Croissance décevante au Japon

Les Abenomics affichent des résultats décevants sur la croissance et l’investissement, malgré les moyens colossaux mis en oeuvre au Japon et une dette publique qui a dépassé le million de milliards de yens.

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Croissance décevante au Japon

Publié le 12 août 2013
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Les Abenomics affichent des résultats décevants sur la croissance et l’investissement, malgré les moyens colossaux mis en œuvre au Japon et une dette publique qui a dépassé le million de milliards de yens.

Par Alexis Vintray.

Shinzo Abe, premier ministre japonais, en 2012

Les chiffres de la croissance économique au Japon restent décevants, malgré les grandes promesses des « Abenomics« , la politique économique mise en œuvre par le premier ministre Shinzo Abe. L’économie japonaise a ainsi affiché une croissance de 2,6% en rythme annualisé sur le second trimestre 2013, très en dessous des attentes des analystes qui tablaient sur 3,6%. De même, la croissance du premier trimestre 2013 a été revue à la baisse, à 3,8% en rythme annualisé contre 4,1% selon les chiffres initiaux.

Dans le même temps, la consommation intérieure a été stimulée par les liquidités massives déversées sur l’économie, mais l’investissement des entreprises a continué à reculer pour le sixième trimestre consécutif, soulignant le manque de confiance des acteurs économiques dans les perspectives économiques du pays avec la politique de Shinzo Abe.

La stratégie mise en place par le Premier ministre japonais Shinzo Abe vise à inonder les marchés avec de la monnaie fraîchement créée par la banque centrale. L’idée est de créer de l’inflation, de déprécier le yen et de donner ainsi un coup de fouet aux exportations nippones. L’Abenomics est sans doute la manifestation la plus extrême de cette foi en la politique monétaire.

Des résultats décevants qui ne surprennent pas : qui pourrait croire sérieusement qu’imprimer massivement des billets est de mesure à régler les problèmes structurels du Japon ? Comme le rappelait Alex Korbel dans ces colonnes, les Abenomics essaient en effet de guérir l’économie japonaise de ses faiblesses structurelles en employant un outil inadapté, la politique monétaire :

  • Le Japon possède au moins trois problèmes structurels. Le premier est l’héritage écrasant de plus de deux décennies de programmes de relance budgétaire. En tentant artificiellement de relancer l’économie après l’éclatement de la bulle immobilière et boursière de 1991, les gouvernements japonais successifs ont mis en place des politiques de relance. Elles laissent derrière elles des infrastructures publiques grotesquement surdimensionnées et une dette publique gigantesque.
  • Le deuxième problème est son choc démographique imminent. Le Japon a déjà la population la plus âgée du monde mais en raison de l’allongement de la longévité, de la fécondité modérée et de son immigration minimale, la population japonaise va diminuer. Elle devrait passer de 128 millions d’habitants aujourd’hui à 87 millions en 2060. Sur la même période, la population en âge de travailler va diminuer de moitié.
  • Le troisième problème structurel japonais est son marché du travail très réglementé, ce qui a entraîné une hausse des coûts salariaux unitaires. Il est difficile pour les entreprises du pays de se restructurer car licencier est très coûteux.

Autant de problèmes de fond qui, pour être réglés, ont besoin de courage politique, et non du déversement de tombereaux de billets. Seuls gagnants de cette politique qui vise à doubler la masse monétaire en deux ans, les banquiers et les marchés boursiers dans lesquels l’essentiel de la création monétaire s’est retrouvé : malgré l’absence de changement profond des perspectives de croissance, le Nikkei a gagné 50% en six mois. Les banquiers nippons savent qui remercier pour leurs bonus : les contribuables japonais qui devront régler une dette qui représente désormais plus d’un million de milliards de yens. 1 000 000 000 000 000 yens. 245% du PIB japonais. Vive la relance !

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  • « des infrastructures publiques grotesquement surdimensionnées » : tiens, ça me rappelle vaguement un autre pays ! Mais lequel ?

    Eh oui, l’impression monétaire débridée (ou l’hyper-endettement public, ce qui revient au même) bénéficie toujours aux mêmes clientèles parasitaires mais ne règle aucun des problèmes des pays qui s’y adonnent, pour la simple et bonne raison que ces clientèles sont le problème.

  • La population japonaise a déjà commencé à diminuer. Problème ou solution (à long terme) ?

    • Comment une population (l’agrégation des individualités) pourrait-elle être un problème ou une solution ? La population est, et c’est bien suffisant.

  • C’est curieux mais chaque fois que je vais au Japon (deux fois par an) je n’ai pas du tout l’impression que le pays est au bord de la ruine. A Tokyo, de partout des nouvelle constructions sortent de terre, de nouvelles lignes d’interconnexions ferroviaires sont en construction, la plus grande gare du monde (Shinjuku) se dote d’une gare routière au dessus des voies, il est vrai que la gare routière existante est vraiment pas pratique, avec en prime une extension du gigantesque centre commercial qui jouxte la gare et y est même imbriqué comme pour beaucoup d’autres gares ferroviaires. J’aime bien aussi le trait d’humour « infrastructures publiques grotesquement surdimensionnées », parlez-en aux Tokyoïtes, ils vous répondront que tout va bien et qu’heureusement que les infrastructures sont là sinon la ville (la plus grande conurbation du monde) serait asphyxiée, par exemple il faudrait doubler les autoroutes urbaines qui sont encombrées 24/24h. Quant à la natalité figurez-vous qu’elle redémarre (un frémissement comme dirait Hollande à propos de la reprise économique) et que le Japon vient de modifier les règles absurdes de l’immigration pour accueillir plus d’étrangers car somme toute, il fait bon vivre au Japon. Quant à la législation du travail presque aussi surréaliste que celle de la France, un projet de réformes radicales est en cours. Avant d’écrire un article de ce genre allez voir ce qui s’y passe au quotidien.

    • Je connais le Japon et je suis bien d’accord avec vous. Tout comme à Hong Kong, les infrastructures n’ont rien de surdimensionnées. Et elles sont correctement entretenues, pas comme en Europe. Ceci étant, le billet est pertinent. Mais comme pour le cours de l’or, l’explosion éventuelle de la bulle immobilière française, et l’issue de la crise, bien malin est celui qui saura prédire l’avenir du Japon.

      • L’endettement finira par asphyxier ce pays, quand les épargnants japonais ne pourront plus suivre les émissions de dette…
        Je suis d’accord pour dire que le pays a des infrastructures d’excellente qualité (et une main d’oeuvre extraordinaire), néanmoins les gigantesques plans de relances et QE tentés depuis des années vont mener le pays à la ruine.

        • Oui. Ce pays est tellement fantastique que s’en est à pleuré. Comment peuvent-ils répéter autant de fois les mêmes erreurs ?

  • Non seulement la politique d’Abe était la dernière cartouche du Japon mais en plus elle n’a même pas durée un an ! N’est pas les USA qui veut.

    Raison de plus d’éviter les politiques de relances et autres manipulations de la monnaie. Il n’y a que la rigueur, les réformes structurelles et la basse inflation qui donne des résultats pour sortir de la crise.

  • Quant est-il de la fiscalité des individus et des entreprises au Japon ?

    Quand je pense que M. Le Pen, Dupont-Aignan et autres keynesio-protectionnistes français prennent cette politique japonaise pour modèle…

  • Est-ce si difficile que ça de concevoir une politique de baisse des dépenses publiques ET de baisse de la fiscalité et des contraintes réglementaires ? Pourquoi aucun pays en crise ne fait ça ??! (A part peut-être l’UK). Ca me praît être le bon sens le plus total ! Pas besoin d’être un ideologue liberal pour penser a cette politique !

  • Les commentaires sont fermés.

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