Avez-vous votre « Permis de Parler » ?

Bientôt un « Permis de Parler » pour avoir le droit d’engager la conversation avec n’importe qui ?

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Avez-vous votre « Permis de Parler » ?

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 5 janvier 2014
- A +

Interdiction de parler, trac, timidité, privé de parole

Heureusement, aucun politicien n’a encore proposé ce genre de mesure, pour l’instant ce n’est que le délire d’un auteur de science-fiction ! Mais qui sait, la réalité finit souvent par dépasser la fiction…

En 1982, l’écrivain américain Thomas Disch imagine dans sa nouvelle L’homme sans idées un monde où l’État contrôle jusqu’à la parole la plus anodine de chaque citoyen. Pour échanger le moindre mot, il faut y être autorisé et disposer d’un « Permis de Parler ». Pourquoi ? Pour de meilleures relations entre tous… Parce que parler à n’importe qui peut représenter un danger, parce qu’une mauvaise discussion peut ennuyer, parce qu’il faut assumer ses idées et ce n’est pas si aisé… Dans ce futur proche, très proche, le Bureau fédéral des Communications veille – sa devise : « La liberté planifiée est la voie vers un progrès durable. »

Comment Thomas Disch en est-il venu à imaginer une telle situation ? La science-fiction n’est pas aussi fantaisiste qu’on pourrait le croire : bien souvent elle ne fait que mettre en exergue un élément caractéristique de notre propre réalité. L’idée d’un Permis de Parler semble peut-être une odieuse intrusion du pouvoir politique dans nos vies, et pourtant…

Qui n’a jamais redouté de devoir faire ou lancer la conversation avec les uns et les autres lors d’un dîner mondain, d’un cocktail ou d’une soirée ? Qui n’a jamais été embarrassé par une discussion qui traîne et se tarit sans savoir comment la relancer ou la couper ? Qui n’a jamais été intimidé face à certains interlocuteurs – professeurs, supérieurs, représentants de l’autorité – à chercher ses mots ou à craindre de ne pas être à la hauteur ? Qui n’a jamais été apeuré lors d’une altercation avec un parfait inconnu dans la rue ? Ou, à l’inverse, qui n’a jamais appréhendé d’aborder un(e) inconnu(e) dans un café ? Est-ce que je ne risque pas de déranger, ou de me ridiculiser ?

À l’origine de L’homme sans idées, voici l’anecdote rapportée avec ironie par l’auteur :

… L’idée de cette histoire m’est venue un jour dans un bar à Schenectady. J’étais là devant une bière, l’esprit fonctionnant paresseusement, et ce dont j’avais envie juste à ce moment, c’était d’avoir quelques rapports sociaux avec mes semblables. Toutefois, ne connaissant personne autour de moi, je restais à boire ma bière sans rien dire, quand il me vint à l’esprit que les autres clients dans le bar étaient probablement là parce qu’eux aussi avaient envie de conversation, mais comme aucun d’eux n’en connaissait un autre ils faisaient de même que moi. « C’est comme si, ai-je pensé, les gens avaient besoin d’un permis avant de pouvoir entamer une conversation. »

Certes il est possible que ça ne se soit pas passé à Schenectady, mais je suis sûr que bien des gens se sont trouvés dans la même situation dans des bars de Schenectady et qu’elle représente une expérience très commune en général. Appelez cela timidité ou, par périphrase, incapacité de communiquer.

En tout cas, c’était là mon idée, et voici l’histoire à laquelle elle donna naissance quelque temps après.

La libre parole n’est pas un privilège. Elle est constitutive de notre humanité et de nos sociétés. Jamais nous ne pourrons en abuser. Le risque serait au contraire de se limiter, de redouter de parler, de ne plus oser communiquer. La question n’est pas de savoir quoi dire à l’autre, mais d’oser un premier mot, aussi futile soit-il, ou un simple sourire. Seuls ceux qui attendent toujours qu’on leur accorde la permission pour telle ou telle chose de la vie se verront un jour imposer des permis – en réalité des interdictions.

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  • On est pas très loin du concept de « permis » avec nos lois. Notez le concept de prise de parole « non publique » :

    Code Pénal Article R625-7:
    La provocation NON PUBLIQUE à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, VRAIE OU SUPPOSÉE, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée est punie de l’amende prévue pour les contraventions de la 5e classe.
    ————
    Art. 48-1 Loi de 1881 sur la presse modifiée au JORF 7 mars 2007:
    Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant, par ses statuts, de défendre la mémoire des esclaves et l’honneur de leurs descendants, de combattre le racisme ou d’assister les victimes de discrimination fondée sur leur origine nationale, ethnique, raciale ou religieuse, peut exercer les droits reconnus à la partie civile … ainsi que les délits de provocation prévus par le 1° de l’article 24..
    ————

    • Des fois je me dis, pour rire, qu’il faudrait fonder trois (ou plus) associations
      * deux (ou plus) cultuelles : pour respectivement la religion socialiste, la religion libérale, etc. (tout corpus idéologique un peu notable et présent dans le débat
      * une « anti-raciste »: pour la défense de ces religions et de leurs croyants
      Le moindre mot de travers, et paf, procès.
      Ça me fais marrer tout seul ; rire jaune, bien sûr, mais rire quand même.

      • Oui. Et c’est là qu’on voit la « droite » n’a rien de libéral. De 2002 à 2012 ils avaient le temps de calmer ces associations subventionnées (CRAN, LDH, …).
        Ils n’ont RIEN fait, le procès d’Eric Zemmour ne leur a même pas ouvert les yeux, et pour le reste on a attendu 5 ans le fameux Kärcher.
        Ils n’ont rien fait parce qu’ils se cotoient tous les 15 jours avec les mêmes « fils de la lumière » et qu’ils partagent leurs mêmes idéaux.

        Dans quelques temps on pourrait objectivement dire que le progressisme a transformé ce pays en camisole. Sauf qu’on ne pourra plus le dire.

        • S’agissant de permis de parler, il serait moins langue de bois (genre j’en sais plus que j’en dis, de nommer fils de la lumière les Franc-maçons qui ne partagent pas les mêmes idéaux.
          Je simplifie: il y a ceux pour qui il y a un grand architecte de l’univers créateur de toutes choses, ceux pour qui le grand architecte est un principe générateur, pour qui le grand architecte est un symbole fédérateur et d’autres qui n’invoque pas le grand architecte, ils en nient l’existence. Le permis de parler pour ne rien dire est une liberté.
          Bien sur votre propos s’adresse à qui pense que les fils de la lumière sont nés de parents électriciens.

          • Vous oubliez deux autres catégories : ceux qui sont là pour faire des affaires et ceux qui partagent des instincts sectaires anti-chrétiens. Là aussi je simplifie ;-), mais il suffit d’écouter notre ministre de l’éducation/endoctrinement pour comprendre qu’on plus très loin de « 1984 » et des théories de l’homme nouveau.
            Pour info, tous les ministres actuels sont « fils d’électriciens ».

    • Vous avez des exemples d’application de cet article ?
      Honnêtement, je suis curieux.

  • Si on apprenait aussi à parler vrai et arrêter de s’offusquer dés qu’une personne dit une chose crue.

    Le monde est nu, arrêtons de l’habiller de toutes sortes de mensonges et de pudeur qui falsifient le réel et corrompt donc la vérité. Et qui laissent ensuite des boulevards pour toutes sortes d’idéologies basées sur ces mensonges justement.

    Aimons la vérité pour ce qu’elle propose de curatif, de vertus thérapeutiques, d’anti confusion mentale et de sauveur du vrai bien.

    • N’importe quoi, comme d’hab.
      Vous savez dire autre chose que des tautologies et des évidences ?
      Vous connaissez des gens qui se réclament du mensonge ?
      Si vous ne dites pas ce qu’est le « monde nu », le « vrai bien », les mensonges d’on ne sait qui, les idéologies sorties on ne sait d’ou, et « l’anti-confusion mentale », à quoi bon les mentionner ?

      Vous faites aussi perdre leur sens aux mots en les utilisant pour ne rien dire.

      • Le monde nu est le monde tel qu’il est sans fard ni pudeur.
        Le vrai bien est le bien qui fait un peu mal au corps sur le moment mais qui le sauve à terme (une vérité nue).
        « Les mensonges d’on ne sait qui » voila une preuve flagrante de noyage de poisson, tout le monde sait que tout le monde ment.
        « Les idéologies sorties d’on ne sait ou » encore une tentative de noyer le poisson, les idéologies politiques nous pourrissent la vie depuis 200 ans, vous êtes visiblement le seul à ne pas les voir ou feindre.

        Je ne crois pas, je pense qu’il est préférable de revenir au sens premier des mots afin de minimiser ces confusions mentales qui polluent notre vision du monde et pervertissent nos éventuelles actions correctives.

        • Oui, c’est bien ce que je disais, vous êtes un peu à côté de la plaque.
          Vous ne mentionnez toujours rien de particulier.
          Vous dénoncez le mensonge, mais vous ne dénoncez pas les menteurs.
          Vous dénonces les « idéologies politiques » (y compris celle de ce site donc) mais visiblement elles sont toutes égales pour vous puisque vous ne détaillez pas.
          Socialisme = libéralisme pour vous ? (le libéralisme peut aussi être une idéologie, ne vous en déplaise)

          Et pour votre gouverne, le fait même d’utiliser certains mots plutôt que d’autres, d’utiliser des mots récents ou anciens, et même de former des syllabes plutôt que d’utiliser des grognements relève de l’idéologie puisque cela influe sur notre façon de voir le monde.
          Les mots ne sont jamais neutres.
          Leur existence et leur inexistence, leur utilisation et leur non-utilisation relève de l’idéologie.
          Par exemple, certains mots n’existent pas dans d’autres langues. « Intimité » au sens que nous lui donnons n’existe pas, je crois, en chinois.
          Vous pensez que ça n’a pas d’influence ? Que les chinois peuvent connaître le concept s’ils ne connaissent pas le mot ?

          N’importe qui ayant un peu étudié le langage sait qu’utiliser des mots relève déjà du travestissement du réel, parce que la première qualité nécessaire du langage est de faire le tri entre le nécessaire et le superflu.

          Par conséquent, une « langue pure » pour décrire un « monde nu », ça n’existe pas.
          Vous faites du fondamentalisme du langage un poil débile, sans vouloir vous offenser.

  • Il n’y a pas que l’état qui a des intentions liberticides, le privé déploie aussi des moyens liberticides avec encore beaucoup plus de vélocité et les moyens techniques pour cela sont de plus en plus performants et vicieux.

    Je regrette que sur Contrepoints ce sujet ne soit pas évoqué parce qu’on ne critique pas le privé parce que ce serait idéologiquement incorrecte.

    • Absolument, il y a tout un tas de chapitres à écrire là-dessus, et je ne peux que vous inviter à développer.

      Toutefois, il y a une différence. Le privé n’a pas le moyen de nous OBLIGER à consommer et payer leurs services. Par exemple, je n’ai pas de compte Facebook. Et si on veut quand même, généralement on a le choix du fournisseur et d’en changer, virer Microsoft et prendre Linux par exemple. Ou d’arrêter totalement.

      L’Etat nous FORCE à consommer et payer des services même si on n’en veut pas, s’ils sont manifestement inadaptés, clairement inefficaces ou dont l’utilité collective est pour le moins douteuse.

      Je veux bien qu’on m’oblige à payer pour des écoles même si je n’ai pas d’enfants, c’est raisonnable. Mais payer obligatoirement pour financer des divertissements audio-visuels qui n’intéressent (au sens pécuniaire) que leurs auteurs, et sans pouvoir choisir non plus, c’est de la vente forcée inacceptable.

      • Certes, avec le privé il n’y a pas d’obligation, seulement il ne faudrait plus avoir de CB, de téléphone portable ni de smart phone, il ne faudrait plus exister sur internent, ne plus y faire de recherche c’est donc devenu pratiquement impossible d’y échapper. Il va falloir compter sur la vidéosurveillance de plus en plus connecté, avec des algorithmes de reconnaissances faciales de plaques d’immatriculations installée dans les espaces privés (magasins) et publics, associés à de la géolocalisation, le passant que vous croiserez aura des lunettes connectées avec reconnaissance faciale il vous géolocalisera instantanément; le progrès ne vaut que si il est partagé…

        Il existe des organismes de défense des consommateurs, il faudrait l’émergence d’un organisme de défense des libertés individuelles, comme la CNIL, mais par initiatives citoyennes permettant un lobbying directe sur le privé et le politique.

        • Le compte bancaire est une obligation décidée par l’Etat, pour toucher un salaire par exemple. C’est lui qui restreint fortement l’usage de transactions anonymes. Lui aussi qui exige de pomper sa dîme au passage (TVA). Lui encore qui a droit de vie et de mort sur votre compte bancaire (ATD).

          C’est encore l’Etat qui interdit de masquer son visage dans la rue.
          C’est toujours l’Etat qui exige une identification nominative à l’ouverture d’un compte internet ou téléphonique.

          Les grosses firmes privées sont loin d’être des anges (Monsanto, tabac, pharma, banques…), et il faut encourager et féliciter ceux qui militent pour freiner leur expansion excessive.

          Néanmoins sur l’échelle des risques d’atteintes à nos libertés, les Etats sont nettement plus dangereux et préoccupants. A la louche d’un facteur dix ou cent. Le risque de dictature vient de l’Etat, pas des entreprises.

          Dernier point, aucune société privée ne se permet la coercition physique (hors mafia). Seul l’Etat possède la force militaire. Il en exige même le monopole et interdit strictement au citoyen le droit de se défendre contre l’Etat quelles que soient ses dérives.

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