ont des lois sociales plus généreuses ou moins généreuses, et inférieurs à ceux qui ont un État fort ou un État faible. Mauvaise élève face à tous ses voisins depuis quinze ans et même au-delà : le choc de la désindustrialisation a été plus violent en France qu’ailleurs et cela a commencé vers les années 1980.

 

Entre 1979 et 1984, on remarque une première vague de désindustrialisation.

D’une violence extrême, elle fait perdre à la France un tiers de son potentiel industriel. Pour comprendre ce qui s’est passé il faut prendre en compte le dualisme de l’économie française.

À côté des très grandes entreprises qui s’étaient formidablement développées, certaines dans le giron de l’État, existait un tissu fort de PME sous-capitalisées, sous-investies. Ces dernières ont subi de plein fouet le choc des crises des années 1970. On a alors assisté à une forte mortalité des entreprises dans les secteurs des biens d’équipement, celui de la machine-outil, celui des chantiers navals, et d’autres encore. Une véritable hécatombe industrielle.

Les plans de sauvetage mis en place face à cette hécatombe n’ont eu pour effet que d‘accompagner le déclin des secteurs en difficulté sans jamais permettre le rebond industriel. Au milieu des années 1980, la France a fait le choix européen du marché unique et de l’euro sans prendre en compte les conséquences de ces choix. Dans un premier temps cela a été un formidable marché, l’euro a même permis d’évacuer les risques de change.

 

L’influence de la monnaie unique

Sauf que. Il n’a pas été pris en compte que le modèle inflationniste de la France, financé par l’État et régulé par les dévaluations périodiques ne pouvait plus dès lors fonctionner à partir du moment où la monnaie était unique dans un marché devenu unique. La France se devait d’appréhender les nouvelles dynamiques de compétitivité, de maîtrise interne, de concurrence fiscale.

Ces nouveaux paramètres n’ont pas été pris en compte. Il était capital de maîtriser les dépenses publiques dans un temps où l’on faisait le choix stratégique majeur de la mondialisation, de l’intégration européenne et de l’euro. Il était capital de se demander dans le même temps si on pouvait continuer à gérer comme avant.

On peut estimer cette situation comme une conséquence de l’application d’une politique keynésio-libérale. Keynésienne d’un côté car chaque fois que survient une crise conjoncturelle, on dit que c’est une insuffisance de la demande et qu’il faut donc relancer cette dernière, avec bien entendu de la dette publique, de la dépense publique et quand cela devient insupportable une augmentation des impôts. Ces derniers pèsent sur les entreprises tout en dégradant la compétitivité en retour.

On assiste bien à l’application d’une solution keynésienne à toutes les crises conjoncturelles et en même temps à l’application d’une solution de type libéral qui considère que les problèmes industriels et productifs doivent être réglés par le biais du marché et de la concurrence.

Ce raisonnement et le temps ont eu pour effet d’accumuler un formidable écart au niveau des taux de marge des entreprises. Aujourd’hui, 10 points d’écart séparent les entreprises allemandes et les entreprises françaises. Pour corriger cette situation, il faudrait un transfert de 100 milliards de l’État vers le secteur privé sous forme d’aides et d’allègements. Aujourd’hui l’État en promet 40 et en apporte concrètement cinq. Et jour après jour, secteur après secteur, la rentabilité industrielle s’effondre.

La solution de la désindustrialisation passe avant tout par de la cohérence, plutôt que de chercher à protéger le caractère national du contrôle du capital des entreprises françaises par des capitaux français ! La nationalité du capital prévaut-elle sur le développement des compétences françaises, sur le développement de l’activité sur le sol français ? L’important est de préserver le développement de la recherche française, et des marques françaises.

 

Le relèvement nécessaire

Il est donc nécessaire et vital pour l’économie française d’avoir enfin une cohérence et un alignement des politiques.

Il faut en finir avec l’accumulation des politiques contradictoires (politique fiscale qui dissuade l’investissement dans le même temps que les 34 plans sectoriels…).

Il faut en finir avec la politique placebo qui a pour effet d’affaiblir davantage les entreprises par le poids des charges sociales, réglementaires, fiscales pour qui on invente le crédit d’impôt lorsqu’on constate qu‘elles ne peuvent plus respirer, ou encore la CICE pour colmater les brèches.

Il faut d’urgence et impérativement à la France un objectif productif qui considère toutes les politiques et qui fixe les priorités.

Le souhait formulé du pays est d’engager les moyens dans la troisième révolution industrielle, celle du numérique, du digital. Et le pays constate que sa base industrielle a perdu sa compétence manufacturière et n’a plus la capacité de transformer ses innovations en produits, qui seraient aussi les produits industriels de demain.

Le constat est alarmant, simple : la France est allée trop loin dans la désindustrialisation.

Pourtant, avec la science arrivent de nouvelles révolutions. De fait nos enfants ne vivront pas comme nous. Nous sommes à un moment de notre histoire économique ou les repères vont changer… de révolution technologique en révolution économique avec l’aide de la science (révolution agricole, révolution biotechnologique, révolution énergétique, et révolution numérique).

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  • Vu l’instruction, les repères économiques sont pas près de commencer la semaine prochaine.
    Au bac les questions étaient: « que devons nous à l’état », ou « indiquez pourquoi un conflit social est facteur de progrès ».

    Charlie Chaplin dans les roues du film « les temps modernes » fait encore la couverture des manuels, et donne l’image de l’industrie aux générations suivantes….

    Non! C’est pas pour demain.

  • « révolution agricole, révolution biotechnologique, révolution énergétique, et révolution numérique »

    Tout ça, c’est du vent médiatique !

    A commencer par la révolution numérique ?!? Elle a commencé il y a 30 ans ! C’est plus « prendre le train en marche », mais « prendre le TGV en marche ».

    Pour ce qui est de la « révolution énergétique » … Vous ne vous souvenez pas du slogan : « en France on n’a pas de pétrole mais on a des idées ». Ca date de 40 ans. Sauf que les idées sont de plus en plus stupides car elles suivent (et pour cause) la qualité de formation des jeunes par l’éducation nationale.

    •  » révolution agricole  »

      au brésil, à été mis en place par des agronomes notamment français ( comme lucien séguy ) des techniques de culture extremement rentable : les brésiliens font deux récolte par an sans aucun travail du sol…

      en chine, ou la terre est traditionnellement trés cher, et ou l’on fait la plupart du temps 2 récoltes par ans depuis les ming ( 15ième siècle ) ces techniques sont en train d’etre adaptées , voir améliorées puisque les chinois ont l’habitude d’utiliser des arbres à croissance rapide en intercalement avec les cultures, ce qui rend le système encore plus productif…

      il y a donc bien une révolution agricole en cour, mais elle ne se fait pas en france, ou l’orientation de l’agriculture a été complétement planté par l’incompétence des syndicats, et l’ambiance de régression distillé par les médias tous acquis aux thèses escrologiques :

      en france, la plupart des agriculteur font une récolte par ans, avec un labour et sol nu en hiver. c’est à peu près les techniques qui étaient utilisé au moyen age…

  • La France est allée ou les parasites dorés l’ont envoyé… La France à toujours vécu pour quelques centaines de familles parasites et elles ne se plaignent pas puisque ces familles sont toujours plus comblées. Ce n’est pas par hasard que la désindustrialisation du pays et d’autres démarrent avec l’arrivée de la robotique puis de l’informatique. Hier les parasites avaient besoin du producteur donc de l’ouvrier… aujourd’hui ce n’est quasiment plus le cas… et l’ouvrier ont le trouve à bas cout ici avec plusieurs millions de chômeurs et encore mieux dans les pays même de l’UE ou les salaires valent ceux des pays asiatique. Les politiques ne sont que des tampons, grassement payés ils font le travail que les parasites exigent d’eux… C’est par la volonté de ces ploutocrates que le France disparait… la politique là n’est que l’arbre qui veut masquer le réel pouvoir des parasites dorés.

    • et rotschild , vous en pensez quoi ?

    • Vous avez fait 2 grandes découvertes : l’homme est un requin pour l’homme et le monde évolue ! Il ne manque que la conclusion : décréter que l’homme doit être bon (ou que certains leader politique sont naturellement bons), et que le monde entier doit rester figé pour satisfaire les Français qui refusent d’évoluer.

  • je n’ai pas bien compris l’article qui dit qu’il y a trop de règles et qu’il faut en mettre d’autres…

    qu’on nous laisse délocaliser si les conditions sont meilleures ailleurs : si en Inde je paie mes employés 10 fois moins, je ne vois pas en quoi c’est bien de me forcer a rester a produire en France…

    • Simple question de logique, si tout le monde fait ça, il n’y aura plus d’emploi, donc pas d’argent à dépenser, donc l’économie s’écroule, et les entreprises (dont la tienne) avec, ne pouvant écouler ce qu’elles proposent.

      Pas besoin d’être né de la dernière pluie pour comprendre ça, un ensemble de décisions égoïstes dans une société civilisée basée sur une nécessaire coexistence, ne peut que l’emmener droit dans le mur, à moyen et long terme, et gageons que si cela arriverait, votre argent si égoïstement gagné, ne vaudra plus rien.

      • Pauvre Camille… mais s’il n’a plus de clients en Fransolandie, il se sera ouvert « le monde entier »… ya pa foto.
        Vous êtes encore de ceux qui ne voient le monde qu’au travers du GROS BOUT de la lorgnette France. Réveillez vous il y a 117 fois plus d’étrangers que de Franchouillards (moins les quelques-uns qui essaient de comprendre et enlèvent leurs certitudes du centre de leu pensée). Et tout ces commentaires de socioconomistes qui tordent leurs démonstration pour prouver leurs « pensées de cette nuit » sans regarder le fond des choses.
        NON la France n’est pas le centre du monde.
        NON la France n’est pas un modèle social et économique, sinon les autres pays l’imiteraient (aucun)
        NON il n’y a pas de salut « que » dans la Franche.
        NON le salaire touché n’est pas le coût du travailleur mais son solde de compte.
        NON la pauvreté ne se mesure pas au salaire ci dessus perçu, mais à la possibilité globale de vie qu’il offre dans son environnement proche.
        NON la France(tte) n’est pas (plus) un pays de liberté, mais une arène d’entravertage.
        NON la Franc(in)e n’est pas (plus) un havre d’égalité mais un camp d’égaliscion.
        NON la Franç(ois)e n’est pas (plus) un pays de fraternité mais cirque de fratervitude.

        OUI ce sont les gens « d’où qu’ils soient venus » et qui se sont battus pour ce pays, sans mettre en avant une quelconque religion ou ethnie… qui ont fait ce que ce pays a été, mais…
        OUI c’est un ramassis de M…E, un cancer « socialo-étato-mépansant » qui le rongent de l’intérieur, bouffent sa moelle et le poussent à l’agonie (comme tout parasite).
        OUI ce pays n’est pas « encore » mort mais les traitements « palliatifs » ne sont pas des thérapies, pire ils l’affaiblissent lui cachent la fin et lui adoucissent le trépas… jusqu’à quand ?

        Y aurait-il un médecin « non virtuel » sur ce radeau ?

    • parce qu’avec moins de regles a la con, votre employe en fRance il coutera seulement quatre fois le prix d’un indien 😀

    • « qu’on nous laisse délocaliser si les conditions sont meilleures ailleurs »

      Il n’y a pas à autoriser quoi que ce soir en la matière. Une entreprise sous-traite la où elle obtient le meilleur rapport qualité-prix. (En revanche la qualité en Inde dans le secteur que je connais, montre qu’avec un tout petit peu de réalisme économique, on pourrait très bien s’en sortir).

      Si l’idée est de s’interdire le commerce international … Plantez vos légumes : autant reprendre l’autarcie directement à la base pour se préparer à son aboutissement.

  • Ahaha j’ai commencé ma carrière dans l’industrie, pitoyable spectacle, quelques exemples. Le TGV début de conception 1966, il y a 48 ans aujourd’hui toujours vu comme l’avenir du ferroviaire par son concepteur et les parlementaires qui ont mis en place un chantier pour le TGV du futur!!!…En 1966 a t on proposé des machines concues il y a 48 ans soit en 1924 !!! Un stage a ALCATEL au tout début de l’internet dans les années 1990 chez le fabricant fabricant du minitel …de l’avis de toute les grosses têtes « internet no futur » malgré les nombreux et évidents indicateurs techniques, ok ou en ai le minitel.
    Quand à la mondialisation donc l’export les chiffres parlent d’eux même france 1 allemagne 4 ….Je ne parle même pas du secteur automobile entre ces deux pays : Marque francaise faisant des voitures de luxe ou de sport concurrentes aux allemandes = 0. Non on veut gagner beaucoup d’argent en vendant du low cost ??? Ou comment marger 15000 euros sur une voiture qui se vends 10000 euros!!!! Nul pour des matheux dont on tapisse toutes les directions de ces entreprises. On fait du cost killing depuis trop longtemps et rien sur les nouveaux produits à par les nouvelles techno, qui ne sont pas fabriquées et encore moins concues chez nous!!!
    Conclusion, la fête à neuneu est fini, on est dans la crise. Comme disait schumpeter on a crée de grandes entreprises ou les dirigeants ne sont pas des entrepreneurs et ne recherchent qu’un status social, grosse paie, primes, ca vous rappel rien !!! Et etouffe toute volonté d’évolution, au travers une gestion dantesque. La crise et pourtant la et il faut regarder la réalité en face pour résoudre un problème. Comme is le proverbe si tu stagne tu coule, il faut donc bouger. Cela fait 6 ans que la crise a commencé et rien ne bouge!! Messieurs les actionnaires si l’entreprise coule simple, vous n’avez plus rien !!! Va falloir faire le ménage et dare dare…les parachutes en or …..ok massif meme cela descendra plus vite…

  • « modèle inflationniste de la France, financé par l’État et régulé par les dévaluations périodiques  »
    et
    « se demander dans le même temps si on pouvait continuer à gérer comme avant »

    Etait-ce un modele ou un constat? Peut-on vraiment appeller cela de la gestion?

  • Les commentaires sont fermés.

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