La tragédie française

Ni le gouvernement ni l’opposition ne prennent la mesure de la tragédie sociale et économique française : ils n’en parlent pas.

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La tragédie française

Publié le 23 avril 2013
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Ni le gouvernement ni l’opposition ne prennent la mesure de la tragédie sociale et économique française : ils n’en parlent pas.

Par Guy Sorman.

Tandis que la classe politique s’amuse, à droite et à gauche, sur le mariage pour tous et le patrimoine des ministres, la société s’enfonce. Il est devenu pour un jeune, diplômé ou non, à peu près impossible de trouver un emploi : seule la fonction publique recrute encore un peu, en particulier dans les Pôles Emplois qui accueillent les chômeurs et ne leur proposent rien. Le marché du travail a donc disparu et il ira se rétrécissant dans les mois, les années qui viennent. On peut le prédire puisque les investissements privés créateurs d’emplois à terme sont interrompus depuis un an, que le nombre de dépôts de bilan et faillites déclarées aux Tribunaux de commerce a doublé en un an : ces PME qui disparaissent, pourvoyeuses de 80% de l’emploi privé en France, ne retrouvent aucun repreneur, situation absolument nouvelle. Il est également dissuasif de revendre une entreprise en bonne santé, parce que le marché financier et immobilier stagnant ne permet pas de replacer les fonds après une vente.

Pour les entreprises qui résistent encore à cette débâcle, l’administration s’acharne à les décourager de se développer et de recruter. Depuis un an, les inspecteurs du fisc, de la sécurité sociale et du travail excités par un climat de lutte des classes, harcèlent les entrepreneurs, les rackettent en multipliant les contrôles et en interprétant les textes de manière systématiquement défavorables aux entreprises. Ce harcèlement est plus dissuasif encore que les taux de l’impôt et des assurances sociales (qui confisquent tout de même la moitié du chiffre d’affaires), par l’incertitude qui pèse sur les entrepreneurs. Ceux-ci ne recrutent pas faute de perspectives de croissance et plus encore parce que, de fait, le licenciement est juridiquement impossible, sauf à payer des indemnités faramineuses aux salariés en surnombre ou improductifs. Seuls les secteurs du luxe et de l’armement, destinés à l’exportation résistent mais produisent toujours plus hors de France.

C’est en dehors de France aussi que les entrepreneurs les plus dynamiques envisagent leur destin : il se trouve aujourd’hui environ trois millions de Français actifs en Amérique du Nord, en Asie, en Europe centrale. Les cabinets spécialisés dans les transferts d’activité vers les États-Unis ont vu, depuis un an, leur clientèle multipliée par dix.

Les dirigeants politiques français, majorité et opposition, en sont-ils conscients ? L’ignorance de l’économie, l’absence d’expérience de l’entreprise sont partagées par les deux camps. La preuve en est que ni les uns ni les autres ne prennent la mesure de la tragédie française : ils n’en parlent pas.

Certaines initiatives relèvent de la farce : créer une commission chargée de réfléchir à l’innovation, composée d’un philosophe et d’un astronaute, ne générera aucune innovation. Créer une Banque publique d’investissement, financée par un impôt supplémentaire (BPI) avec Ségolène Royal au Conseil d’administration, ne pourra que soutenir les secteurs archaïques, freinant un peu plus la destruction créatrice qui serait le moteur de la croissance.

Jamais depuis 1981, la société française n’aura été plus mal en point, au temps des nationalisations, des ministres communistes et de la tentation de quitter l’Europe. Mais François Mitterrand savait quand changer de cap et un certain Jacques Delors tenait en réserve une politique alternative. En ce moment, on ne discerne aucune relève, ni à gauche, ni à droite. Le Front national ? Son projet économique est encore plus fou que ceux de la gauche et de la droite additionnés.

Que faire ? On le saurait en théorie : autoriser les licenciements, réduire les dépenses militaires et de l’Éducation nationale, vendre le patrimoine immobilier et industriel de l’État, introduire l’impôt à taux unique, ramener de trois à deux ans la période de contrôle sur les entreprises, supprimer l’impôt sur le patrimoine, procéder à une amnistie fiscale. Qui le fera ? Personne. Comment tout cela va-t-il se terminer ? On ne sait pas.


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  • L’abolition des privilèges de la classe politique fait inéluctablement partie des réformes à mettre en place. Pourquoi voulez-vous qu’ils se penchent sur les solutions valables.

    Leur but est d’agir, pas de trouver des solutions

    • C’est la démocratie directe qu’il faut instaurer.
      Il n’existe pas d’autre moyen de contrôler les politiciens.

      Guy Sorman reste obnubilé par l’économie, et néglige tout le reste.
      Quelle inconscience pour un libéral de croire que le mariage pour tous est un détail !
      Pense-t-il que le monstre égalitaire sera rassasié ? Il lui faudra certes un peu de temps pour digérer une proie aussi considérable; mais il en sortira plus gros, plus vorace, plus féroce que jamais. Et croyez bien qu’il retournera dévorer l’économie !

      L’institution du mariage était justifiée par le bien commun; en cela elle était acceptable pour les libéraux. Dénaturée au nom de l’égalitarisme au point de n’avoir plus aucun rapport avec le bien commun, c’est maintenant une institution arbitraire.
      Donc intolérable.

      Non moins grave est son adoption par des représentants, qui plus est mal élus, alors que même ses promoteurs y voient un changement de civilisation ! Alors même qu’il y a tout lieu de penser que le peuple est majoritairement contre !!
      Une telle loi ne peut être adoptée que par référendum, et toute autre option est intolérable. Les socialistes ont démontré leur totalitarisme.

  • Mais si on sait comment tout cela va se terminer. Vous savez. Ça vous fait juste trop peur pour vous l’avouer.

  • Vous avez raison sur tout, sauf sur le désarmement. Il est hautement suicidaire de se désarmer à l’heure où la Chine, l’Inde, le Brésil (avec notre ex-Foch) s’arment pour soutenir leur politique offensive à l’extérieur. Si vis pacem, para bellum.

    D’autre part, la France a un carte d’atout énorme à jouer : la deuxième zone maritime du monde, 11 millions de km² de souveraineté (20 fois la France métropolitaine !). Et pour l’exploiter en sécurité, il faut une marine qui tienne la route, donc pas moins de moyens (déjà réduits à la portion congrue : 35 000 marins aujourd’hui contre 70 000 en 1996) mais bien un deuxième groupe aéronaval, plus de nouveaux sous marins nucléaires d’attaque moins bruyants, des frégates, des patrouilleurs…

    • Allons, quels dangers représenterait l’annexion par un pays comme la Chine ? On y échangerait notre sombre démocratie en récession pour une dictature éclairée en croissance. On y gagnerait la flat tax, la facilité d’entreprendre et de s’enrichir, et la fin des dépenses de redistribution.
      Quant à eux, ils ne gagneraient rien, si ce n’est des leçons sur la corruption par les Corses et la SNCM, et sur la liberté d’expression par une presse aux ordres subventionnés…
      Alors il y a peut-être de bonnes raisons de garder une protection militaire, mais certainement pas contre la Chine, l’Inde ou le Brésil.

      • Vous omettez la redistribution musclée des richesses produites par les entrepreneurs vers les poches des dirigeants du Parti.

        Cahuzac avec ses 600 000€ maladroitement planqués à Singapour fait figure de petit bras à côté de leurs fortunes personnelles qui se chiffrent en milliards.

        Autre bonne raison qui s’ajoute à cet apprentissage du détournement au niveau symphonique : le soja, c’est dégueulasse.

        • Je ne l’omet pas, je la compare à celle que nous subissons ici. Le distingo entre le PCC et le parti au pouvoir en France est spécieux (à mon avis, et d’ailleurs pas souvent à l’avantage du second). Oui, il faut compter en Chine pour réussir arroser quelques membres du parti, mais ça coûte toujours moins au final que les seuls impôts français, et au moins on a alors des soutiens au pouvoir.

          Quant au soja, on m’en a bien plus imposé au Japon et en Corée qu’en Chine, et ça n’est pas pire que les épinards…

    • Notre zone economique ? Oui, mais nous vivons encore dans le souvenir d’une grandeur passee. Si pour des besoins economiques, la Chine envahie militairement la Polynesie (genre les Argentins sur les Malouines, ou les Britanniques n’ont aujourd’hui officiellement plus les moyens d’intervenir en cas de nouvelle invasion), … que ferons nous ? Rien.

      Au niveau de l’ONU la Chine possede un siege permanent au Conseil de securite et un droit de veto. Donc aucune resolution possible de ce cote.

      Au niveau de l’OTAN ? La France fermera son museau sur ordre des Etats-Unis (avec Flamby, c’est du tout cuit), car il y a trop d’interets economiques lies a la Chine.

      Moralite : on vit encore dans le souvenir d’un grand pays, pensant que notre diplomatie (sans defense armee) nous sauvera,….. un peu comme apres les accords de Munich. Le changement s’est effectivement maintenant !

      • La Chine n’envahira évidemment pas par la force notre zone économique, mais elle pourrait proposer son « aide » dans des contrats commerciaux pour l’exploiter, où nous nous ferions rouler dans la farine, vu qu’on est de moins en moins capables de le faire seuls. Pourquoi les Chinois se transformeraient-ils soudain en guerriers quand ils prennent tant de plaisir à conclure des contrats commerciaux qui les avantagent bien plus ?

        • Je ne penche non plus pour un recours à la force très prochainement, mais en revanche qu’ils viennent violer les zones maritimes pour faire de la pêche extensive (ce qui détruit la ressource), de l’exploration, des prélèvements ou que sais-je encore, c’est extrêmement possible, et d’ailleurs c’est déjà ce qu’il font.

          Pour pouvoir empêcher cela, il faut avoir des bateaux et des avions de surveillance, des moyens d’intervention.

          Le monde va se battre de plus en plus pour les terres rares, et comme je le disais plus haut, il semble y en avoir pléthore près des failles océaniques (donc sur les zones de la Polynésie), et pour ne pas se faire flouer cette ressource, il faut être prêt à la préserver. Avec autre chose que des mots creux et des flambys.

          • Pour autant que je sache, ça n’est pas le manque de sécurité qui retient d’aller exploiter les minéraux rares sous-marins. Je ne comprends pas du tout cette focalisation sur une protection militaire.
            D’une part, si l’on regarde le développement du pétrole offshore dans les années 70 et 80, on note que les champs de mer du Nord appartenaient notamment à la Norvège, aux Pays-Bas, à un Royaume-Uni pré-Thatchérien, ceux d’Afrique au Gabon, au Congo, au Cameroun, au Nigéria, à la Tunisie, etc., tous pays assez peu effrayants au plan marine de guerre, sauf peut-être la GB.
            D’autre part, on peut se souvenir que la France, sans la moindre goutte de pétrole dans ses eaux (Amoco Cadiz mis à part), avait de nombreuses ingénieries conquérantes et payait une bonne partie de ses importations par les services qu’elle vendait ainsi aux opérateurs pétroliers.

            A supposer que se développe une exploitation de minéraux rares sous-marins (à laquelle je ne crois pas, pour bien connaître les problèmes technologiques en jeu), pourquoi vouloir imaginer que les règles en soient cette fois fondées sur la force militaire et développer à grands frais une marine de guerre, plutôt que d’ouvrir à nouveau l’espace aux initiatives privées, fondées sur le libre jeu du commerce, l’innovation technologique et le réinvestissement des bénéfices ?

  • Une gauche et une droite aussi socialistes l’une que l’autre. C’est ce que je disais l’autre jour : désormais le libéralisme est d’extrême-gauche car il est révolutionnaire, comme en 1789. http://www.contrepoints.org/2013/04/05/120594-gauche-droite-de-quoi-il-sagit-vraiment-et-pourquoi-les-liberaux-gagneraient-a-le-comprendre

  • solution le fn meme si ca vous derange … l umps !!!

  • Quel est l’intérêt de supprimer que l’imposition sur le patrimoine ? Pouquoi lui et pas tous ?

    • C’est claire que les politiques ne voient pas la poudrière qui est en train de se mettre en place:
      Dans une voie une comme dans l’autre il va y avoir « du sport » ces prochains mois/ années.

  • Une France sans énarques serait en meilleure santé!

  • Cher Guy Sorman,

    autre épisode de la tragédie française : dans les locaux du syndicat de la magistrature, se trouve, parmi d’autres « cons » ( sic), votre photo. A lire absolument.

    http://www.atlantico.fr/decryptage/justice-impartiale-manifestement-pas-pour-certain-nombre-juges-syndicat-magistrature-706344.html?page=0,0

  • Déjà je fais remarquer les les socialistes font leur perestroika!Ils reconnaissent enfin que pour qu’un pays soit prospère et que pour que ses enfants aient un avenir ,il faut des entrepreneurs !Maintenant je ne pense pas que ces mesures changerons quoi que ce soit car notre système a le même fondements idéologiques et structure que l’ex-URSS!Et on connait les effets de la glasnost( voir les politiques de transparence du patrimoine des élus et du projet de réforme constitutionnelle) et de la perestroïka ont terminées.A la place de Hollandebachev je me ferais du souci…

  • Réduire les dépenses militaires….la petite touche qui à mes yeux réduit à néant le but de l’article.

    Guy Sorman sait-il que les dépense militaires ne représente qu’1.5% du PIB, que ce n’est que 30 milliards sur un budget de 1100 milliards d’euros. Guy Sorman sait-il que ce secteur grand pourvouyeur d’emplois qualifiés assure à notre pays sa totale souverainté?
    Combien nous coute chaque année cette politique sociale insensée, combien nous coute les facéties dispendieuses de nos élus tant locaux que nationaux?

    Guy Sorman est soit un imbécile incompétent en la matière soit c’est un aspect du problème qu’il connait parfaitement. Dans le premier cas, on peut lui pardonner mais il serait avisé de fermer son claque-merde. Dans le second cas, c’est tout simplement de l’incitation à la haute trahison, chose à laquelle ma tolérance est à peu près nulle.

    • « claque-merde », la petite touche qui réduit à néant votre commentaire.

      • Il y a des choses bien plus violentes dans mon commentaire. Étonnant que vous n’ayez retenu que celle-ci. Mais je maintiens le vocable de claque-merde qui est tout à fait justifié.

  • la france est sans doute l’un des rares pays à donner du travail à des millions de gens dans le monde tout en ayant un taux de chomage en hausse ; un petit exemple : nous coupons les arbres de nos forêts dont le bois est envoyé en chine , qui fabrique des meubles en chine avec notre bois et nous revendent ainsi les produits finis ; il y a un tas de métiers qui ont pratiquement disparu dans notre pays , parce que l’on ne fait plus réparer , ça revient trop cher , alors on jette pour racheter , nos industries coulent ou foutent le camps , on emmerde les ceusses qui cherchent à s’en sortir ( auto entrepreneurs ) , on entretient et on soigne gratis des millions de gens sans aucune contrepartie , et on est dirigé depuis bien trop longtemps par des individus qui ne comprenent rien au monde du travail et qui en plus sont loin d’être intègres ; la france est dans la mouise et elle n’est pas prête d’en sortir ;

  • Depuis qu’il nous a annoncé que l’Europe nous a protégé de l’inflation, j’ai quelques doutes sue Mr.Sorman qui m’était apparu, jusque là, fort sensé.
    Il dit une vérité : le pouvoir dérive et les hommes qui l’incarnent nous entraînent dans une société bureaucratique avec tout ce que cela signifie.

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