Aurélie Filippetti, le floppy disk de la Culture

Décidément, le Ministère de la Culture se vide de sa substance, et il ne nous en restera que des dettes.

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Aurélie Filippetti en avril 2012

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Aurélie Filippetti, le floppy disk de la Culture

Publié le 14 septembre 2012
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Il aura fallu plusieurs décennies depuis Malraux, mais je crois que là, c’est bon : le Ministère de la Culture est maintenant parfaitement ridiculisé. Chrysalide déjà accessoire à sa création, ce ministère est progressivement passé au stade encombrant puis coûteux sous la direction de frétillants histrions sociaux-démocrates prodigues de l’argent des autres, et il s’est finalement métamorphosé en Papillon inutile avec l’arrivée phénominable d’Aurélie Filippetti. À présent, regardons-le déployer ses ailes.

Et force est de constater que le niveau, déjà bas avec le passage catastrophique de ministres tels que Christine Albanel (le Capitaine Anéfé), ne s’est pas relevé du récent changement. Le Papillon semble balourd, et broute tragiquement le sol en ne pouvant s’élever malgré de vigoureux battements d’ailes qui ne font que du vent.

À peine arrivée, la ministre a en effet fait créé une petite polémique en se prononçant sur internet, comme souvent avec ces cuistres malheureusement muni d’un appareil vocal en état de marche, pour sortir une de ces opinions tranchées qui fleure bon la spontanéité et l’avis en prêt-à-penser facile à démouler. On se souvient qu’elle avait ainsi noté que, je cite,

Sur le Net, rien n’est éditorialisé.

Certes, la lecture de l’article complet dans le magazine Polka (jusqu’alors à peu près inconnu) avait permis de comprendre que la ministre voulait surtout évoquer certaines plateformes, certains sites, mais l’ambiguïté générale du discours et, soyons clairs, l’amateurisme de la ministre dans le domaine permettaient d’interpréter défavorablement cette saillie qui aurait dû rester, comme le magazine, confidentielle.

Le doute sur sa maîtrise du sujet (et de sa langue) se sont cependant évaporés à mesure que d’autres déclarations, aussi ridicules, se sont empilées dans le dossier biographique de la minustre. Remarquez au passage qu’elle n’est en poste que depuis une petite poignée de mois. Espérons qu’elle y restera longtemps, ce qui permettra à nos éditos de trouver une bonne cliente (ceci dit, soyons réaliste : depuis que le standard de recrutement chez les ministres, tant de l’UMP que du PS, s’est étalonné sur Frédéric Lefebvre, on n’a plus vraiment de mal à trouver des pointures de la citation débile).

Et pour continuer dans les petites phrases consternantes de la ministre (dont les émoluments, forts généreux, sont payés par vos impôts, il est utile de le rappeler), revenons le temps d’un paragraphe ou deux sur sa décision de supprimer le projet d’une Maison de l’Histoire de France, délicieusement trop sarkozyste comme ne manque pas de le rappeler Marianne (qui manque un peu de sujets depuis que sa cible unique a disparu des médias). Un libéral comme moi ne peut évidemment pas s’attrister de la disparition d’un de ces projets dispendieux et parfaitement inutile dans lequel une montagne d’argent public aurait été cramée en pure perte. Cependant, les justifications avancées pour la suppression de cette idée loufoque, loin de ne s’appuyer que sur le constat évident qu’il n’y a plus une thune pour ce genre de fanfreluche, méritent le détour surtout lorsqu’elles sont expliquées par la ministre elle-même (à partir de 27:17 sur l’enregistrement inclus ci-après) :

La Maison de l’Histoire de France était un projet extrêmement coûteux et peut-être un petit peu contestable idéologiquement parce que je crois qu’il n’y a pas une manière de raconter l’Histoire…

Déclaration fort intéressante pour sa charge contre la notion d’Histoire idéologisée ou récupérée, surtout lorsqu’on peut lire les propos d’un certain Nicolas Offenstadt, lui aussi opposé au projet de Maison de l’Histoire de France, qui déclare parlant de la ministre :

Elle est attentive à une écriture de l’histoire en phase avec les questionnements d’aujourd’hui.

Autrement dit, soyons parfaitement clairs : si la MHF n’aboutit pas, ce n’est pas parce qu’on n’a plus un rond, mais bien parce que l’Histoire y aurait été racontée sous un angle qui ne convenait pas. Car voyez-vous, l’Histoire est, comme chacun le sait, écrite par les vainqueurs. Et les vainqueurs ont changé de camp dernièrement : on est passé des socialistes corporatistes de droite aux socialistes étatistes de gauche, ce qui change du tout au tout et impose d’autres cadres à l’Histoire de France qu’une Maison trop sarkozienne.

Très en verve, et probablement sous l’influence du syndrome du gros micro mou, particulièrement aigu lorsqu’on vient tout juste de commencer avec son nouveau maroquin, la ministre ne s’est pas arrêtée là et s’est fendue d’un interview avec le journal Le Monde. À cette occasion, une Ministre de la Culture ne pouvait passer à côté d’un Grand Festival, et ce sera donc celui des petites phrases.

Je passe rapidement sur sa définition personnelle de la culture, qui est, selon elle, « le disque dur de la politique ». Si tel est le cas, Aurélie Filippetti est alors le floppy disk de la Culture, surtout pour son côté délicieusement floppy. En revanche, on pourra constater qu’encore une fois, les pensées de Bastiat sont oubliées. La ministre déclare en effet, inconséquente :

on a préservé l’enveloppe du spectacle vivant et des arts plastiques pour 2012, et ce sera aussi le cas pour 2013. Ce n’est pas une fleur : les compagnies de danse, les théâtres, les festivals créent de l’activité partout en France.

Et pour sûr, il était indispensable, dans cette Fraônce magnifique et phare de l’Humanité qui regarde ailleurs, de conserver des thermomouleurs de caca fluos et autres saltimbanques joyeux du rayonnement cuculturel. C’est ce qu’on voit, ce qu’on entend et ce qu’on subit avec force subventions et reportages télévisuels niaiseux. En revanche, ce qu’on ne voit pas, c’est que ces activités « créées » (financées, plutôt) partout en France l’ont été avec de l’argent ponctionné partout en France, argent qui aurait pu créer d’autres activités décidées non pas unilatéralement par Aurélie ou ses cabinetards grassement payés, mais par ceux-là même qui y mettent leur argent. Certes, on aurait probablement connu une décroissance des caniches gonflables et amas ferreux dans les jardins de Versailles. Mais on aurait connu recrudescence d’investissement, de créations d’entreprise, d’épargne (celle qui alimente le moteur des entreprises, par exemple).

Un peu moins de coûteux aciers versaillais, un peu plus d’entreprises… En période de crise, eut-ce été si gênant ?

Apparemment, oui, puisque pour Aurélie Floppydisk, l’économie de la France repose largement sur la Culture :

… les artistes, et tout le secteur de la création, excellent et incarnent la compétitivité de notre territoire. Il est normal, pour un grand pays dont l’économie repose largement sur la culture, qu’il y ait un mécanisme d’indemnisation du chômage spécifique.

Et donc si le régime des intermittents du spectacle travail est complètement déficitaire dans des proportions qui font écarquiller les yeux mêmes dans certains services de l’État, ce n’est pas grave puisque l’économie française leur doit bien ça. Bien qu’abasourdi de lire de telles choses, le lecteur n’a pas le temps de se remettre de ses émotions puisqu’elle enchaîne, dans un souffle, avec l’idée d’une bonne grosse taxe Google (j’aurai certainement l’occasion de revenir sur ce magnifique édifice de la pensée spoliatrice socialiste, avec protectionnisme à la clef et échec cuisant non-optionnel en kit vendu très cher).

Cependant, au détour d’une interrogation sur HADOPI (la Haute Autorité Destinée à Observer les Petits Internautes), on comprend qu’Aurélie, elle a tout de même pas mal de soucis de budgets. Outre les coupes qu’il faut faire sans le dire, et les projets qu’il faut sabrer sans attendre (et pouf, fini le Conseil National de la Musique), on apprend son opinion plutôt pastel sur les bienfaits de la Hautotorité. Exquise seconde de lucidité :

Cela pour dire que ce n’est pas la loi Hadopi qui a fait changer les internautes.

Mieux : sur les quatorze dossiers transmis au parquet pour instruction (oui, seulement quatorze sur les millions de mails envoyés pour choper du Kevin qui décharge des vidéos de femmes nues sur les internets), la ministre se félicite qu’aucune « poursuite n’ait été engagée. » Bref : HADOPI, c’est l’inutile et le coûteux, comme tout le reste, mais en version numérique. Et le pire, c’est qu’en plus, la pauvrette s’est encore planté : finalement, la Hautotorité a fini par choper un gusse et l’a violemment sanctionné de 150 euros. Pour 12 millions par an, c’est une jolie performance.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, je crois qu’on tient le bon bout : le ministère de la Culture, récipient creux de politiciens chamarrés mais inutiles, se voit progressivement vidé de sa substance. Dans le même temps, à chaque nouvelle nomination au maroquin culturel, le niveau général de son frétillant responsable n’a pas arrêté de dégringoler pour arriver à cet exemple caricatural mêlant improvisation et charisme de cruche vide, occupant très péniblement un espace sonore par des métaphores bizarres.

Petit à petit, avec la crise et la faillite de l’État français s’éteignent peut-être (enfin !) les dépenses ridicules et somptuaires des cultureux subventionnés. On dirait une histoire, finalement pas très drôle, mais tout à fait à propos.

Floppy et Flamby sont au pouvoir. Floppy tombe à l’eau. Que reste-t-il ? Des dettes.

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