Un nouvel internat en médecine pour le « Grand Paris » verra-t-il le jour ?

L’absence de vision de nos réformateurs devant les exigences de la médecine moderne doit mener à une nouvelle réflexion.

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Un nouvel internat en médecine pour le « Grand Paris » verra-t-il le jour ?

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 18 mars 2014
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Par le Docteur Bernard Kron.

internat médecine

« Celui qui ne sait pas vers quel port il se dirige
ne peut pas trouver les vents favorables 
» (Sénèque).

« Le projet d’étendre le « Grand Paris » pose de nombreux problèmes dans la définition de son périmètre, de sa région sanitaire, de l’organisation des transports et de la construction de logements. Quel que soit ce périmètre, il ne serait pas utopique de créer un nouvel Internat pour le Grand Paris, pour répondre à ce gigantesque défi qui mettrait Paris au rang des grandes mégalopoles. Il faudra, malgré la crise, pouvoir trouver le financement qui sera pharaonique ». Le nouveau Maire de Paris devra s’y attaquer avant que Paris ne devienne un désert médical. Les candidats à cette élection sont muets sur ce sujet.

L’ECN qui clôture les études médicales a créé une nouvelle donne, car ce sont toujours les mieux classés qui choisissent Paris ou plutôt l’Internat de l’Île de France. La refonte de l’Internat fait partie intégrante d’une réforme des études médicales qui n’est qu’à peine ébauchée. Si l’on veut réorganiser les spécialités lourdes pour faire face au défi sanitaire d’une agglomération de plus de dix millions d’habitants, et éviter la pénurie dans les spécialités lourdes, il est urgent de s’y attaquer. Il faudra inventer un nouvel internat, sans revenir au système des concours, considéré comme rétrograde. Il ne pourra pas, sans une revalorisation, répondre aux défis des gardes de cette mégalopole, car les spécialités lourdes sont boudées ou choisies par les plus mal classés.

La France, depuis la réforme Debré de 1958 du plein temps hospitalier, et les ordonnances Juppé de 1996, étatise progressivement son système de santé et arbitre ses réformes par des technocrates. Ce sont souvent des sophistes qui ne connaissent que l’écume des choses. Les hôpitaux sont déficitaires et nombre de postes titulaires non pourvus. Les urgences sont saturées et la chirurgie ambulatoire y est insuffisamment développée. Les démarches d’accréditation, l’évaluation des pratiques (ECPP) ont remplacé nos concours élitistes que beaucoup nous enviaient. Celui de l’internat a été supprimé par la Loi Kouchner de 2002 sous la pression de certains lobbies. Ceux-ci reconnaissent pourtant a posteriori, comme Claude Allègre, la qualité de la formation que permettait ce type de sélection !

La France a créé une spécialité de médecine générale d’une durée de trois ans, mais a supprimé la spécialité de chirurgie générale considérée à tort comme obsolète. L’ENC (Examen National Classant) pourrait disparaitre et être remplacé par une simple validation du 2éme cycle. Cela incitera peut-être le réformateur à réfléchir et à créer un nouvel Internat pour le Grand Paris. Cela permettrait d’assurer le recrutement nécessaire de médecins et de chirurgiens hautement qualifiés, en particulier pour la prise en charge des urgences et des poli-pathologies lourdes. Lui redonner ses lettres de noblesse susciterait de nouvelles vocations pour faire face aux problèmes sanitaires de cette mégalopole du 21éme siècle qui va manquer de médecins1.

L’Internat du Grand Paris devra s’adapter pour répondre aux défis de cette grande capitale. Il devra s’étendre vers l’Ouest2. C’est un vaste programme dont il faudra définir le périmètre. Le Havre, Grand Port de Paris serait-il une utopie ?

L’absence de vision de nos réformateurs devant les exigences de la médecine moderne doit mener vers une nouvelle réflexion. La filiarisation du cursus des internes et du post Internat sont le complément indispensable à cette évolution. En janvier 2001, après un mouvement de grève d’envergure des internes, le repos de sécurité à l’issue d’une garde a été instauré. On propose maintenant deux demi journées par mois pour la formation. L’interne devient un étudiant comme les autres ! Ainsi de réformes en réformes, la qualité de la formation recule. Demain l’assistant sera devenu un super Interne, ce qui prolongera d’autant la formation.

À l’heure où l’AP-HP ébauche sa restructuration avec son nouveau directeur Martin Hirsch, il n’est plus temps de tergiverser.

  1. L’âge moyen des médecins parisiens est de 55 ans, 20% vont partir à la retraite dans les 10 prochaines années.
  2. Le grand Ouest  est une notion géographique souvent utilisée en France pour désigner les régions du Nord-Ouest du pays. Il regroupe en général la Bretagne, la Basse-Normandie et les Pays de la Loire.
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  • Pour sénéque. : il n’y a de vents favorable pour celui qui ne sait ou il va. (Autre formule).

  • Paris, désert médical : quand les tarifs sécu sont bloqués et ne peuvent être liés aux tarifs de location/achat de locaux, il est normal de ne plus avoir personne.

    Un généraliste à 23€ ne peut pas s’installer à Paris, aucune banque ne lui fera crédit pour son cabinet.

  • Bonjour, je ne comprends pas l’opposition entre la qualification de médecine générale et de chirurgie générale.
    D’autre part, comme le souligne Mickey, ce sont surtout les médecins en secteur 1 qui risquent de manquer sur Paris faute de revenus suffisants. Les chirurgiens en secteur 2 restent trés nombreux sur Paris.

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