Le tabou du Droit de Grève

La panne de croissance épouvantable, qui n’a aucune raison d’être en France, est accentuée par la « grèviculture »

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Le tabou du Droit de Grève

Publié le 7 février 2012
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Le droit de grève semble se situer dans l’opinion collective à un niveau supérieur à tous les autres droits comme le droit de consommer, le droit de travailler, le droit de circuler ou le droit de se soigner.

Par Michel de Poncins

Manifestation de grévistes devant l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle, hier.

L’année 2012 a très mal commencé : des milliers de voyageurs ont été privés de leurs droits légitimes de se déplacer. Elle continue de plus belle ; pilotes et personnel de bord ont annoncé une nouvelle grève des transports aériens du 6 au 9 février, pour protester contre la tentative d’installer un service minimum. Plusieurs milliers d’enseignants ont défilé mardi 31 janvier 2012 à Paris à l’appel de syndicats qui ont également lancé un mouvement de grève pour dénoncer les 14 000 suppressions de postes à la rentrée et exiger le retrait du projet de réforme de l’évaluation des professeurs. La grève a touché la province.

Rien ne change vraiment au fil des années. Rappelons-nous qu’une pénible galère avait été infligée aux 600 passagers du train de Strasbourg à Port-Bou dans la nuit de 26 au 27 décembre 2009, avec un retard de 13 heures. Indépendamment des dysfonctionnements, l’enquête avait révélé un odieux scandale, à savoir les grèves « réveillons ». Des préavis de grève sont déposés pour les soirs du 24 et du 31 décembre sous des prétextes divers et ont en réalité un seul objectif : permettre aux agents censés travailler les soirs de fête de rester chez eux ; ce sont les grèves « réveillons ». La « malchance » a voulu que justement ces grèves réveillons autour du jour de Noël à Dijon aient aggravé le calvaire des 600 passagers. Nul ne saura le nombre de grèves réveillons, le tout se perdant dans le puits sans fond d’un mammouth étatique en perdition.

Les grèves de dockers qui paralysent les ports sont récurrentes. Ces grèves sont particulièrement nocives pour l’activité des ports, les armateurs hésitant à y venir, au profit des grands ports étrangers, et au détriment des dockers français eux-mêmes. Il existe des « petites grèves » dont personne ne parle. Citons les grèves qui se passent ici ou là dans les centres de tri postaux. Pour les entreprises c’est une catastrophe : les chèques n’arrivent pas et les mettent en danger.

Des grèves immorales et ruineuses

Le droit de grève est inscrit dans la constitution, on se demande pourquoi, et, en plus, il semble se situer dans l’opinion collective à un niveau supérieur à tous les autres droits comme le droit de consommer, le droit de travailler, le droit de circuler, le droit de se soigner, lesquels devraient lui être très supérieurs.

Sa justification repose historiquement sur l’idée que la grève aurait été la source de progrès sociaux considérables notamment au 19e siècle. Si le tabou n’existait pas, des recherches attentives montreraient que les progrès sociaux ont été bien davantage le résultat de progrès techniques sous l’aiguillon du marché, ces progrès ayant suscité l’amélioration rapide de la condition économique de toute la population.

La grève est immorale car c’est la rupture d’un contrat, à savoir le contrat de travail entre deux personnes, l’employeur et l’employé.

Dans une économie peu diversifiée, comme elle existait encore il y a de très nombreuses années, le conflit social ne touchait pratiquement que les patrons sans que le reste de la population n’en souffre. Dans l’économie extraordinairement enchevêtrée et diversifiée que nous connaissons actuellement, la grève, surtout quand elle est utilisée dans des nœuds économiques, touche des milliers ou des millions de personnes. Les grèves sont, très souvent, des grèves de riches, comme celles des pilotes ou des contrôleurs aériens.

Une remarque importante est que la grève a lieu principalement dans les structures publiques, donc à l’abri de la concurrence, ou dans de très grandes firmes privées. En revanche, dans les PME et les TPE, les grèves sont fort rares ; le personnel est solidaire des patrons et sait très bien que la richesse de l’entreprise conduit chacun à s’enrichir.

Des effets dévastateurs

Les effets de la « grèviculture » en France sont par nature dévastateurs. Les délocalisations en sont pour une part la conséquence. Aux dommages visibles, s’ajoutent une multitude de dommages invisibles que personne ne peut quantifier : voyage raté, nuit de galère, école sans maître, opération retardée parce que le personnel n’arrive pas à l’heure, marché raté, etc. La panne de croissance épouvantable, qui n’a aucune raison d’être en France, est accentuée par la « grèviculture ».

Il est certain que l’économie de marché implique la liberté des contrats et le respect de tous ces contrats y compris le contrat de travail. Ces deux aspects sont un élément essentiel de la richesse générale.

Les défenseurs du droit de grève le justifient en mettant en avant l’idée du service minimum évoqué plus haut. Or c’est une mauvaise réponse à un vrai problème. Quand il y a un organisme public ou quasi public, les « usagers » devraient, en bonne logique, bénéficier d’un service maximum qui fait partie de l’obligation de service public. Tout autre régime est inadmissible et porte atteinte à leur liberté.

D’autres pays

Aujourd’hui les grèves en France sont bien plus nombreuses qu’au Royaume-Uni, qu’en Suède et qu’en Allemagne. En Suisse, les salaires sont plus élevés que dans les pays environnants et les syndicats se plaignent de la concurrence de Français qui viennent travailler en Suisse, notamment à Genève et à Lausanne, tout en vivant en France. Depuis 70 ans, la paix du travail est totale grâce, en particulier, à l’accord des partenaires sociaux. Au Japon, les grévistes mettent un brassard pour indiquer qu’ils sont en grève mais continuent à travailler. Ces pays, néanmoins, ont bénéficié des progrès sociaux aussi bien et même souvent mieux que les autres pays, ce qui condamne l’idée que les grèves étaient nécessaires à ces progrès sociaux.

Aux USA, dans beaucoup d’États, il existe un régime du syndicat unique dans les entreprises ce qui conduit à des conflits. L’Indiana vient de décider que les employés ne seraient plus obligés de cotiser au syndicat qui les représente dans l’entreprise. C’est le 23ème État à le faire. Les analystes observent que dans ces États les investisseurs sont attirés et les créations nettes d’emplois sont plus nombreuses qu’ailleurs.

En France, l’omnipotence des syndicats repose sur un financement abondant et opaque. Le cercle est particulièrement vicieux : prélèvements obscurs et injustes de ces syndicats, utilisation de ces quantités d’argent pour détruire les entreprises, seules créatrices de richesse, et, en conséquence, ruine de l’ensemble de la population y compris les grévistes. Seuls les chefs syndicalistes et leur entourage bénéficient de cette « grèviculture » et de la manne financière qu’elle diffuse.

La conclusion peut être finalement optimiste. Il y a bien d’autres tabous meurtriers en France. La chute d’un seul d’entre eux ouvrirait le bon chemin vers un cercle vertueux. Encore faut-il qu’un pouvoir capable et crédible veuille emprunter ce chemin.

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  • le droit de grêve en fRance doit être limité tant qu’il s’appuie sur le bafouement d’un autre droit : celui du libre choix du consommateur.

    Curieusement, en France, la Grève n’a lieu que dans les secteurs monopolisitiques …..

    Tout se détraque, on ne comprend pas pourquoi … mais qui est John Galt ??

  • Article complétement à coté de la plaque.
    D’un point de vue libéral, en tant que tiers nous n’avons aucune légitimité à nous immiscer dans les relations entre un patron et ses employés. En tant que client, si une entreprise ne me fourni pas le service qu’elle s’était engagé à me fournir, j’en ai rien à foutre de savoir si c’est à cause d’une grèves ou d’une autre (panne de courant, machine défecteuse, etc.), il faudrait qu’elle « paye » tout pareil.
    Quand la SNCF déconne, elle déconne, point barre. La grève d’une partie de son personnel n’est pas une excuse.

    Le problème, ce n’est pas le droit de grève, qui n’est au pire qu’une suspension du contrat de travail à l’initiative de l’employé (ça serait quand même très con de ne pas admettre une modalité intermédiaire entre la situation de travail normale et la démission !).
    Le problème c’est
    1) que les patron n’ont pas le droit de grève, eux : il leur est interdit de suspendre unilatéralement le contrat de travail,
    2) qu’il n’ont pas non plus le droit de faire appel à une autre main d’œuvre pour faire le boulot des grévistes.

    • C’est ce commentaire qui est à coté de la plaque.

      D’abord l’impossibilité de fournir un service pour cause de grève ne libère une entreprise de sa responsabilité civile à l’égard de ses clients que si la grève est assimilé à un cas de force majeure (ce qui l’exception et pas la règle).

      Ensuite dans le droit commun des contrats il n’est certainement pas permis de suspendre unilatéralement un contrat : le cas échéant la partie lésée est susceptible d’être levée de ses obligations et/ou d’obtenir un dédommagement. Autrement dit le droit de gréve c’est une règle (impérative) qui empêche un patron de renvoyer un employé gréviste, sans même parler de lui réclamer des dommages et intérêts : c’est par définition une immixtion dans la relation entre entreprise et salarié. La solution n’est certainement pas de donner le même droit aux patrons !

  • Prendre l’exemple des grévistes du réveillon ou de ceux de certains ports autonomes pour justifier la fin du Droit de grève est contraire à la réalité et mensonger.
    Vous ne montrez pas l’exemple de syndicalistes comme sur l’ancien site BOSH de Vénissieux ou les syndicats au premier rang duquel la CFDT ont grâce à un véritable dialogue social dans l’entreprise permis de préserver l’emploi et de reconvertir un site qui allait fermer.
    Et c’ets le droit de grève qui a permis à ces syndicaliste de faire peser leur voix dans le débat de sauver de l’emploi et de participer à la croissance de notre économie. Vous ne parlez absolument pas de ces hommes et femmes qui s’engagent pour que les salariés aient leur mots à dire sur la façon de pérenniser et valoriser leurs outils de travail.

    Les pays ou l’on est censé faire moins grève comme ceux du Nord ou l’Allemagne sont des pays ou le dialogue social est une valeur ancrée et respectée par tous les courants politiques.

    Mais malheureusement cet article sent bon l’apologie de la lutte des classes, ou le gentil patron est forcément face à de nuisibles syndicalistes égoistes.
    DOMMAGE

    • « de participer à la croissance de notre économie »

      LOL !!!!

      Vous êtes conscient que vous êtes quasiment foutu avec tout les pans de votre économie à crédit qui ce cassent ou vont ce casser la gueule ?

      Et la grève n’est pas le dernier à être responsable, pour l’industrie il faut des trains, des avions, des bateaux et des services qui marchent.

      Une semaine de grève c’est des millions d’euro qui s’en vont en fumée pour strictement rien puisque d’autres pays ont un social excellent sans y recourir.

      Paradoxalement la grève fait fermer des boites, la fonderie qui à 16’000 tonnes de métal bloqué en gare, le transporteur qui a 200 containers à quai ou le commercial qui n’arrive pas pour signer des contrats vous pensez qu’ils vont laisser combien de temps ces nantis les emmerder, mettre en péril leurs boite, leurs employés et foutre en l’air en pure perte des millions d’euros ?

    • « Et c’ets le droit de grève qui a permis à ces syndicaliste de faire peser leur voix dans le débat de sauver de l’emploi  »
      Absolument pas.
      C’est juste que pour une fois les syndicalistes ont accepté de se mettre autour de la table et de discuter avec les patrons. En Allemagne et dans les pays nordiques la grève n’arrive qu’au dernier stade, après de multiples négociations qui peuvent durer des mois. En France c’est « l’argument » massue pour faire « plier » les patrons. Pas de négociations possibles, grève d’abord et imposition des « revendications sociales ». Mais cet état de fait ne marche que dans le public, puisque que l’état ne peut pas virer les fonctionnaires.
      En temps normal dans le privé la grève entraine la faillite, car la grève fait perdre le peu d’argent et de chance de relever l’entreprise.

      « Vous ne parlez absolument pas de ces hommes et femmes qui s’engagent pour que les salariés aient leur mots à dire sur la façon de pérenniser et valoriser leurs outils de travail.  »
      Personnellement je ne demande rien à ces « gens qui s’engagent ». Je préfère et de loin discuter avec mon patron et négocier directement au sein de l’entreprise, avec un contrat rédiger.
      Il est préférable et de loin de laisser les gens négocier au cas par cas dans les entreprises (ce qui se passent justement dans les pays nordiques et l’Allemagne que vous prenez pour exemples de la « réussite des syndicats ») au lieu de décider au plus haut niveau de l’état avec des « syndicalistes » totalement déconnectés du monde du travail. Des gens qui pensent que les employés sont tous dans de grosses entreprises d’état, alors que les 3/4 sont dans des PME – PMI.

  • A supposer que l’on limite le droit de grêve, quelles seraient les personnes habilitées pour évaluer si les motifs présentés pour justifier l’entrée en grêve sont valables ou pas au regard de la loi ?

    • pour air france,limiter le droit de greve c’est obliger a déclarere une greve 48h a l’avance au lieu du dernier moment.réponse des syndicats:si le patron sait a l’avance qui veut faire greve il risque de licencier en premier ces gens la.argument stupide:si tu fais grève,tonpatron ne t’a pas a la bonne de toutes façons,que ça soit 48h avant ou au dernier moment

  • Et ce qui pose problème en tant que tel est beaucoup moins le droit de grêve en tant que tel que la faiblesse des corps intermédiaires (en France, je veux dire) ce qui induit l’inévitable radicalisation des positions des syndicats (cf d’autres pays avec des taux de syndicalisation trois à quatre fois plus importants où les grêves sont beaucoup moins systématiques (et aussi beaucoup plus dures lorsqu’elles apparaissent)

  • Bonjour
    Pour info concernant les transporteurs aériens.
    La réglementation européenne prévoit que les compagnies aériennes doivent indemniser les passagers qui subissent une annulation ou un retard de plus de 3 h : de 250 à 600 ? par passager en fonction de la distance du vol. Les passagers y ont droit même si la compagnie finit par les ré-acheminer à destination sur un autre vol. En plus de cela les frais annexes doivent eux aussi être remboursés par la compagnie.
    Pour plus d?info, vous pouvez aller sur le site de skymediator.

  • ben voila ce qui arrive quand on arrose les syndicats d’argent a gogo.les patrons d’air france ou de la sncf sont ceux qui gaspillent l’argent de leur société avec les comités d’entreprises,les postes protégés etc…resultat ils sont infoutus de mener une négociation préventive avec les mems syndicats!virons ces patrons surpayés et nullissimes!

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