Crise : combien de temps encore ?

Il est bien difficile de savoir quand la prochaine crise éclatera. Mais elle ne reste pas moins inévitable.

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Crise : combien de temps encore ?

Publié le 9 juillet 2012
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S’il est un exercice difficile, c’est bien celui des prédictions (notamment lorsqu’elles concernent le futur). Ces éditos n’échappent pas à la règle : à plusieurs reprises, j’ai tenté d’imaginer ce que l’avenir nous réservait, avec plus ou moins de succès. La semaine qui vient de s’écouler illustre assez bien le problème : il est relativement aisé de comprendre que les problèmes s’accumulent, il est bien plus dur de savoir quand ces problèmes deviendront insurmontables …

Ainsi, mathématiquement, il est certain que la situation d’endettement généralisé ne peut durer éternellement : l’accumulation des plans d’aide fumeux tous basés sur de l’émission de dettes toujours plus grandes ne résout en définitive absolument rien. D’autant que ces plans sont tous basés sur le prédicat que les banques et institutions financières manquent de liquidités alors qu’à l’évidence, c’est d’un problème de solvabilité et, in fine, de confiance qui se pose.

Mais quand bien même cette évidence, si difficile à entendre dans les journaux télévisés, dans les articles de presse mainstream, est pourtant connue des observateurs attentifs de la vie économique, le moment où ces problèmes de dette deviendront impossibles à surmonter par un nouveau tour de passe-passe comptable ne peut être deviné avec précision.

blockhaus, mur de l'AtlantiqueAutrement dit : on sait que la structure va s’effondrer, parce que c’est une certitude mathématique. Mais on ne peut pas savoir ni quand, ni comment. On peut prendre une analogie avec un bâtiment en béton armé, construit à la côte et soumis aux aléas marins, par exemple, les blockhaus du mur de l’Atlantique. Chaque jour, on constate à l’évidence que des petits morceaux de rocher et du sable se sont retirés, emportés par les courants, sous la structure du bâtiment. Chaque jour, des fissures apparaissent. Mathématiquement et compte-tenu du travail permanent de sape de la mer et du vent sur la construction, on sait avec certitude qu’elle finira par tomber, d’un bloc, un peu plus bas jusqu’au niveau des vagues qui viendront la lécher sans arrêt. Puis elle s’effondrera, définitivement. Mais nul ne peut prédire le moment de la chute, ni celui où la construction aura définitivement disparu du paysage, finalement absorbée par l’érosion.

L’économie mondiale, actuellement, fonctionne sur le même principe : le simple observateur que je suis, précédé ou rejoint par tant d’autres, aussi anonymes que moi, constate l’évidence qu’un effondrement est inévitable. Mais il devient de plus en plus délicat de mettre une date ou même une période sur le moment où cette rupture majeure interviendra.

D’ailleurs, rien ne permet d’affirmer qu’il ne s’agira pas d’un affaissement long, aussi douloureux que lent. La semaine qui vient de s’écouler contribue à cette dernière impression.

On apprend ainsi que la Finlande renâcle de plus en plus fort à l’idée de payer les dettes des autres pays de la zone euro, et explique officiellement que l’idée même de rester dans la zone euro peut être remise en question si les choses continuent de la sorte. Et tout indique que le peuple finlandais, dans son écrasante majorité, soutient les déclarations de sa ministre des finances. Et même si ces déclarations ne veulent pas dire que la Finlande s’apprête effectivement à quitter l’euro, les démarches bilatérales entreprises avec la Grèce il y a un an, et avec l’Espagne à présent, pour garantir un collatéral à l’aide distribuée, montrent clairement que le pays n’entend pas supporter le coût d’une solidarité à sens unique et d’une collectivisation des dettes à marche forcée.

Et on comprend d’autant mieux ces mises en garde puisque, comme on le sait, la Grèce n’a pas franchement réduit le nombre de ses fonctionnaires (et pan, 70.000 de plus au contraire), et qu’elle en est, encore une fois (après tant d’autres) à redemander un délai à ses créanciers.

Compte-tenu des efforts de l’État grec (ou plutôt, de leur absence presque totale), on comprend que la demande provoque immédiatement une crispation des bailleurs de fonds. Crispation qu’on peut lire dans les cours de bourse qui traduisent aussi des perspectives de croissance et d’emploi de plus en plus sombres, … et un accroissement des tensions sur la dette espagnole.

Comme je l’ai expliqué dans les premiers paragraphes, tout ceci était prévisible.

Quelle surprise peut-on avoir de découvrir qu’un pays gouverné par une bande de voleurs et de menteurs nous a menti et nous vole ? La seule surprise ici est de constater l’indolence du peuple grec, aussi cocufié que le reste du peuple européen dans son ensemble, et qui accepte que l’essentiel du fardeau lui soit reporté, pendant que son État pléthorique ne se remet pas en question.

Quelle surprise peut-on avoir lorsque les pays qui s’en sortent le mieux, après avoir eux-même remis à plat leur état providence, commencent à grogner et ne veulent plus remplir la facture ?

Quelle surprise peut-on avoir lorsqu’on apprend qu’une fois retombée l’euphorie artificielle d’un n-ième sommet européen, les marchés ne suivent plus et les tensions sur les dettes souveraines reprennent de plus belle ? Où est la surprise de voir que la demi-vie des bidouillages médiatico-financiers de nos élites dirigeantes est de plus en plus courte ?

Mario à la BCE, ça va donner !Où est la surprise lorsqu’enfin, Draghi, le super plombier de l’imprimerie industrielle de Papiers Colorés à Francfort, finit par admettre que la pauvre BCE est maintenant à court de moyens pour venir en aide à la zone euro ? Entre les LTRO, les facilités de crédit ahurissantes, les bidouillages sur taux, on comprend qu’on est effectivement arrivé au bout des bonnes idées. Les prochaines mesures, s’il y en a, seront pour le coup forcément surprenantes puisqu’absentes au catalogue pourtant fourni des mesures rigolotes à tenter pour camoufler de la dette par trillions.

Non, décidément, tout ceci était prévisible et les étapes suivantes le sont aussi.

On sait maintenant que la France se dirige droit vers une dette à 90% du PIB pour 2013, et que les agitations du clown Moscovici, de la frétillante andouille de Montebourg et du pauvre falot d’Ayrault n’y changeront rien. On sait aussi que, comme il était mathématiquement prévisible, la Grèce fera faillite, que les taux espagnols continueront de monter, et qu’après l’Italie et l’Espagne, la France sera le prochain maillon.

Seules, dans ces prévisions, manquent les dates. Une piste nous est cependant fournie par The Economist : c’est en septembre que la plupart des crises se dénouent violemment.

C’est une prédiction comme une autre. Et elle n’est pas non plus si surprenante.

Les crises, surtout en septembre

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