5 ans de Printemps Arabe : cinq portraits de martyrs

L’histoire de cinq victimes des répressions étatiques du Printemps Arabe

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Hamza al-Khatib

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5 ans de Printemps Arabe : cinq portraits de martyrs

Publié le 25 février 2016
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Par Alex Korbel.

En aspergeant son corps d’essence et en s’immolant en 2011, Mohamed Bouazizi a déclenché une révolution en Tunisie et les flammes de sa colère se sont propagées dans tout le monde arabe.

Le jeune vendeur de fruits et légumes de la petite ville de Sidi Bouzid ne savait pas qu’il entrerait dans l’histoire comme le déclencheur d’un séisme politique en Afrique du Nord et au Moyen-Orient.

Même s’il est le martyr le plus célèbre de ce réveil de la jeunesse arabe, plusieurs milliers d’autres personnes ont également donné leur vie pour mettre à bas les régimes corrompus et autoritaires de la région.

Voici l’histoire de cinq autres victimes des répressions étatiques du Printemps Arabe.

Ahmed Bassiouny (Égypte)

Alors que le mécontentement envers le régime d’Hosni Moubarak grossissait à la fin du mois de janvier 2011, de nombreux jeunes de la classe moyenne se sont joints aux manifestants. Ahmed Bassiouny, professeur et artiste numérique, était de ceux-là.

Cet homme ordinaire, marié et père de deux enfants, ne pouvait pas supporter de voir la violence utilisée contre les manifestants. Après son deuxième jour de participation, il écrit sur Facebook : « Ils veulent la guerre, nous voulons la paix. Je souhaite simplement que mon pays retrouve une certaine dignité ». Le 28 janvier, l’une des journées les plus violentes de la révolution égyptienne, les forces de sécurité abattent Ahmed Bassiouny.

Estimation du nombre de morts lors de la révolution égyptienne (janvier-décembre 2011) : 900.

 

Hamza al-Khatib, Syrie

Le 29 Avril, Hamza al-Khatib (âgé de 13 ans) et sa famille rejoignent une manifestation à Deraa, berceau de l’insurrection syrienne. Le garçon ne rentrera pas. Un mois plus tard, les autorités syriennes acceptent de faire parvenir sa dépouille à sa famille s’ils promettent de l’enterrer discrètement. Mais des images vidéo du corps ont rapidement circulé sur YouTube. Il était en état de décomposition avancée et des marques suspectes donnaient à penser que le garçon avait été torturé.

Son décès est survenu au moment où de nombreux Syriens ne savaient pas si le mouvement de protestation allait se poursuivre et de quelle manière le régime allait le réprimer. La vidéo macabre a galvanisé de nombreux militants et une page Facebook intitulée « Nous sommes tous l’enfant martyr Hamza Ali al-Khatib » a été plébiscitée par des dizaines de milliers de personnes.

Estimation du nombre de morts lors de la révolte syrienne (mars 2011-janvier 2012) : plus de 5 000.

Muhammad Nabbous (Libye)

Ingénieur en informatique, Muhammad Nabbous, dit « Mo », a contourné la mise à l’arrêt des serveurs Internet contrôlés par le régime libyen en établissant une connexion satellite directe pour que sa chaîne de télévision amateur Libya al-HurraTV soit diffusée le plus largement possible.

Cette chaîne de télévision a livré à un monde incrédule à l’éveil de la Libye les premières images de la répression sanglante des manifestations du pays. « Je n’ai pas peur de mourir. J’ai peur de perdre la bataille. C’est pourquoi je veux que les médias puissent témoigner de ce qui se passe. Au moins, si nous mourons, beaucoup de gens en seront témoins et la rébellion se propagera partout  » déclarait Muhammad Nabbous.

Journaliste citoyen, symbole d’une société civile bourgeonnante après des décennies de tyrannie, il a été abattu par un tireur isolé quelques heures avant qu’une intervention de l’OTAN lève le siège de Benghazi, contribuant à la chute du régime de Kadhafi.

Estimation du nombre de morts lors de la révolution libyenne (février-octobre 2011) : de 10 000 à 15 000.

Azizah Othman (Yémen)

La mort d’Azizah Othman, une manifestante de 25 ans, à la fin du mois d’octobre 2011 a été enregistrée par hasard et la vidéo a suscité des protestations dans tout le pays.

Dans les jours qui ont suivi son décès, des femmes vêtues de noir ont manifesté devant le siège du ministère des Affaires étrangères à Sanaa, la capitale du Yémen, afin de demander justice. Dans l’un des pays les plus conservateurs du monde arabe, la première femme martyre d’une rébellion qui se poursuit aujourd’hui est le symbole de l’implication des femmes dans la société civile.

La vidéo de ses derniers instants montre son assassin, un loyaliste au régime, se cachant le visage en s’avançant vers les manifestants. Au milieu des cris et des coups de feu, la caméra se tourne vers Azizah Othman, gisant dans une mare de sang, son voile arraché révélant un visage inanimé.

Estimation du nombre de morts lors des manifestations au Yémen (de février 2011 à janvier 2012) : au moins 350.

Karim Fakhrawi (Bahreïn)

À la mi-mars 2011, la minorité sunnite au gouvernement fait évacuer les manifestants du rond-point de la Perle, épicentre du mouvement protestataire majoritairement chiite. Au cours des dix semaines suivantes et en toute impunité, les forces de sécurité ont procédé à des arrestations arbitraires et ont systématiquement agressé et humilié leurs détenus.

Dans ce contexte, Karim Fakhrawi, propriétaire d’une chaîne de librairies à Bahreïn, se présente à un poste de police le 3 avril, après que la maison d’un parent a été saccagée par la police. Dix jours plus tard, son cadavre est rendu à sa famille, les autorités prétendant qu’il est mort d’insuffisance rénale. Une enquête indépendante a constaté qu’il avait été torturé à mort par la police.

Estimation du nombre de morts lors des manifestations à Bahreïn (de février à octobre 2011) : 46.

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Article originellement publié le 15 février 2012 sur 24hGold

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