Le sénateur Marini tente encore une fois de taxer Google

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Philippe Marini (crédits UMP Photos, licence Creative Commons)

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Le sénateur Marini tente encore une fois de taxer Google

Publié le 14 avril 2014
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Alors même qu’ils ne sont pourtant plus aux commandes du pays, et bien que les taxes dégringolent avec la même vigueur que lorsqu’ils y étaient, les sicaires de l’UMP continuent à fomenter de sombres projets afin d’accélérer la mise en coupe réglée du pays pour leur retour triomphal au pouvoir dans quelques mois, à la faveur de l’une ou l’autre dissolution. C’est donc sans surprise qu’on apprend que le sénateur de l’Oise, un certain Philippe Marini, veut introduire une nouvelle ponction, et de préférence, par un truchement parfaitement ridicule.

Que voulez-vous, c’est l’UMP, c’est-à-dire du socialisme mal assumé enrobé dans une lutte âpre et mesquine pour la conservation de prébendes en attendant des jours meilleurs (là où, par opposition, le PS est un socialisme aussi revendiqué que formolisé enrobé dans une lutte rigolote et minable pour la conservation de prébendes en préparant des jours douloureux). Toute proposition d’une nouvelle taxe n’a donc, en soi, rien de vraiment choquant puisque, il faut le rappeler, ces gens ne savent à peu près faire que ça : ce sont des sénateurs et des députés, après tout, pas des personnes réelles issues de la société civile confrontées aux réalités de terrain et à la dure nécessité d’efficience.

seriously dogs

Et cette fois-ci, comme je l’évoquais plus haut, le sénateur désœuvré mais pas sans imagination a décidé, tel un Don Quichotte moderne shooté au viagra partant à l’assaut de moulins numériques, de s’attaquer aux fourbes indexeurs et perfides moteurs de recherche qui ont l’impudence de référencer des images en catimini mais pour de basses raisons commerciales. En effet, comme le rapportent Reuteurs et PCInpact, Marini, qui n’y va pas à la petite cuillère, ni au shaker, explique

« avoir constaté que les moteurs de recherche, dont Google, s’approprient, sans autorisation et sans contrepartie en matière de droits d’auteur, les images diffusées sur Internet pour les mettre à disposition du public dans des conditions qui permettent leur reproduction et leur réutilisation. »

jesus petit facepalmC’est, bien évidemment, assez majoritairement faux et totalement con. Google ne fait que présenter, au travers de liens, les ressources disponibles sur d’autres serveurs, ressources qui s’y trouvaient et qui ont été rendues publiques par leurs auteurs ou leurs ayants droit, souvent volontairement ou parfois par incompétence, lorsqu’ils ne comprennent pas ce que « protection d’un répertoire » peut vouloir dire dans ce monde de l’internet. Cela est tellement vrai que vous pouvez aller directement, sans passer par Google, sur cette adresse et vous tomberez sur une image de ma composition, qui ne sera référencée sur Google que parce que je le veux. En substance, Google ne joue que le rôle de vitrine, mais ne s’occupe pas de ce qui est affiché qui reste la propriété des ayants droit.

Dans l’esprit de Marini, tout cela est fort confus. D’une part, la notion de droit d’auteur n’est pas à proprement parler simple à appréhender pour le commun des mortels. On imagine sans mal que pour un sénateur ou un député, c’est donc un concept intellectuellement équivalent à l’escalade de l’Everest en espadrilles.

S’y ajoute d’autre part le fait que présenter une information sur internet implique qu’il y a eu reproduction à de multiples endroits de cette information, par nature même de la technologie employée. Là encore, l’idée même que ceci puisse un jour percoler dans l’esprit des individus qui écrivent les lois revient à s’imaginer pouvoir gagner le gros lot au Loto trois fois de suite. Sans jouer.

On le comprend : tous ces machins techniques, ces liens, ces informations qui se copient sans déposséder quiconque de l’information initiale, c’est complexe à comprendre pour un monomaniaque qui tente depuis plusieurs années de faire plier les interwebs avec une taxe sur l’orditernet. Et cette compulsion le pousse encore une fois à tenter la pirouette taxatoire puisqu’il propose, dans sa nouvelle loi, d’instaurer une rémunération payée par les moteurs de recherche qui référencent des images trouvées sur les sites, sur un mode de fonctionnement finalement similaire aux abominations déjà en place pour les radios et télévisions lorsqu’il s’agit de musique et de films.

ultimate facepalm

Autrement dit : je publie une image, elle est référencée par Google, quelqu’un la voit au travers de ce moteur, pouf, Google paye alors forfaitairement à une société d’auteurs qui me reversera, après ponction pour frais de fonctionnement, de putes et de champagne, un petit quelque chose de symbolique. La vie promet d’être d’un coup plus sucrée en Socialie Française. Bien évidemment, le passage par de telles sociétés serait rendu obligatoire, et la rémunération par Google assise sur le degré de popularité de l’image (il va y avoir une déferlante de lolcats, ça va mousser !) et les revenus que Google génère avec son moteur de recherches d’images (c’est-à-dire 0, puisque Google n’a aucune publicité sur cette partie).

Tout ceci sent le solidement ficelé et écrit à la pointe d’un stylo législatif trempé dans la haute technologie du WTF quintessential, pas de doute.

D’autant qu’on sait déjà ce que tout ce bricolage débile va pouvoir donner : rien du tout.

gabelle de l'orditernetEn effet, ce n’est pas la première fois qu’on tente d’impliquer la responsabilité de Google en terme de droits dans cette histoire de reproduction d’images diverses et variées. Il y a eu des précédents, des gens ont tenté des trucs, et ils ont eu des problèmes : la Société des Auteurs des arts visuels et de l’Image Fixe (SAIF) avait en effet déjà attaqué Google et avait été déboutée de ses demandes farfelues. Il est donc probable que la proposition ridicule d’un Marini intellectuellement on the rocks se retrouve bloquée par le Conseil Constitutionnel. Et c’est tant mieux puisqu’une telle loi, si elle venait à entrer réellement en application, condamnerait le territoire français à une version particulière d’internet dans laquelle les moteurs de recherche (et plus généralement, les sites d’indexation) ne pourraient présenter d’images (on les voit mal rétribuer quelque chose qui est gratuit partout ailleurs). Et comme il y aura inévitablement des Français qui auront l’idée d’accéder aux services habituels au travers de proxies ou via leur version étrangère, je n’ose imaginer le casse-tête juridique qui ne manquera pas de s’abattre sur tout le monde sauf le sénateur qui, dans sa douteuse lucidité, se sera bien vite tenu à l’écart du résultat navrant de ses compulsions législatives.

Tout ceci n’a, cependant, rien de réellement étonnant. Pour le sénateur, il ne s’agit pas, en réalité, d’aboutir à une loi efficace effectivement votée, mais tout simplement de montrer qu’il agit dans le cadre des pressions de lobbies qu’il a très certainement reçues (pressions qui sont, n’en doutez pas, amicales et intéressantes). Non seulement, Marini n’en est pas à son coup d’essai (j’ai évoqué tout à l’heure ses précédentes tentatives), mais on a une idée assez précise des acteurs qui ont déclenché la production de cette proposition : il y a quelques années, certaines agences de photojournalisme et de banques d’images avaient en effet déjà tenté le coup de taxer et réguler ce terrible no man’s land d’internet (sans y parvenir, la technologie étant ce qu’elle est).

Les législateurs fous à la sauce Marini n’obtiennent qu’assez rarement ce qu’ils veulent du premier coup et comme les enfants malpolis et trop gâtés qu’ils sont tous, retentent inlassablement leur forfaiture, autant de fois que nécessaire, jusqu’à obtenir gain de cause, de guerre lasse ou à la faveur d’une actualité bien travaillée.

Dès lors, il faudra continuer à surveiller ce genre d’olibrius. Ils sont dangereux.
—-
Sur le web

Voir les commentaires (13)

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  • Ils ne sont pas dangereux, ces gens dont personne ne lit les rapports sont juste: JALOUX.

    Ils ne pondent pas des lois et des taxes pour notre bien, ni même pour servir à autre chose que de justifier leur propre existence.

    De toute façon le petit délire touche bientôt à sa fin. Le gros molosse a entièrement détruit tous les « moteurs » non de recherche Internet, mais économiques. Aller chercher des miettes à droite, à gauche est juste pathétique. Une grosse chenille joufflue qui ne deviendra jamais un papillon. En fait, ces gens sont des parasites xylophages. Genre le termite. Ils se reproduisent entre eux, peuvent muter à loisir, créer des reines et des rois spontanément au sein de leur caste.

    Bref, les parasites, restent des parasitent. Pour ça, rien de tel qu’un petit traitement adapté….

  • S’ils mettaient autant d’énergie à détruire des lois qu’à en créer (et encore, celle-ci est-elle promise au moindre avenir, hormis faire jouir l’orélifilipeti ?), le pays roulerait sur l’or.

  • Décidément les sénateurs sont vraiment créatifs ! J’ai écrit un billet sur mon blog hier à propos de leurs délires en tous sens sur le vin et c’est du même pur jus. C’est quand qu’on supprime le Sénat ?
    http://jacqueshenry.wordpress.com/2014/04/13/billet-dhumeur-vineuse/

  • Ces sociétés perceptrices auxquelles fait référence l’article sont ce qu’on nomme des sociétés de gestion collective… le nom fait rêver.

    Elles s’opposent à la gestion individuelle de la propriété intellectuelle. L’auteur, normalement, comme tout propriétaire, peut seul autoriser ou interdire l’exploitation de son oeuvre et percevoir directement ses droits d’auteur et bien non … trop libéral.

    La tendance est de les rendre obligatoires. http://www.senat.fr/lc/lc30/lc302.html

    L’auteur n’a plus le choix. En gros c’est du communisme et de l’expropriation appliquée à la propriété intellectuelle doublé de monopoles organisés par l’état. On parle de licence légale.

    Le truc drôle c’est qu’elles noyautent le Conseil supérieur de la Propriété littéraire et artistique d’où sortent tous les textes du ministère de la culture. Le ministère leur fournit même une « police » spéciale que sont les agents assermentés du ministère de la culture à ces sociétés.

    Une partie de l’argent collectée sert à financer des politiques culturelle http://www.sacem.fr/cms/home/la-sacem/derniers-communiques-2013/financement-actions-culturelles-par-copie-privee-juillet2013 . Ce n’est que 50 millions … m

    En gros et bien à l’auteur on lui prend une partie de ses revenus pour les redistribuer à d’autres et il a pas le choix.

    C’est super opaque… et particulièrement bien organisé.

    Leur rêve ultime taxer au niveau des FAI. Ainsi viendra le jour au Contrepoint recevra un « beau » chèque en échange ils ne pourront plus décider d’autoriser ou d’interdire la reproduction de leur articles (des petites mains géreront les droits).

    On en est pas encore là, les sociétés de gestion collective doivent d’abord finir leur projet de taxer le clound. http://www.linformaticien.com/actualites/id/32279/copie-privee-le-cloud-bientot-soumis-a-redevance.aspx

    D’abord les photocopie (done), puis les disque dur (done), puis les téléphones (done) maintenant le clound encore un efforts et se seront les tuyaux (FAI) dernier étage de la fusée.

  • Moteur de voiture, moteur de recherche, il ne fait pas bon être moteur …

  • « Google ne fait que présenter, au travers de liens, les ressources disponibles sur d’autres serveurs, ressources qui s’y trouvaient et qui ont été rendues publiques par leurs auteurs ou leurs ayants droit, souvent volontairement ou parfois par incompétence, lorsqu’ils ne comprennent pas ce que « protection d’un répertoire » peut vouloir dire dans ce monde de l’internet.  »

    Google ne fait pas que proposer des liens : les images sont affiché directement sur le moteur de recherche. Le point important c’est qu’un site même public est référencé par google uniquement si le responsable du site le souhaite (sauf erreur de sa part évidemment). Zéro problème.

  • H16:

    C’est très sympa ces articles mais pourquoi ne pas coller plus à l’actualité avec toutes les choses dramatiques qui se passent et qui confirment le besoin de libéralisme ?

    Par exemple la chute dramatique et sans précédent de l’emploi à domicile:
    http://www.bfmtv.com/video/chronique/bfmbusiness/doze-nettoyeur/nicolas-doze-chute-historique-lemploi-a-domicile-11-04-190211/

    • Il y a déjà la réponse du travail noir et gris. Les impôts ont la courbe de lafer.

      Je crois que c’est pire pour l’Etat, nous avons une perte de légitimité du pouvoir. Il n’y a plus de libéralisme ni même de couleur politique. L’humain blessé dans son âme et son portefeuille, reste comme un animal. Il devient agressif, méfiant, défiant, même potentiellement dangereux. L’etat le sent, il tire encore sur la corde. Place des gens innocents en prison. Des groupes naissent pour défier ce gros léviathan. Même Sophie insulte notre flan de goujat !

      Pendant ce temps Ayrault partage des grosses poignées d’argent â ses copains….la vie continue !

  • quand on voit le développement tant de google que amazon dans les industries du future l’achat de société de sociétés utilisant les industries de satellites solaires Titan Aerospace ou Boston Dynamic pour les robots on comprend mieux pourquoi Marini momifié dans son confortable statut de sénateur coupé du monde des vivants s’occupe comme il peut Chaque jour qui passe la France s’enfonce dans des lois absconses telles les dernieres de Belkacem desirant que plus personne ne reponde a ses mails apres 18H
    200.000 regularisations et 100.000 jeunes francais qui emigrent le tiers monde pour nous n’est pas tres loin

  • Pas sûr que google décide de faire cadeau de ses taxes futures aux annonceurs en France… les pauvres. Mais c’est pour votre bien. Et la publicité est un fléau (les popups etc…)
    Vous cherchez le redressement productif ? Erreur 404.

  • Les commentaires sont fermés.

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